Bill Murray a 72 ans : retour sur cinq films qui ont fait sa légende

Publié le par Manon Marcillat,

(© Bac Films)

Une longue carrière de swag et de désinvolture.

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Ce 21 septembre, le légendaire Bill Murray a soufflé ses 72 bougies. En près de cinquante ans de carrière, le visage le plus triste du cinéma, qui a fait ses classes au Saturday Night Live, a entre autres interprété le Dr. Peter Venkman pour Ivan Reitman, le présentateur météo Phil Connors pour Harold Ramis, le millionnaire Bunny Breckinridge pour Tim Burton, le riche industriel Herman Blume et l’océanographe Steve Zissou pour Wes Anderson, ou encore l’acteur Bob Harris pour Sofia Coppola.

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“Tout ce qu’il touche, on peut s’attendre à ce que ça devienne une bonne histoire”, tentait de résumer Stephen Tobolowsky, Ned dans Un jour sans fin, pour les besoins du documentaire Le fantastique Mr Murray.

Car si Bill Murray n’a jamais été submergé de récompenses, c’est davantage son ambivalence qui a façonné son aura. À mi-chemin entre véritable légende et légende urbaine (ses frasques avérées ou non ont même droit à leur propre site Web), aussi impassible qu’imprévisible, il est à la fois humoriste fantastique, mélancolique et cynique. Son visage chiffonné, perpétuellement étonné, et ses yeux “droopyesques” lui confèrent un capital sympathie rarement atteint dans le star system hollywoodien.

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Voici cinq films qui ont façonné la légende Murray.

#1. Un jour sans fin, d’Harold Ramis

Si le film du regretté Harold Ramis a été érigé au rang d’œuvre culte pour nombre d’entre nous, on se range plutôt du côté de ceux qui trouvent que les années ont eu raison de son éclat.

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Cependant, si le principe de distorsion temporelle est un concept éculé du cinéma, c’est à Un jour sans fin qu’en revient l’honneur. Et comme Bill Murray lui-même considère son interprétation de Phil Connors comme sa meilleure performance, le film mérite de fait sa place de numéro un dans cet article.

Il y endosse le rôle d’un présentateur météo orgueilleux et condamné à revivre à l’infini le jour de la marmotte. C’est grâce à Un jour sans fin, dans lequel il injecte la juste dose de cynisme et de sincérité, que Bill Murray a su prouver qu’il était un acteur nuancé avec une véritable épaisseur. D’ailleurs, force est d’admettre qu’avoir coincé le roi de l’humour pince-sans-rire dans le jour le plus inutile du calendrier était effectivement un coup de maître au comble de l’ironie.

Mais Bill Murray a poussé le cynisme au-delà des limites du plateau. Le documentaire Le fantastique Mr Murray nous apprend que l’acteur avait engagé une assistante sourde et muette pour gérer les relations avec Harold Ramis, avec qui il a cessé toute communication pendant le tournage du film.

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#2. Ghostbusters, d’Ivan Reitman

Réputé pour être très difficile à convaincre, Bill Murray a visiblement le nez creux quand il accepte un rôle. Sorti en 1984, Ghostbusters est restée la comédie la plus rentable de Hollywood avant d’être détrônée par Maman, j’ai raté l’avion ! en 1990.

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Mais le rôle ne lui était initialement pas destiné. Il a remplacé au pied levé son ami John Belushi, décédé avant le tournage. Certainement un film à la saveur douce-amère pour Bill Murray, qui y délivre pourtant une performance étonnante et ambivalente. Il y campe le Dr. Peter Venkman, un personnage malhonnête en affaires et plutôt détestable avec la gent féminine, à la fois plein d’ironie et de second degré, tout en prenant son sujet très au sérieux.

Ce qui devait d’ailleurs être un pur film de science-fiction est devenu une comédie grâce aux improvisations des membres de la troupe du Saturday Night Live en scientifiques ringards qui fondent leur petite entreprise d’éradication de fantômes.

Madeleine de Proust pour de nombreux enfants des années 1980, Ghostbusters offre également une photographie pertinente d’une certaine Amérique, où l’écologie se situait du côté des méchants et la recherche du profit à tout prix derrière le rêve américain.

#3. Broken Flowers, de Jim Jarmusch

Jim Jarmusch est un des réalisateurs qui jalonnent la carrière de Bill Murray. Et on aime particulièrement le rôle à contre-emploi qui lui a été offert dans Broken Flowers.

Bien loin du quinquagénaire qui entretient une relation platonique avec sa belle et jeune voisine de chambre de Lost in Translation, il est ici un don Juan sur le retour.

