On vous présente Youssef Swatt’s, jeune rappeur belge à la plume trempée d’amertume

Publié le par Maëva Carayon,

©JuPi

Warm Up : il a fait ses premiers pas dans le rap à 15 ans et il vient de sortir son deuxième album Poussières d'espoir. Entretien.

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On le sait maintenant. En ce qui concerne la scène rap, la Belgique regorge de talents et elle n’a sûrement pas fini de vous surprendre. La preuve avec le rappeur de 22 ans, Youssef Swatt’s, originaire de Tournai. Il a fait ses réels premiers pas dans le rap à l’âge de 15 ans en dévoilant son premier EP prometteur, L’Amorce. En juin 2017, il a dévoilé son premier album entièrement financé par son public Vers l’infini et au-delà. Il revient aujourd’hui avec un nouveau projet épatant, qui marque l’évolution artistique du rappeur. 

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Avec une plume soignée et des textes forts, Youssef Swatt’s a tout pour s’imposer dans le milieu. Le jeune rappeur surdoué, qui, en parallèle de la musique, gère son propre label et anime divers ateliers d’écriture, vient tout juste de dévoiler ce vendredi 3 avril un nouveau projet. Le bien nommé Poussières d’espoir. Un projet profond où l’artiste se confie, partagé entre les rêves et la parfois dure réalité de la vie, réalisé en commun avec le beatmaker El Gaouli. 

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Konbini | Qui es-tu ?

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YoussefJe m’appelle Youssef Reziki ! J’ai 22 ans et quand j’étais petit je voulais “raconter des histoires”. C’est plus ou moins ce que je fais aujourd’hui !

D’où viens-tu ?

Ma famille est d’origine algérienne. J’ai grandi à Tournai en Belgique et je vis à Bruxelles depuis quatre ans.

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Où et quand es-tu né ?

Je suis né le 8 février 1998 à Tournai.

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Quand et comment as-tu commencé la musique ?

J’ai commencé à écouter du rap français avant même d’apprendre à écrire. Donc mon envie de faire de la musique date d’il y a vraiment longtemps. Du coup, je suis tombé dans la musique très jeune. J’ai commencé à monter sur scène vers 13-14 ans et j’avais 15 ans quand j’ai sorti mon premier EP.

Qu’est-ce que tu fais en parallèle à la musique ?

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Je suis étudiant en communication et je bosse en parallèle en tant que chef de projet dans une agence de communication, à Bruxelles. À côté de ça, j’anime beaucoup d’ateliers d’écriture dans différents milieux (prisons, maisons d’enfants, centres psychiatriques, maisons de jeunes, etc.)

© Valentin Delaunoy

Quelles sont tes influences musicales ? 

J’ai passé une grande partie de ma vie à écouter du rap français, depuis très jeune. Donc à l’époque, principalement Sniper, Psy 4 De La Rime, Youssoupha, Disiz, Kery James, Keny Arkana et des centaines d’autres artistes qui m’ont bercé ! 
Aujourd’hui, j’écoute un million de choses différentes. C’est dur de choisir, mais voilà les 10 artistes que j’ai le plus écoutés sur Spotify dernièrement : Billie Eilish, Ninho, Michael Kiwanuka, Kanye West, Cheb Hasni, Disiz, Lost Frequencies, J. Cole, Dinos, Jessie Reyez. 

Côté belge, je suis trop fier de ce qui se fait et je m’en inspire énormément. Des plus gros artistes que vous connaissez tous, à celles et ceux qu’il faut absolument découvrir : Scylla, Convok, l’Hexaler, Seyté, Isha, Ritchy Boy, Ana Diaz, Coline & Toitoine. En vrai j’en ai trop, faut que je vous fasse une playlist !

Comment as-tu été découvert ?

Un jour, il y avait une séance de dédicace du rappeur Scylla dans ma ville. J’avais 14 ans et à l’audace j’ai lâché un freestyle devant lui ! La vidéo a été mise en ligne et j’ai été contacté par Deparone, un grand monsieur du rap belge qui voulait me donner de la force. Du coup, j’ai eu l’honneur d’initier le concept de “Poignée de punchlines” et c’est vraiment ce qui m’a propulsé d’un coup !

Ta musique oscille entre rap conscient et rap à l’ancienne : comment pourrais-tu définir ton style musical ?

