This Is Us ou le triomphe des sentiments sur le cynisme

Publié le par Marion Olité,

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La première saison de This Is Us a quelque chose de miraculeux. 

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“Our love story, I know, it may not feel like it right now, but baby, I promise, it’s just getting started”*. Les derniers mots plein d’espoir de Jack à Rebecca lors du season finale de This Is Us peuvent aussi s’interpréter comme un clin d’œil des scénaristes aux fans d’un show qui vient d’être renouvelé pour deux nouvelles saisons. Un show pour lequel des milliers d’Américains ont eu un coup de foudre avant même sa diffusion. Souvenez-vous du buzz incroyable de son trailer, qui avait cumulé 50 millions de vues sur Facebook. Et on peut dire qu’on n’a pas été trompés sur la marchandise.

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Dès cette fameuse bande annonce, on avait droit à tout ce qui a fait le succès de This Is Us : une musique réconfortante, un ton globalement feel good, la promesse d’aborder des sujets comme l’obésité, la mort ou l’adoption, de l’humour, des sentiments, sans oublier la pierre angulaire du show formée par Milo Ventimiglia et Mandy Moore. La suite n’a pas déçu et l’histoire d’amour entre This Is Us et son public s’est poursuivie tout au long de la première saison, s’achevant sur un record d’audience (à près de 13 millions de téléspectateurs pour son season finale). 

Une saison durant laquelle Dan Fogelman et ses scénaristes nous ont rappelé que le genre du drame familial n’était pas mort avec des shows comme Parenthood ou Brothers and Sisters. Il avait seulement besoin de retrouver un second souffle. De s’adapter à l’air du temps (en adoptant notamment une narration déconstruite très tendance), de s’attaquer à des problématiques actuelles ou encore de mieux représenter la diversité de l’humanité, tout simplement. This Is Us est une série à haute teneur lacrymale, assez obsédée par la mort malgré ses pulsions de vie (l’une ne va pas sans l’autre, me direz-vous). Elle aurait pu facilement tomber dans un pathos insupportable.

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On attendait presque qu’elle se plante. Mais non. À l’image d’un Love Actually qui aurait eu le temps de pousser davantage ses personnages dans leur retranchement, This Is Us ne s’est jamais départie d’une totale absence de cynisme, assumant complètement ses grands sentiments et ses envolées lyriques, à une époque où les antihéros et antihéroïnes ont encore pignon sur rue, où les séries les plus hype sont très souvent cruelles (coucou GoT et TWD) ou portées par des protagonistes badass et cyniques. Comment réhabiliter les bons sentiments sans tomber les deux pieds dans une grosse tarte à la crème indigeste ? En comptant sur une écriture fine et en osant évoquer des sujets universels, mais pas si simples à mettre en scène.

Le point fort de cette première saison, c’est l’histoire de Randall, le bébé adopté par Jack et Rebecca à la maternité, alors que le couple vient de perdre son 3e enfant. Voilà un sujet – l’adoption d’un enfant noir par des parents blancs et toutes les problématiques qui en découlent – très rarement traité à la télévision. Devenu père lui-même, Randall (interprété par l’excellent Sterling K. Brown) va découvrir ses origines et faire face à une crise existentielle. Les deux storylines le concernant, qu’il soit jeune ou plus vieux, sont traitées avec beaucoup de sensibilité et de justesse. Elles entraînent dans leur sillage d’autres problématiques, comme celle du burn-out au travail et des troubles de l’anxiété, encore une fois très peu abordées sur le petit écran, qui plus est avec un personnage masculin. 

Une série qui n’a pas peur d’afficher ses sentiments

Dans This Is Us, les hommes pleurent régulièrement, que ce soit Jack, Randall, Kevin ou William. Ce sont des êtres sensibles, au même titre que les protagonistes féminines. Et c’est quand chacun exprime ce qu’il ressent, que ce soit négativement ou positivement, que la série livre ses plus belles scènes et que ses personnages se révèlent. Elle nous délivre un message à la fois simple mais bien plus compliqué qu’il n’y paraît à mettre en pratique : il faut exprimer ses sentiments.

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Garder ses peurs pour soi, réfréner ses angoisses ne fonctionne pas, ni pour Randall qui se met une pression pas possible pour être parfait, au point de se provoquer des crises d’angoisse hardcore, ni pour Rebecca qui se prend ses secrets de famille en pleine poire comme un boomerang, ni pour Kate qui garde beaucoup trop de choses pour elle, et installe une distance avec son adorable chéri, Toby, au point d’être à deux doigts de tout faire foirer entre eux. La clé pour aller mieux : lâcher les chevaux, dire ce qu’on a sur le cœur, communiquer avec l’autre, l’écouter, le comprendre. C’est notamment vrai pour la relation compliquée qu’entretiennent Kevin et Randall, le premier ayant le sentiment d’avoir été négligé par ses parents au profit du second. Résolument humaniste, la série opte le plus souvent pour une résolution optimiste, sans donner dans le cucul.

C’est que This Is Us n’est pas une série sentimentaliste qui vous dit que tout ira bien dans le meilleur des mondes, mais une série qui dissèque les sentiments de ses personnages. Elle ne cesse d’explorer le pesant (et parfois réconfortant) poids du passé familial. Elle nous dit que la mort rôde à chaque coin de rue (entre William, Toby, le suspense un peu lourd sur la mort de Jack ou encore la perte d’un bébé dès le pilote, on est servis) et qu’on n’a pas grand chose à faire sinon l’accepter, et tenter d’avancer. Voilà une série qui assume sa vulnérabilité et affiche volontiers ses sentiments et son bon cœur tout en réussissant l’exploit de ne pas nous écœurer. Alors chapeau. Imaginez si Walter White était né chez les Pearson. On vous garantit qu’il n’aurait pas viré baron de la drogue. 

*“Tu as peut-être du mal à le voir comme ça maintenant, mais notre histoire d’amour, je te le promets, ne fait que commencer”.

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