Quand l’artiste Shannon Bell éjaculait en public pour prôner le pouvoir du corps féminin

Publié le par Pauline Allione,

Une démonstration éclaboussante de l’existence de la prostate et des fluides féminins.

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Dans l’histoire de la sexualité féminine, les connaissances autour de notre sexe ont souvent été sujettes à l’oubli puis à la redécouverte. Si le clitoris est enfin entièrement représenté dans les manuels de SVT, la prostate et l’éjaculation féminines, bien réelles, continuent toujours de créer la controverse.

Retour dans les années 1980, quand l’artiste Shannon Bell coupait court à tout débat à travers des performances humides et savamment maîtrisées. Professeure de sciences politiques à la York University de Toronto, philosophe expérimentale, autrice et féministe postmoderne, Bell a très largement contribué à mettre en lumière l’éjaculation féminine.

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Surnommée “The Ejaculator”, la Canadienne contrôle entièrement ses éjaculations et voit en cette faculté un geste politique empouvoirant et résolument féministe. Selon elle, les femmes fontaines déconstruisent le préjugé qui voudrait que seuls les hommes éjaculent et, ce faisant, mettent ces deux genres sur un pied d’égalité.

Shannon Bell, Toronto. (© Ruthann Tucker)

Fontainer pour se réapproprier l’éjaculation

Fervente défenseuse de l’éjaculation comme “pouvoir érotique”, Bell éjacule sur scène, où elle éduque et déconstruit les mythes et idées reçues autour de ce phénomène, à commencer par le fait que la miction expulsée serait de l’urine. Face au public, l’artiste se masturbe – avec ou sans l’aide d’un gode ou vibromasseur – et fait de sa jouissance un joyeux spectacle qui démontre la parfaite connaissance qu’elle a de son corps.

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“Bell perfectionne la technique corporelle de l’éjaculation, parvenant à éjaculer en une à trois minutes et jusqu’à quinze fois par heure avec stimulation clitoridienne ou vaginale, avec ou sans orgasme”, rapporte Stephanie Haerdle dans Fontaines – Histoire de l’éjaculation féminine de la Chine ancienne à nos jours. La chercheuse et philosophe connaît l’aspect, la couleur et l’odeur du fluide sécrété par sa prostate selon son cycle menstruel, et contrôle si bien le jet expulsé qu’elle peut viser une pièce de monnaie avec son éjaculat.

Shannon Bell, Toronto. (© Ruthann Tucker)

Les fluides féminins sur scène et à l’écran

Comme Shannon Bell l’explique dans son livre Fast Feminism, ses performances décomplexées s’inscrivent dans la lignée d’autres artistes avant elle, à l’instar de Seedbed (1972) de Vito Acconci, où celui-ci se masturbait huit heures par jour sous la rampe d’une galerie new-yorkaise à la vue des passant·e·s ; de l’onanisme public d’Annie Sprinkle, une autre héroïne de l’éjaculation féminine avec qui Bell a beaucoup travaillé ; ou encore d’une performance de l’artiste transgenre Allucquere Rosanne Stone, qui caressait la paume de sa main en quête de plaisir sexuel, dans les années 1990.

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Outre ses performances, Shannon Bell montre aussi ses talents d’éjaculatrice à l’écran. En 1989, dans la vidéo Nice Girls Don’t Do It qui mêle pornographie et didactique, Shannon Bell éjacule plusieurs fois sur une durée de treize minutes et prouve que la jouissance féminine peut être débordante.

On la retrouve encore dans le célèbre How To Female Ejaculate: Find Your G-Spot, un film “inspirant et instructif” de Deborah Sundahl et Carol Queen censé donner les clés aux femmes pour connaître leur “point G” et parvenir à éjaculer, sans que cela devienne une injonction pour autant. Dans un cadre plus intimiste, Bell a également animé de nombreux ateliers, des années durant, destinés à éduquer sur la question d’un plaisir féminin démonstratif, explosif et éminemment politique.

Shannon Bell, Toronto. (© Ruthann Tucker)

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