Rien qu’avec ses posts, une influenceuse à 3 millions d’abonnés pollue autant que 481 allers-retours Paris-New York

Publié le par Pierre Bazin,

Et c’est sans compter les vrais voyages en avion.

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On le sait désormais, le virtuel est paradoxalement très palpable, surtout quand on se penche sur la pollution numérique que les ordinateurs, téléphones, appareils électroniques de tout genre et services en ligne génèrent. Bien sûr, de nombreuses technologies ont aussi permis de se détacher de certaines consommations néfastes pour l’environnement, par exemple, si vous lisez plus de 20 livres par an, une liseuse sera plus écologique.

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Mais les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont des pendants négatifs. D’abord, la fabrication des appareils électroniques est très demandeuse en terres rares et autres métaux précieux dont certains ont des réserves très limitées sur Terre.

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Ensuite, l’interconnectivité de tous ces appareils nécessite aujourd’hui d’immenses data centers dont les besoins en énergie (principalement liés au refroidissement des serveurs) sont loin d’être anodins – le secteur informatique représente 1,4 % de la consommation énergétique mondiale. Et si ces mêmes serveurs reposent sur une énergie lourde en émissions carboniques, alors l’impact de la pollution numérique devient non négligeable dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Influenceurs : tous pollueurs ?

La question de la pollution numérique ces dernières années sous-entend également que des secteurs émergents doivent être attentifs à leur empreinte carbone. Ainsi, les activités des nouveaux influenceurs du Web (Insta, YouTube, Twitch, TikTok, etc.) commencent, elles aussi, à soulever des questions quant à leur impact sur l’environnement.

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Bien sûr, un certain mode de vie des influenceurs est déjà critiqué d’un point de vue environnemental : le fait qu’ils prendraient trop l’avion pour leurs voyages, qu’ils encourageraient à la surconsommation via leurs partenariats sponsorisés, etc.

Mais pour la première fois, une étude menée par Footsprint et 1000heads s’est intéressée au bilan carbone des influenceurs directement imputable à leurs activités en ligne : posts, contenus publiés, stories, messages, etc.

Pour l’étude, une influenceuse française ayant 3 millions d’abonnés sur YouTube, TikTok et Instagram s’est prêtée à l’exercice. Nous la nommerons comme le fait l’étude, Clara.

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En analysant tous ses posts de vidéos et autres contenus sur ses réseaux, l’étude a estimé que Clara avait généré 1 072 tonnes de CO² en un an, soit l’équivalent de 481 allers-retours Paris-New York en avion !

Pour rappel, cela n’inclut que la part de pollution numérique, à laquelle il faudrait donc ajouter ses activités “physiques” comme les possibles (vrais) vols d’avion pour des vlogs afin d’estimer toute son empreinte carbone.

La majeure partie des émissions de CO² des activités de Clara est imputable à ses contenus vidéo. Il y a, bien sûr, l’upload mais c’est surtout le streaming par son audience qui pollue. Charger des flux vidéo demande de l’énergie aux serveurs et pas qu’un peu, sans compter les données qui doivent transiter pour assurer la meilleure qualité de visionnage.

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Source : Footsprint

De cette étude, on comprend rapidement que YouTube représente la plus grande partie de cette pollution numérique. C’est notamment dû au fait que les vidéos y sont plus longues, plus regardées mais également en meilleure qualité vidéo – ce qui consomme encore plus d’énergie.

Vers de nouvelles bonnes pratiques écolos des influenceurs ?

L’étude se conclut également en listant quelques bonnes pratiques à adopter pour réduire son empreinte carbone numérique. Il y a, par exemple, l’idée de minimiser la durée de certains contenus vidéo ou encore de compresser leur qualité d’encodage. En effet, une vidéo en 360 p n’a pas le même impact qu’une en 4K – alors que ce dernier format n’est encore que très peu bien lu sur bon nombre d’appareils.

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Source : Footsprint

Il y a aussi des conseils à adopter au quotidien comme privilégier le wi-fi plutôt que les données cellulaires (4G, 5G). Il est intéressant de constater que ces conseils s’appliquent autant à l’influenceuse (Clara) qu’à son audience, et même aux annonceurs avec qui Clara pourrait être en collaboration. L’étude incite ainsi influenceurs comme annonceurs à encourager directement leur audience à adopter ces gestes, pouvant faire de l’influence une puissante actrice d’externalité positive dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Notons tout de même une principale limite aux propositions de l’étude : elle interroge moins le modèle énergétique derrière cette pollution numérique. Par exemple, on apprend dans l’étude que pour une même vue de vidéo aux États-Unis, ce sont jusqu’à cinq fois plus d’émissions en moyenne qu’en France. Cette énorme disparité est due à la proportion bien plus élevée d’énergies fossiles dans le mix énergétique américain en comparaison à la France.

La question de la responsabilité écologique des constructeurs et propriétaires de data centers se doit d’être posée. En Europe, par exemple, les serveurs des GAFAM sont majoritairement présents en Irlande, pays qui bénéficie d’une fiscalité avantageuse mais qui reste un pays extrêmement dépendant aux énergies fossiles (plus de 80 %), ce qui alourdit l’empreinte carbone.