Ce que Mediapart nous apprend du cyberharcèlement mené par Booba et ses fans sur les réseaux sociaux

Publié le par Konbini,

© Romain Perrocheau/AFP

Trois femmes ont à ce jour porté plainte.

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Évidemment, il ne s’agit pas ici de faire un résumé succinct de l’enquête de Mediapart, que vous pouvez lire ici dans son intégralité. Mais il nous paraissait important, en tant que média de pop culture et traitant beaucoup de rap français, de nous faire le relais d’éléments édifiants concernant l’autoproclamé “Duc de Boulogne”.

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Après plusieurs semaines d’enquête, Mediapart raconte les méthodes qu’utilise Booba pour gâcher la vie de personnes dont il n’a, pour la plupart, jamais croisé la route. Les femmes de ses “ennemis”, comme Demdem, la compagne de Gims, ou encore des personnes qui sont juste apparues une fois dans la story de celle dont il a prévu de ruiner l’empire, Magali Berdah : à chaque fois, les méthodes sont identiques. Sur Twitter ou Instagram, le rappeur partage des vidéos ou des photos de ses cibles, les tague et encourage sa communauté à harceler, insulter ou menacer de mort ou de viols de parfaits inconnus.

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“Je reçois d’un coup des centaines de messages. Des menaces, des commentaires selon lesquels ce que je cuisine est dégueulasse et que je ne livre pas à temps”, raconte ainsi Saliha, dont le prénom a été modifié, une cuisinière dont un des plats a été partagé une fois dans la story de Magali Berdah. Cette dernière, papesse de l’influence, est prise en grippe depuis des mois par Booba, qui entend dénoncer les arnaques des influenceurs, organisées par celle qui est à la tête de l’entreprise Shauna Events. Elle racontait déjà à Mediapart au printemps : “Il y a quelques semaines, je suis allée m’enfermer dans un hôtel avec mes filles parce que devant elles, je sais que je ne me ferai rien”, faisant allusion à ses pensées suicidaires. Mediapart indique, citant les avocats de Magali Berdah, que celle-ci aurait “reçu plus de 100 000 messages malveillants, dont des milliers de menaces de mort, de viol, de cambriolage et tout autant d’insultes à caractère sexiste ou antisémite”.

À ce jour, trois femmes ont porté plainte contre Booba : Adja Damba, dite Demdem, la compagne de Gims, pour “diffamation” en septembre 2021, puis pour “harcèlement moral” et “harcèlement sexuel” un an plus tard. Steffy, la présidente de l’association Carl, qui lutte contre les violences intrafamiliales, en juillet dernier pour “diffamation”. Et Magali Berdah le 25 mai dernier, contre Booba et contre X, pour “menaces de mort”, “diffamation”, “injure publique envers un particulier en raison de sa religion”, “appels téléphoniques malveillants” et “harcèlement moral”.

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Du côté du clan du rappeur, on botte en touche ou on minimise ses fautes, comme s’il s’agissait d’un simple jeu. Quand on leur demande des comptes sur les harcèlements de meute encouragés par Booba sur les réseaux, on répond à Mediapart : “Vous vous rendez compte que ça n’a pas de sens, à moins de condamner Booba au silence complet ?” Sur le harcèlement subi par Berdah, les proches de Booba préfèrent indiquer que le rappeur ne fait que se moquer d’un système plus large : “Ce n’est pas Booba qui met en scène sa famille, son domicile, ses opérations de chirurgie esthétique. Booba le relève, s’en moque, et critique en cela la culture du vide promue par les influvoleurs. Sa critique ne se limite pas aux escroqueries, c’est un système qu’il attaque.”

Mediapart creuse aussi la piste de l’indulgence des médias envers Booba. Entre interviews complaisantes et séance photos gratifiantes, rares sont les journalistes à vouloir critiquer le Duc. Et les seuls qui osent juste ne pas parler de lui se sont retrouvés insultés par le Duc sur les réseaux ou ont vu leur famille affichée dans ses tweets, comme ce fut le cas pour Mehdi Maizi, pourtant ancien animateur de la radio OKLM. Même constat du côté de Yérim Sar, un des seuls journalistes à avoir tenu tête au rappeur, qui s’est vu insulté pendant de nombreuses heures sur les réseaux sociaux, avec photos à l’appui. D’autres journalistes ont ainsi été intimidés, menacés ou pris à partie sur les réseaux pour des raisons parfois obscures. Avec cette enquête, le patron autoproclamé du rap français en a peut-être fini avec son immunité si particulière traversant le temps.

Pour lire l’enquête de Mediapart, c’est ici.

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