En vrai j’ai toujours eu du mal à coller des étiquettes sur de la musique, en particulier dans le rap qui, aujourd’hui, s’est vraiment diversifié. J’ai toujours privilégié le fond à la forme. Ça doit s’entendre assez facilement [rires]. Mais je préfère le définir comme du “rap où on ne met rien après”, comme dirait Nekfeu.

Tu viens de sortir ton album Poussières d’espoir  ? Comment l’as-tu conçu ?

C’est un album commun que j’ai entièrement réalisé avec le beatmaker El Gaouli. Pendant deux ans, j’ai pris le bus de nuit entre Bruxelles et Paris plusieurs dizaines de fois pour enregistrer l’album. Avec 9 heures de trajet aller-retour, ça me laissait le temps d’écrire sur la route (c’est surtout que le TGV ça coûte trop cher). C’est la première fois que je conçois un album avec quelqu’un de A à Z et c’est vraiment une expérience enrichissante. Au-delà du travail et de la musique, c’est surtout une belle aventure humaine.

© JuPi

Et justement, quels sont les principaux messages d’espoir que tu veux faire passer ?

Jacques Brel disait : “Je ne délivre pas de messages. Pour ça, il y a les facteurs”. Je pense que c’est assez prétentieux pour moi de dire que je viens passer un message. Disons que la musique me sert juste à exposer un certain point de vue, à me confier comme à un journal intime, à parler de choses qui m’inspirent.

Après les gens peuvent en faire ce qu’ils veulent. Peut-être que ça leur apportera de l’espoir. À l’inverse, peut-être que ça leur donnera des idées noires, je sais pas trop ! En vrai ces “poussières d’espoir” que sont mes morceaux : soit elles viennent éclaircir les taches noires que t’as dans la tête, soit elles viennent les assombrir s’il s’agissait de taches de couleurs, à toi de voir !

Tu as été à l’affiche de plusieurs festivals et même au Sénégal, qu’est-ce que cela t’a apporté ?

Monter sur scène, c’est la plus belle chose que la vie m’ait offerte ! Pouvoir voyager avec mon équipe et vivre des moments uniques avec le public, ça m’a vraiment fait grandir. Et puis, de s’envoler vers l’Afrique pour un concert c’est également une chance incroyable. Le Sénégal c’est une expérience musicale et humaine incroyable. J’ai rencontré des gens passionnants et on prévoit d’ailleurs d’y retourner bientôt.

Dans ton morceau “Un Jour”, tu dis : “Tous ceux qui lisent entre mes lignes et puis les artistes qui m’inspirent, un jour j’arrêterai le rap, mais j’arrêterai jamais d’écrire.” C’est comme ça que tu envisages ta fin de carrière, peut-être d’écrire pour les autres ?

Cette phrase, je l’ai reprise du morceau “Poids Plume” de Youssoupha. Dans mon cas, je veux surtout dire qu’un jour le rap m’aura sûrement comblé ou au contraire trop frustré. En tout cas, j’espère que je m’arrêterai au bon moment. Mais l’écriture à proprement parler, je ne saurai jamais m’en passer.

J’ai trop envie d’écrire pour d’autres supports, m’orienter pourquoi pas vers la fiction, le cinéma, la littérature… J’ai déjà eu des propositions pour écrire pour d’autres artistes. C’est super intéressant mais c’est un exercice que j’ai du mal à réaliser pour l’instant.

© Alexinho Mougeolle

Tu voulais devenir écrivain. Qu’est-ce que tu préfères, finalement, dans l’écriture des textes et dans le rap, plutôt que dans l’écriture de livres ?

J’écris un peu de fiction, de pensées et d’autres choses qui n’ont rien à voir avec le rap, donc je compare toujours les deux univers. Pour moi ça se partage. Je préfère l’écriture au sens large, parce qu’elle est plus libre et que j’ai du mal à me limiter “techniquement” au format musical de l’écriture.

Mais le rap pour moi est beaucoup plus puissant dans la phase d’interprétation. Pouvoir partager ce qu’on écrit sur scène, créer des musiques qui ont une âme, transmettre une émotion avec sa voix, pour moi ça dépasse tout ce qu’il y a derrière.

Dans ton morceau “Aleph” tu dis : “depuis que je me prends pour un rappeur je rappe beaucoup moins, voilà le paradoxe”. Tu peux nous expliquer cette phrase ?

