Un scientifique a enquêté sur les régimes des blogueuses healthy stars d’Instagram 

Publié le par Jeanne Pouget,

Les soeurs Hemsley aux fourneuax, auteures du best seller The Art of Eating Well ( ©
Hemsley & Hemsley/ Facebook)

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Dans le documentaire Clean eating, the dirty truth diffusé sur la BBC, le professeur Giles Yeo enquête sur les régimes à la mode sur Instagram, en particulier la mouvance du “clean eating”, popularisée par des blogueuses devenues des stars. 

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Si vous êtes un utilisateur d’Instagram et amateur de foodporn, vous devez sûrement connaître le hashtag “clean eating”. Utilisé près de 28 millions de fois sur le réseau social, il met en avant divers types d’alimentation dites “saines” dans un fourre-tout pas toujours très homogène, mais avec une idée commune : améliorer sa santé à travers ce que l’on met dans son assiette.

Sur le podium du mouvement “clean eating” (littéralement “manger propre”), des blogueuses devenues des influenceuses pour des milliers de jeunes femmes à travers le monde en partageant leurs recettes healthy dans des livres devenus des best-sellers ou sur leurs comptes Instagram aux millions de followers. En tête, Ella Mills alias “Deliciously Ella” (un demi-million d’exemplaires de livres écoulé), suivie des sœurs Hemsley (186 000 exemplaires vendus et une série télé), ou encore Natasha Corrett et Vicki Edgson (plus de 100 000 exemplaires vendus).

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Chacune promeut une alimentation différente : végane et sans gluten pour la première, carnée mais sans gluten et sans graines pour les secondes, et un régime alcalin ou acido-basique pour les dernières. Avec une nouveauté cependant : ces blogueuses ne vantent pas les mérites de ces styles alimentaires comme des régimes faisant perdre du poids, mais comme un mode de vie destiné à améliorer sa santé.

Science contre croyance

Giles Yeo a donc enquêté sur cette mode du “clean” popularisée grâce aux réseaux sociaux en partant à la rencontre de certaines de ces blogueuses, mais aussi – et surtout – de ceux qui les ont influencées (auteurs, médecins, scientifiques, nutritionnistes…). Sans chercher à décrédibiliser ces femmes qui encouragent la jeunesse à manger mieux et plus de légumes (ce qui n’a jamais fait de mal à personne), il s’est demandé en quoi ces régimes étaient vraiment meilleurs pour la santé en s’attachant à le prouver scientifiquement.

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En tant que chercheur, Giles Yeo souhaite ainsi faire la distinction entre l’exception et la règle, l’anecdote et la généralité. Et prendre ainsi ses distances avec les nouveaux diktats d’Instagram. Il a donc voyagé entre le Royaume-Uni et les États-Unis à la rencontre des gourous des gourous. Colin Campbell, un biologiste et biochimiste spécialisé dans les effets de la nutrition sur la santé, auteur de The China Study (promouvant un régime sur les légumes), Dr. William Davis, cardiologue et auteur de Wheat Belly (exhortant à abandonner le gluten), et enfin Robert O’Young, un naturopathe promouvant le régime alcalin.

En interrogeant les personnes à la source, Giles Yeo souhaite ainsi montrer la différence entre des hypothèses et des faits validés par la science. Dans la plupart des cas, évidemment, il démontre qu’aucune expérience scientifique n’est venue prouver à 100 % que les modes alimentaires popularisés par les blogueuses et inspirés par ces auteurs étaient vraiment meilleurs pour la santé que d’autres.

Quels dangers ?

Au cours de son enquête, Giles Yeo constate que certains chercheurs comme Colin Campbell n’affirment pas que leurs découvertes sur l’alimentation et la santé (en l’occurrence ici un régime végan) s’appliquent à tout le monde. Ses recherches concernant le Dr. William Davis (cité par les sœurs Hemsley) montrent que les théories selon lesquelles le gluten affecterait tout le monde ne sont pas approuvées par Alessio Fasano, l’un des plus importants spécialistes de le maladie de cœliaque (causée par le gluten).

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Plus gênant encore du côté de Robert O’Young, qui a inspiré le régime alcalin de Natasha Corrett. Le documentaire révèle que l’homme a acheté son doctorat et qu’il risque trois ans de prison pour exercice illégal de la médecine. En cause : le décès de l’une de ses patientes atteinte d’un cancer incurable à l’âge de 27 ans à qui il avait facturé un traitement d’injections d’alcaline à 80 000 euros. Si la jeune femme était de toutes façons condamnée, ses proches accusent le “médecin” de faire du business autour de la guérison du cancer, en vendant des potions magiques sur Internet et en exploitant la vulnérabilité des gens.

Ainsi, pour Giles Yeo, aucun de ces régimes n’est basé sur des preuves mais plutôt sur des interprétations. Il fait ainsi la distinction entre le monde de la science avec l’objectivation des faits et le monde du “clean eating” qui serait plutôt celui des croyances. Il en conclut que les stars du “clean eating” ne font rien de mal dans leur démarche d’aider les gens à manger plus sain. Mais leur influence croissante leur donne une responsabilité envers leurs fans. Il rappelle que jusqu’à aujourd’hui, le seul conseil nutritionnel sain et approuvé qu’ait pu apporter la science est d’avoir un régime équilibré et limité en viande.

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