C’est la lettre anonyme d’une ancienne amante, lui annonçant qu’il est le père d’un fils désormais âgé de 19 ans, qui va sortir Don Johnston de sa léthargie. Son voisin fou d’intrigues policières va le pousser à décoller son postérieur de son canapé en lui concoctant un road-movie américain sur les traces de ses anciennes conquêtes, en les personnes de Sharon Stone, Frances Conroy, Jessica Lange et Tilda Swinton.

Avec Broken Flowers, on a la sensation que Jim Jarmusch avait dans l’idée de faire de Bill Murray le sujet de son film et qu’il a souhaité le cueillir à l’orée de ses 55 ans pour l’amener vers une introspection sur son propre vieillissement.

Là où cet ancien collectionneur de femmes, paresseux et se reposant sur les lauriers de son aisance financière, aurait pu être un profil rebattu du cinéma, son interprète l’illumine de petites lueurs d’humanité et d’optimisme.

Une nouvelle fois d’un minimalisme à la Buster Keaton, qu’il a d’ailleurs érigé en père spirituel après avoir assidûment fréquenté la Cinémathèque française à Paris, Bill Murray parvient à transcender ce don Juan en personnage ambitieux que chaque retrouvaille avec les anciennes femmes de sa vie va élever.

#4. Lost in Translation, de Sofia Coppola

Connu pour être l’homme le plus injoignable de tout Hollywood, il se murmure que Sofia Coppola aurait tenté de joindre Bill Murray sans relâche pendant un an avant qu’il n’accepte son rôle dans Lost in Translation. Et on comprend pourquoi c’était lui et pas un autre qu’elle voulait, tant le rôle de Bob Harris semble avoir été écrit sur mesure. Ce rôle lui a d’ailleurs valu son unique nomination aux Oscars à l’heure actuelle.

Si en 2003, il n’était pas un acteur sur le déclin forcé d’accepter de juteux contrats publicitaires à l’instar de son personnage, l’impression qu’il traverse le cours des événements sans avoir l’air d’y toucher et accepte avec lassitude le poids de son existence est en revanche très Murray.

Tout en économie de mots mais certainement pas d’émotions, il entretient à la perfection l’ambiguïté de sa relation avec Charlotte (Scarlett Johansson), dans laquelle réside tout l’intérêt du très beau deuxième film de Sofia Coppola.

Dans Lost in Translation, Bill Murray constitue la quintessence du spleen tout en infusant de délicates petites touches d’humour bienvenues dans la mise en scène pastel et mélancolique de la fille Coppola.

Si l’on attend avec impatience le prometteur On the Rocks, on oublie souvent que les premières retrouvailles entre la réalisatrice et son acteur fétiche ont eu lieu un certain soir de Noël 2015, sur Netflix. Mais malgré l’impressionnant cast de A Very Murray Christmas, qui regroupe des acteurs et actrices tous et toutes capables du meilleur (Bill Murray, Michael Cera, George Clooney, Rashida Jones, Amy Poehler, Chris Rock, Maya Rudolph, Jason Schwartzman et Miley Cyrus), ce moyen-métrage s’était malheureusement avéré très dispensable.

#5. La Vie aquatique, de Wes Anderson

Après un premier passage enchanteur devant la caméra du jeune Wes Anderson dans Rushmore, où il joue un industriel paumé qui se bat contre un étudiant acharné pour le cœur d’une enseignante de leur lycée, il faudra attendre deux films avant que le cinéaste américain mette réellement Bill Murray devant le feu des projecteurs.

Outre le fait qu’il s’agit d’un des – si ce n’est le – meilleurs films de l’ami Wes Anderson, c’est aussi tout simplement l’un des plus beaux rôles de Bill Murray, mélancolique, drôle, jaloux, émouvant. Ce faux capitaine Cousteau est complexe, et en même temps d’une simplicité folle. Un homme en manque de reconnaissance et prêt à tout pour se faire aimer des autres, quitte à accepter un fils venu à l’improviste sur le tournage de son prochain documentaire.

Là où Bill Murray est sublime sous son bonnet rouge, réside dans sa capacité à jouer, une fois encore, un loser, nostalgique, parfois détestable, mais qu’on ne peut s’empêcher d’aimer plus que tout le reste. Il est plus facile d’aimer le personnage de son fils, incarné par Owen Wilson. Sauf que La Vie aquatique ressemble à un film écrit pour Murray et centré sur Murray. Un hommage signé Wes Anderson, plus que réussi.

Article écrit par Arthur Cios et Manon Marcillat