Le peintre John Currin revisite le porno à travers un classicisme maussade

Publié le par Pauline Allione,

© John Currin/Gagosian Gallery

Usant de techniques picturales traditionnelles, l’artiste dépeint des scènes sexuellement explicites.

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À la croisée de YouPorn et de la peinture classique de la Renaissance, il y a John Currin. Réputé pour ses œuvres provocantes voire dérangeantes dans lesquelles il explore souvent l’érotisme, le peintre américain dévoile une nouvelle série de tableaux lubriques qui empruntent autant aux codes d’arts considérés comme nobles qu’à la pornographie mainstream.

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Mêler le sacré au profane

Sa série Memorial, récemment exposée à la galerie new-yorkaise Gagosian, représente principalement des sujets féminins en plein acte sexuel, en solo ou à plusieurs. Hautement explicites, ces scènes picturales dépeignent des femmes nues ou vêtues de draps, dont les corps décharnés présentent des attributs sexuels délibérément exagérés avec des poitrines XXL surréalistes et grotesques.

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John Currin, “Mantis”, 2020. (© Rob McKeever, avec l’aimable autorisation de la galerie Gagosian)

Si ces saynètes érotiques sont subversives, c’est parce que John Currin use d’une technique picturale d’un autre siècle. Inspiré par les chefs-d’œuvre de la Renaissance et des artistes comme Lucas Cranach l’Ancien, Botticelli et Nicolas Poussin autant que par les pin-ups et la pornographie scandinave des années 1970, l’artiste états-unien revisite le style des plus grands noms du classicisme.

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Il livre ainsi une version trash du nu féminin, là où les toiles validées par les institutions conventionnelles sont plus suggestives que purement explicites. “Dans leur maniérisme extrême, [ses personnages] combinent le beau et le grotesque, le sacré et le profane” détaille la galerie Gagosian.

John Currin, “Caryatid”, 2021. (Rob McKeever, avec l’aimable autorisation de la galerie Gagosian)

Poitrines XXL et regard vide

Les femmes de John Currin sont également peintes en trompe-l’œil avec une peau marbrée obtenue grâce à la grisaille, une technique picturale monochrome qui n’est pas sans rappeler les sculptures grecques de divinités, le réalisme des proportions en moins.

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Le plaisir sexuel n’est quant à lui pas représenté, le regard vide et sans pupille des personnages dégageant davantage une morne lassitude que de la joie. Et pour ajouter au trouble ambiant, on discerne dans les visages de ces femmes les traits de l’artiste Rachel Feinstein, femme et muse du peintre.

John Currin, “Limbo”, 2020. (© Rob McKeever, avec l’aimable autorisation de la galerie Gagosian)

Entamé en 2020, le projet Memorial renoue avec l’esthétique porno d’anciennes œuvres de John Currin dont il avait souhaité s’éloigner. Indéniablement vectrices du male gaze de l’artiste qui ne représente presque que des femmes nues aux formes caricaturales, ces toiles sont nées de réflexions autour du genre et de l’intimité.

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Les visages impassibles des personnages et les tons froids de ses toiles seraient ainsi un moyen pour l’artiste d’explorer la pornographie et l’érotisme dans toute leur dimension mortifère.

John Currin, “Pinup”, 2021. (© Rob McKeever, avec l’aimable autorisation de la galerie Gagosian)
John Currin, “Climber”, 2021. (© Rob McKeever, avec l’aimable autorisation de la galerie Gagosian)

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John Currin, “Memorial”, 2020. (© Rob McKeever, avec l’aimable autorisation de la galerie Gagosian)
John Currin, “Sunflower”, 2021. (© Rob McKeever, avec l’aimable autorisation de la galerie Gagosian)