Mes meilleurs amis me taquinent souvent sur le fait que je ne rappe plus tout le temps et partout comme à l’époque. Quand j’étais plus jeune, je freestylais dans la rue à toute heure, peu importe si on était 3 ou 30. 

Depuis que les choses sont plus “sérieuses” je suis devenu un peu réservé. Mais je n’oublie pas d’où je viens : mes meilleurs concerts étaient sur la Place Saint-Pierre, sans micro, sans scène et sans basse [rires].

Comment tu juges ton évolution depuis ton premier EP L’Amorce dévoilé à l’âge de 15 ans, à maintenant ?

Je pense (ou j’espère) que j’ai appris à explorer d’autres univers musicaux et à créer des morceaux du début à la fin. Quand j’étais plus jeune, je faisais vraiment ça sur un coin de table. Mais j’en suis fier, ça a son charme ! Je pense que l’évolution principale se voit surtout sur scène où j’ai vraiment acquis de l’expérience.

Quels souvenirs gardes-tu de ta jeunesse ? C’est une source d’inspiration pour toi ?

J’espère qu’à 22 ans, j’ai encore quelques souvenirs à capturer [rires]. Mais ce qui m’inspire énormément, ce sont mes débuts dans le rap. Vers mes 13-14 ans, quand je faisais mes premiers concerts, mes premiers freestyles dans les rues de Tournai, les premiers voyages grâce à la musique, les premiers studios. Des souvenirs d’une valeur inestimable !

Est-ce que tu appréhendes la sortie de ton nouveau projet ? Quelles sont tes attentes autour de celui-ci ?

Je ne me suis jamais vraiment fixé “d’attentes”, ce qui m’importe réellement c’est de pouvoir offrir un projet de qualité aux gens qui me suivent. Je suis très content pour l’album, mais je suis surtout excité en pensant au prochain (qui est déjà en route).

Jusqu’ici j’étais assez confiant, mais avec tout ce qui se passe en ce moment, il y a de fortes chances que l’album se noie dans un flot d’actualités un peu sombres. Mais bon, c’était écrit ! J’espère surtout qu’il permettra à certaines personnes de penser à autre chose le temps de 14 titres.

Tu peux nous en dire un peu plus sur les 14 morceaux qui composent ce nouveau projet ?

Ils ont été entièrement conçus avec El Gaouli, qui a donc composé les 14 titres. C’est un album assez personnel, un peu triste (ou peut-être beaucoup), mais il y a quand même quelques morceaux plus lumineux [rires].

© JuPi

Et sur les artistes et rappeurs dont tu es proche ?

J’ai énormément de reconnaissance pour plein d’artistes que j’apprécie et qui me donnent beaucoup de force. Je pense notamment à Scylla qui m’a offert l’opportunité de faire pas mal de ses premières parties par le passé, notamment à La Cigale. Récemment, on avait quelques dates programmées, qui malheureusement ont été reportées. Mais ce n’est que partie remise !

Tu as créé ton propre label, tu écris et autoproduis tes projets. Ce n’est pas trop compliqué à gérer ? 

Mon label me sert surtout à disposer d’un cadre légal pour mes contrats et mes factures. J’ai monté ma société mais je ne gère pas d’autres artistes pour le moment. C’est surtout pour mes projets, car j’ai toujours dû jouer un rôle 360 dans la gestion de ma musique. J’ai longtemps été mon propre manager, booker, attaché de presse.

Honnêtement, c’est mon kiff perso. J’ai du mal à m’en détacher, mais je ressens de plus en plus ce besoin de déléguer des choses autour de moi. J’ai la chance d’être super bien entouré, j’ai maintenant pas mal de soutien et mon équipe travaille d’arrache-pied pour porter mes projets.

Si tu devais convaincre les gens d’écouter ta musique, tu leur dirais quoi ?

Je leur dirais merci (d’avance) de faire vivre les mots que j’ai écrits dans ma petite chambre !

Tes futurs projets ?

Le prochain album est déjà en route et j’ai vraiment envie de le peaufiner au maximum. Faire de jolis clips, inviter des artistes que j’aime sur l’album, faire plein de concerts. À suivre !

Le mot de la fin ?

Vers l’infini et au-delà !