Chernobyl : un récit glaçant sur le pire accident nucléaire de l’histoire

Publié le par Adrien Delage,

Ⓒ HBO

La nouvelle mini-série de HBO revient sur la catastrophe nucléaire de Tchernobyl avec une immersion redoutable.

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En 2019, le slogan “It’s no TV, it’s HBO” n’a jamais été aussi sensé. La célèbre chaîne câblée propose un catalogue tout bonnement dantesque cette année, ponctué par la conclusion de Game of Thrones, les retours de True Detective et Big Little Lies ou encore l’arrivée de projets alléchants tels que le teen drama Euphoria et l’adaptation de Watchmen par Damon Lindelof. Casey Bloys et ses équipes pourraient se contenter de battre les records d’audience et de ramasser un paquet d’Emmy, mais ils n’en font rien et nous offrent une pépite au beau milieu de la GoT mania : Chernobyl.

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Cette pépite, elle est faite d’uranium et hautement radioactive : la mini-série de HBO parle bien entendu de l’accident nucléaire de Tchernobyl, qui a eu lieu la nuit du 26 avril 1986. Si les Millennials ont tous une fois dans leur vie entendu parler de la catastrophe et de ses conséquences humaines, sanitaires et écologiques terribles, Chernobyl propose d’aller en profondeur (littéralement) avec les ouvriers de la centrale, qui ont assisté au test à l’origine de l’explosion du réacteur numéro 4 et furent les premiers exposés aux éléments radioactifs.

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La mini-série de HBO tente également le pari de multiplier les points de vue pour mieux les recroiser entre le personnel de la centrale, les habitants de Prypiat, la ville la plus proche de la centrale Lénine, le bureau de l’administration et les membres du gouvernement soviétique. D’une façon ou une autre, tous ont joué un rôle ou été les victimes dans la gestion cauchemardesque de cet accident nucléaire. Âmes sensibles s’abstenir : Chernobyl est une fiction historique qui se veut très documentée et donc aussi terrifiante que passionnante à suivre.

Jargon scientifique et images horrifiques

Ⓒ HBO

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Le pilote de Chernobyl est une véritable maestria d’immersion et de suffocation. L’épisode “1:23:45” de la mini-série narre les cinq premières heures de la catastrophe, affichant à l’écran les minutes qui défilent comme une horloge apocalyptique qu’il est impossible d’arrêter. Les événements s’enchaînent certes de façon didactique, mais glacent le sang du spectateur à mesure que les particules nucléaires s’échappent de la centrale et que les ouvriers et pompiers sur place s’écroulent face au syndrome d’irradiation aiguë.

La première heure de la mini-série est tournée comme un film d’horreur. Le plus gros de l’intrigue se déroule dans des sous-sols clos où on étouffe autant que les membres du personnel, désemparés devant l’incendie du réacteur, incontrôlable. Le réalisateur Johan Renck filme d’ailleurs ses personnages au plus près, créant un sentiment d’urgence et d’oppression constant. La tension est palpable tout au long des 56 minutes du pilote, jalonnées d’images horrifiques : les premiers irradiés vomissent, entrent en état de léthargie tandis que de larges cloques apparaissent sur leur peau.

À la vue de ces séquences quasi insoutenables, on se dit que le metteur en scène appuie ses ressorts dramatiques. Quelle naïveté de notre part. Une simple recherche Google sur le syndrome d’irradiation aiguë confirme l’horreur qui s’affiche à l’écran : les premiers symptômes comme la nausée et les brûlures peuvent apparaître dès les premières minutes du contact avec des éléments radioactifs. Chernobyl prend alors une tout autre dimension, celle d’une réalité qu’on avait le sentiment de connaître mais qui se trouvait à des années-lumière de l’enfer vécut par les citoyens soviétiques.

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Ⓒ HBO

Car oui, le showrunner Craig Mazin (aussi scénariste de Very Bad Trip 2, cherchez donc une cohérence) et son équipe de scénaristes ont épluché leur sujet en long, en large et en travers. Les dialogues millimétrés de la mini-série utilisent un jargon souvent pointu voire scientifique mais forcément pédagogue. On passe une grande partie de l’épisode à mettre pause et chercher le sens des mots graphite, Sievert, dosimètre, réacteur RBMK… ce qui nous permet également de souffler pendant notre visionnage intense. De ce point de vue là, le show explore tous les aspects de la catastrophe avec une véracité des faits glaçante.

Dans la même envie de réalisme, les personnages de Chernobyl sont pour une grande partie des hommes qui ont véritablement existé : l’ingénieur Anatoly Dyatlov (campé par Paul Ritter, sublime dans son machiavélisme), qui a supervisé le test raté et affiche un négativisme choquant, le professeur en énergie atomique Valery Legassov, Fomin et Bryukhanov, les dirigeants de la centrale Lénine… Tous incarnés à la perfection par un casting appliqué (dont Jared Harris, déjà impressionnant dans The Terror), les protagonistes sont tous anglais par choix artistique, évitant ainsi des accents russes forcés et valorisant l’idée de reconstitution fictive.

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Une catastrophe humaine avant tout

Ⓒ HBO

Pour nous plonger dans son cauchemar et nous laisser pétrifiés de peur devant notre écran, Chernobyl joue sur les apparences trompeuses de l’événement. On connaît, dans les grandes lignes a minima, la réaction en chaîne de la fusion du cœur qui vont mener jusqu’à la formation d’un nuage radioactif dans l’atmosphère terrestre. La mini-série joue de ce savoir pour nous retourner les tripes : on songe à cette scène effarante où des enfants de Prypiat dansent sous les particules de l’explosion, pensant avec insouciance que ces éléments radioactifs sont inoffensifs et semblables à de la neige.

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Mais la mini-série apprécie également nous prendre à revers. Si la catastrophe de Tchernobyl fut aussi mortelle et mal gérée, c’est en partie à cause du manque de communication voire de la désinformation des dirigeants de la centrale et du gouvernement par rapport à la population. Dans les premières heures, tout le monde ment ou refuse d’entendre la vérité, comme Fomin et Bryukhanov qui condamnent à la mort un pauvre employé suite à ses théories jugées fumeuses sur la fusion du cœur. Le tout est couvert sous un faux-semblant de fierté patriotique à vous donner la nausée et vous révolter devant votre écran.

Il est très difficile d’enchaîner les épisodes de Chernobyl, et c’est bien un excellent compliment à faire à la mini-série. On en ressort choqué voire brutalisé par la réalité de l’accident nucléaire et ce qui se trame en arrière-plan. Si le récit est un peu froid avec ses personnages, créant difficilement une forme d’empathie pour eux au milieu de cette apocalypse, on est happés par ce trou noir historique qui a bouleversé la planète tout entière. Les ultimes secondes du pilote, que nous éviterons soigneusement de spoiler ici, vous hanteront pour l’éternité.

En France, les cinq épisodes de Chernobyl sont diffusés tous les mardis soir en US+24 sur OCS City.