En saison 4, Unbreakable Kimmy Schmidt s’attaque à la masculinité toxique et c’est jouissif

Publié le par Delphine Rivet,

Eric Liebowitz/Netflix

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S’il y a bien une chose avec laquelle on n’a pas envie de plaisanter en ce moment, c’est bien #MeToo et les répercussions du mouvement sur la société. Mais ça, c’était avant qu’Unbreakable Kimmy Schmidt s’empare de ce sujet “touchy”. La démarche peut paraître opportuniste, et le timing est évidemment en sa faveur, mais ce n’était qu’une question de temps avant que la série n’aborde le sujet de la masculinité toxique. Et surtout, c’est dans la continuité logique du parcours de notre héroïne. Pour rappel, Kimmy Schmidt (Ellie Kemper), l’une des quatre “mole women” baptisées ainsi par la presse, a été kidnappée et retenue prisonnière dans un bunker par le révérend Richard Wayne Gary Wayne (Jon Hamm) durant 15 ans.

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Kimmy vs le patriarcat

Une grande partie de la dimension comique de la série repose sur le fait que Kimmy est profondément gentille et honnête, au point de mettre les gens mal à l’aise, et surtout inadaptée à la société dans laquelle elle a soudain été plongée. Ce que la série ne nous dit pas, mais nous suggère fortement, c’est qu’elle et ses sœurs d’infortune ont été abusées sexuellement par le révérend. En saison 3, on apprenait même que, légalement, Kimmy était toujours mariée à ce dernier.

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Sur ces six épisodes de la première moitié de la saison 4, notre héroïne va se rendre compte qu’elle n’est pas la seule à souffrir, encore aujourd’hui, des actions et des manipulations d’un homme. Quand elle découvre sur HouseFlix – un ersatz de Netflix plus réel qu’on ne souhaiterait l’admettre – un documentaire sur le parcours du révérend qui manipule la vérité et tente de décrédibiliser son expérience traumatique, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Elle réalise rapidement que Richard Wayne Gary Wayne est loin d’être le seul porc à balancer et part alors en croisade, d’abord pour elle-même, mais aussi pour toutes les petites filles que l’on veut mettre en cage – Titus monte littéralement une comédie musicale avec des écolier·ère·s dans laquelle une fillette est en cage.

Tout y passe, des tropes sexistes des contes de fées à la mouvance masculiniste. Bobby Moynihan (un ancien comédien du Saturday Night Live) interprète Fran Dodd, l’un des plus grands fans du révérend et membre des Men’s Rights Activists, ce que le patriarcat a fait de pire en réaction à la nouvelle vague de féminisme. L’un d’eux a récemment fait la une de la presse en tuant dix personnes, et en blessant quatorze autres en commettant un attentat à Toronto en avril dernier.

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Unbreakable Kimmy Schmidt ne rate donc pas une occasion de moquer ce personnage de Fran et ses idées rétrogrades. La nuit, il rêve sûrement d’instaurer une république de Gilead, histoire de faire payer toutes les femmes qui ont eu l’audace de le rejeter. Enrobé dans des dialogues aussi surréalistes qu’hilarants, tout le discours féministe de la série est exposé, et c’est l’écriture de Tina Fey, plus encore que celle de Robert Carlock, qui s’exprime. Et c’est ce qui servira de fuel à la quête de justice de Kimmy.

Comme un poisson hors de l’eau

Dans cette entreprise louable, il y a un autre élément déclencheur, en plus du documentaire gerbant façon Making A Murderer. Kimmy va en effet avoir un avant-goût du harcèlement sexuel au travail… mais pas en tant que victime. On pouvait craindre qu’un tel parti pris donne du grain à moudre aux partisans du hashtag #NotAllMen, mais il n’en est rien et c’est toujours avec une bonne dose d’humour absurde qu’Unbreakable Kimmy Schmidt renverse la vapeur.

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Fraîchement embauchée en tant que directrice des RH dans une start-up, et seule femme de la boîte, notre pétillante héroïne est chargée de virer un employé. Parce que faire preuve de cruauté lui est parfaitement insupportable, elle va tout faire pour mettre le jeune homme à l’aise, histoire que son licenciement passe comme une lettre à la poste. Problème, comme d’hab, Kimmy en fait des caisses.

N’ayant aucune notion des limites à ne pas dépasser, les familiarités deviennent vite déplacées. #Awkward. Elle découvre alors que tous ses collègues, masculins donc, interprètent son extrême joie de vivre comme du harcèlement. Elle n’a pas l’once d’une mauvaise pensée, mais n’a simplement pas les codes moraux qui nous permettent de vivre en communauté. Et c’est toujours cette idée de décalage, de poisson hors de l’eau, qui fait le piment de la série. Elle apprendra même, grâce à Titus et une équipe de manucures coréennes, ce qu’est le “white privilege”. Plus “woke”, tu meurs.

Six épisodes, ça semble si court en si bonne compagnie. Mais ce laps de temps passé avec Kimmy, Jacqueline et Titus (qui restent les personnages les plus drôles de la série), sans oublier la fantasque Lillian, est déjà amplement suffisant pour crucifier la société patriarcale et ses dévots. Ajoutons que Jon Hamm, malgré son rôle de raclure finie, est toujours aussi drôle… Donnez tout de suite sa propre comédie à cet homme !

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Et, pour ne rien gâcher, la comédie de Fey et Carlock n’a rien perdu de sa superbe, se permettant d’imaginer, une fois de plus, toute une ribambelle de répliques tordantes et délicieusement méta, à grand renfort de références à la pop culture et à l’actu, qui passeront sûrement à la postérité sous forme de gifs inspirés. L’attente jusqu’aux prochains épisodes, prévus pour 2019 – une décision pour le moins discutable de la part de Netflix et des producteurs tant le format ne se prête pas du tout à un tel hiatus – promet d’être interminable. Mais la perspective de voir notre Unbreakable Kimmy Schmidt continuer de casser du mâle sexiste avec toute sa candeur et sa joie de vivre nous aidera forcément à tenir !

Les six premiers épisodes de la saison 4 d’Unbreakable Kimmy Schmidt sont disponibles sur Netflix.