Loin des clichés, les rappeurs des quartiers péruviens mis à l’honneur par Claudia Rivera

Publié le par Lise Lanot,

© Claudia Rivera

Une lettre d’amour en images pour les quartiers et la "movida hip-hop" afin d’en finir avec "les images violentes et péjoratives" habituelles.

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Depuis qu’elle est enfant, Claudia Rivera n’a cessé d’être confrontée au racisme ordinaire et aux stéréotypes visant son pays d’origine, le Pérou, et l’Amérique latine : “Ton père, c’est un narco ?”, “Ta famille vient d’un cartel ?”, “Les Latinos, vous aimez trop la drogue”, se remémore, en vrac, la photographe.

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Face à ces associations d’idées entre “l’Amérique Latine et ses quartiers populaires” et “les cartels, les gangs, la drogue, ou encore Pablo Escobar”, Claudia Rivera est partie réaliser Mi Barrio Querido, une “série photographique autour des quartiers populaires de Lima” lors de son “dernier voyage au Pérou”, en 2021.

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Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)

La movida hip-hop

“C’est un projet que j’ai en tête depuis un moment”, confie l’artiste, qui souhaitait se distancier des “images violentes et péjoratives” habituelles. Des remarques d’autant plus “violentes” pour les populations et leur diaspora que ces dernières n’ont que trop “conscience des dégâts causés par la drogue dans [leurs] pays”, note la photographe, déjà à l’origine d’un beau projet mettant en lumière la communauté latina de France.

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C’est vers la“movida hip-hop” (“le mouvement hip-hop”), un mouvement dont “on n’entend pas du tout parler en France”, et qui est pourtant “très fort dans les quartiers populaires de Lima”, que la photographe s’est tournée pour montrer sa réalité et celle des habitant·e·s de ces banlieues.

Sonido de la Resistencia, Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)

Reconnaissant la “complexité” de la situation sociale et économique de son pays, Claudia Rivera souligne surtout les “grandes choses dont on ne parle jamais” qui s’organisent là-bas : “Prendre ces images en tant que femme péruvienne dont la famille habite aussi dans la banlieue de Lima a été important pour moi. Depuis petite, je pense avoir grandi avec une vision différente de ces quartiers. J’en garde beaucoup de bons souvenirs lors de mes séjours au Pérou.”

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Un portrait aussi fidèle que possible

Cet amour des quartiers, l’artiste le partage avec les personnes qu’elle a photographiées. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle a nommé sa série Mi Barrio Querido, “Mon quartier chéri” en français. Son projet a commencé dans le quartier de la Victoria, lors d’un grand concours de rap (le “Zumba Tu Tema”) organisé par le label Money Gang Victory.

San Martin de Porres, Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)

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Cette introduction à des artistes venant “des quatre coins de Lima” emmène Claudia Rivera auprès “d’autres grands artistes limeños”. “Il y a eu par exemple SloowTrack, originaire du quartier de Santiago de Surco, El Sonido de la Resistencia de San Martin de Porres, Mseco de Pueblo Libre, ou encore la jeune et talentueuse Larry de San Juan de Miraflores.” Des artistes pour la plupart peu connu·e·s en France mais rempli·e·s “de talents” et aux “styles super intéressants”, navigant entre rap, salsa et reggaeton.

Parti de l’envie de rendre hommage aux lieux et à leurs habitant·e·s, le projet est centré autour d’une seule et même question posée par Claudia Rivera à ses modèles : “Quel est l’endroit préféré de ton quartier ?”. “Je les laissais ensuite me montrer et me raconter ce qu’ils voulaient. Je ne sais pas vraiment si on peut appeler ça des séances photo. Tout se faisait de façon très naturelle. Généralement, je leur demandais de me faire découvrir les endroits importants de leur quartier et je prenais des photos sur le chemin. Beaucoup de photos ont aussi été prises quand on traînait ensemble dans Lima”, conte-t-elle.

Stefan, Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)

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Chaque portrait s’accompagne des mots des personnes photographiées, qui s’épanchent sur l’histoire de leurs quartiers afin d’en brosser un portrait aussi fidèle que possible : “J’aimerais qu’on s’intéresse aux quartiers populaires du Pérou mais aussi d’Amérique latine dans leur entièreté. Et, surtout, qu’on se renseigne sur ce qu’il s’y passe réellement, plutôt que de se contenter d’une image fantasmée et loin de la réalité. C’était important pour moi d’en proposer une vision différente et je suis super fière de le faire avec l’aide de nombreux artistes péruviens.”

La Victoria, Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)
La Victoria, Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)
Nero Lvigi et Gilow, Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)
Young Rich, Mi Barrio querido. (© Claudia Rivera)

Pour découvrir les coups de cœur musicaux de Claudia Rivera, c’est par ici :

Nero Lvigi me touche beaucoup. En plus d’être un rappeur incroyable, il œuvre pour son quartier de la Victoria. C’est d’ailleurs par amour pour le rap et pour son quartier qu’il a créé son label Money Gang Victory avec ses amis Jeff et LilDrake en 2019. Ainsi, il encourage les jeunes de la Victoria dans leur parcours artistique, il leur donne un lieu où se réunir pour écrire et enregistrer leur musique.”

“J’ai eu la chance de suivre NeroLvigi sur ses clips et notamment sur le remix de ‘Cometelos’, où il est en feat avec Sloowtrack et Blaximental, deux grands rappeurs péruviens.”

“Mseco est un rappeur/producteur/beatmaker très old school et connu pour cela en Amérique latine. Sa façon de travailler m’a impressionnée. Les week-ends, il allait tôt au marché aux puces de Lima (appelé Tacora) afin de trouver des cassettes à quelques centimes d’euro. Il rentrait ensuite chez lui dans son studio pour écouter ces pistes, les découper et sampler les parties qui lui paraissaient intéressantes. Parfois, il ajoutait également du scratch sur certaines de ses pistes. Puis il posait dessus. Tout simplement… et en seulement quelques heures !”

“Il existe un sous-groupe dans le label Money Gang Victory appelé ‘Los Menores’ qui regroupe les plus jeunes talents. On y retrouve les brillants Neiram del Bloque et Jhanziel.”

Vous pouvez retrouver Claudia Rivera sur Instagram.