My Body My Choice : visite d’une exposition féminine et féministe

Publié le par Kirkis,

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Le 8 mars est passé, mais la lutte pour l’égalité entre femmes et hommes, c’est tous les jours qu’elle se mène, y compris dans le monde de l’art.

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Après une exposition réussie qui s’intéressait à de jeunes artistes se questionnant sur les concepts de genre et de plaisirs (“Le Quatrième Sexe“), la galerie Le Cœur récidive avec “My Body My Choice“, “un appel, pour les femmes, à garder le contrôle de leur corps et de sa représentation”, une exposition où quatre femmes photographes se rencontrent : Maroussia Rebecq, Alice Moitié, Sonia Sieff et enfin Estelle Hanania, qui a accepté de s’entretenir avec moi.

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Estelle Hanania : “L’Origine du monde” revisitée

Cette artiste sortie des Beaux-Arts de Paris déploie une démarche qu’elle qualifie elle-même de “vaste”, oscillant entre projets artistiques et commandes commerciales qui lui permettent de financer son art :

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“Ces deux pratiques font partie de ma formation, se nourrissent l’une l’autre. […] Par exemple la photographie exposée dans cette exposition est à l’origine une image que j’ai produite pour une revue qui m’avait donné une “carte blanche”. J’aime réactiver les images passées et leur redonner un contexte différent, faire vivre les images plusieurs fois, les mettre en lumière de diverses façons.”

Pour la galerie Le Cœur, elle expose donc une photographie d’un rouge brillant, présentant une femme sortant d’une fente, référence croisée aux Tagli de Lucio Fontana et à L’Origine du monde de Gustave Courbet :

“J’étais enceinte au moment de la prise de vue et je pense qu’inconsciemment j’avais envie que ça se termine ! Et en m’inspirant de la peinture de Lucio Fontana, j’en ai fait une sorte de mise en abîme de ma propre renaissance à travers cette naissance à venir.”

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Sonia Sieff : le corps de la femme dans toute sa nudité

À ses côtés, Sonia Sieff, fille de photographes et collaboratrice de Vanity Fair et Vogue, présente une série de petits formats, des clichés intimistes qui présentent des femmes nues dans des intérieurs feutrés.

Elle présente également un plus grand format, pris cette fois en extérieur, qui offre un contraste de lumière saisissant en juxtaposant les corps, nus toujours, d’une femme noire et d’une femme blanche.

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L’incruste naturiste d’Alice Moitié

Dans des formats exagérément plus grands, la photographie d’Alice Moitié, jeune artiste parisienne qui a travaillé pour de nombreuses marques, nous envoie en vacances avec une photographie digne du souvenir de famille : un père tenant son fils par l’épaule, pas très loin une petite fille dos à nous, mais aussi, ce qui contraste dans cet ensemble presque banal, une femme nue qui semble s’être introduite par la droite dans le cadre façon “photobombing“.

Moi, Maroussia toute nue

Enfin, Maroussia Rebecq passe devant l’objectif dans une succession de clichés pittoresques et décalés, parfois en confrontation avec de grandes œuvres de l’art contemporain, mais sans conteste libérés, l’artiste s’affichant parfaitement à l’aise, même dans les positions les plus ridicules. Présentées sous forme de cubes que l’on peut manipuler, tourner, empiler, déplacer, les photographies de Maroussia Rebecq nous renvoient de manière ludique à l’enfance, où jamais un jeu de construction n’aurait offert autant de plaisir des yeux.

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Une exposition féminine et féministe

Des femmes artistes qui exposent des corps de femmes, il n’en faudrait pas plus pour qualifier cette exposition de féministe. Estelle Hanania se considère d’ailleurs timidement comme féministe :

“Je suis pour une égalité parfaite entre les hommes et les femmes, en ce sens je suis féministe si l’on veut. […] Il y a du boulot mais j’ai l’impression que ça bouge sévèrement aux quatre coins du monde.”

À l’heure où des associations comme HF dénoncent les inégalités entre les femmes et les hommes dans le milieu de la culture, le fait qu’une galerie offre aux femmes artistes une place de choix dans sa programmation ne peut qu’être encouragé :

“Le marché semble dominé par des hommes qui s’accaparent un peu les positions clefs et les gros salaires, c’est un peu pathétique de voir les vieux clichés de l’artiste créateur masculin contre la femme qui, elle, n’a pas besoin de créer car elle procrée. […] On ne devrait même pas se poser la question des femmes artistes ou des hommes artistes, ce n’est pas le sexe qui définit l’artiste mais le travail produit.”

Un lieu de débats

L’exposition renforce son engagement en invitant les podcasts de La Poudre à enregistrer son émission le soir du vernissage qui a eu lieu sans hasard aucun le 8 mars, journée internationale des droits des femmes. Réalisés par Lauren Bastide, ex-rédactrice en chef de Elle, et ex-chroniqueuse du “Grand Journal” de Canal +, ces podcasts mettent à l’honneur des femmes, qui parlent de leur vécu de femmes et des causes qui leur sont chères. Pour “My Body My Choice”, ce n’est pas moins de trois intervenantes qui se sont succédé face à Lauren Bastide : Elvire Duvelle-Charles, militante féministe, journaliste et documentariste passée par le groupe des Femen ; Rébecca Chaillon, artiste performeuse ; et Élise Thiebaut, journaliste et auteure de Ceci est mon sang, livre consacré à l’histoire des menstruations.

Un salon d’écoute confortable spécialement dédié permet d’écouter les précédentes émissions, et un salon de lecture met à disposition des livres et articles écrits par des femmes. De quoi prolonger l’exposition dans des réflexions profondes et engagées.

Pour couronner le tout, cette exposition est en partenariat avec La Librairie des femmes qui leur prête des livres féministes qui peuvent être feuilletés et achetés sur place.

Le féminisme, l’affaire de toutes et tous

Cette non mixité dans l’organisation pourrait peut-être (et ils auraient tort !) faire hésiter les hommes à pénétrer dans cet espace d’art ; Estelle Hanania les rassure :

“Non, ce n’est absolument pas une exposition qui s’adresse uniquement aux femmes ! […] Le masculin et le féminin doivent vivre ensemble et aucune exclusion ne devrait s’opérer dans aucun sens que ce soit. […] Je préfère me sentir comme un être multiple et complexe, toujours en mouvement et n’appartenant pas à un groupe précis, surtout pas lié à mon sexe.”

“My Body My Choice”, galerie Le Cœur, 83, rue de Turenne, 3e arrondissement. L’exposition a eu lieu jusqu’au 25 mars 2017.