Qu’est-ce que la yassification, ce phénomène photo qui déferle sur les réseaux sociaux ?

Publié le par Lise Lanot,

© Yassify Bot

Rien à voir avec un individu nommé Yassine, mais plutôt une tendance qui interroge nos rapports à la beauté et aux réseaux.

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Ce mois de novembre, on a vu déferler sur les réseaux sociaux des photos de célébrités – voire de personnages historiques, politiques ou de chefs-d’œuvre de l’art pictural – transformées, affublées de longs cils, d’épais sourcils, d’extensions de cheveux et de contouring. Ces images sont le fruit de Yassify Bot, un compte Twitter (et non un robot, comme son nom le laisse entendre) créé le 13 novembre dernier.

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C’est un·e étudiant·e de 22 ans vivant dans le Nebraska qui, depuis l’activation de son compte, partage des centaines de photos modifiées à plusieurs reprises à l’aide de FaceApp, dévoile le New York Times. Le choix du verbe “to yassify” est un dérivé du mot “yas”, un terme utilisé comme un équivalent surexcité du banal “yes” dans la pop culture, popularisé par la culture drag notamment et propulsé par diverses séries, mèmes et tendances Internet.

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L’idée de passer de célèbres visages à la moulinette des retouches n’est pas franchement révolutionnaire, d’autant que l’application photo FaceApp est loin d’être nouvelle. La tendance a pourtant inondé la Toile et même la publicité – la compagnie de transport ferroviaire Amtrak a par exemple surfé sur la tendance en annonçant la “yassification” de ses trains pour 2022, grâce à une vidéo TikTok.

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De la blague potache à la satire

La “yassification” des visages qui pullule sur les réseaux sociaux ouvre plusieurs pistes de réflexion. Tout d’abord sont convoquées la fluidité des genres et l’incorporation de codes drag dans la culture populaire. De façon plus sombre, l’automatisation de la transformation de la réalité est également soulevée.

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Apposé sur tous les visages, le filtre “yassify” souligne le fait que tout ce qu’on voit sur les réseaux est faux. Les critères de beauté se lissent jusqu’à créer une créature hybride, moitié réelle, moitié fictive, qui se protège du reste du monde grâce à ce qui ressemble de façon ostentatoire à un masque. Paradoxalement, les visages “yassifiés” ne paraissent pas si étrangers et finissent souvent par ressembler à des célébrités ou des baddies Instagram.

Calqués sur les biais humains, les résultats de l’intelligence artificielle affinent les nez, grossissent les lèvres, lissent les grains de peau et l’éclaircissent bien souvent. La blague potache devient ainsi satyre d’un système discriminant, excluant et raciste.

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Comme toute bonne tendance Internet, l’effervescence ne devrait pas tarder à se calmer. Pour la personne à l’origine du compte Twitter, ce devrait d’ailleurs déjà être le cas : “Si je n’en étais pas à l’origine, j’aurais bloqué le compte. Complètement”, a-t-elle déclaré au New York Times.

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