Jérémy Florès : “J’ai eu la hargne toute ma carrière pour arriver là où j’en suis”

Publié le par Naomi Clément,

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À la veille de sa participation au Quiksilver Pro, la neuvième étape du championnat du monde masculin de surf qui se tient cette semaine à Hossegor, l’athlète nous a accordé un moment pour revenir sur sa fascinante carrière, ses ambitieux derniers défis et la nouvelle vague de surfeurs français.

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Bien qu’il s’apprête à se frotter aux meilleurs surfeurs de sa génération, à l’instar de l’Australien Mick Fanning ou de l’Italien Leonardo Fioravanti, Jérémy Florès a l’air détendu, confiant. Et pour cause : ce sera sa onzième participation au très convoité championnat du monde de surf. Onze ans, donc, que ce jeune Réunionnais, dont le quotidien est rythmé par les incessantes compétitions de la World Surf League, impose la France comme l’un des pays les plus prospères en matière de surf.

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En 2006, à seulement 18 ans, Jérémy Florès intègre le “top 45”, l’élite internationale des surfeurs, devenant ainsi le plus jeune champion de surf de l’Histoire. Seul Français à avoir pris part au fameux Eddie Aikau d’Hawaii (un tournoi dont la particularité est qu’il ne peut être organisé que lorsque la hauteur moyenne des vagues atteint ou dépasse 12 mètres), il est également le seul à avoir remporté le Pipe Masters d’Hawaii (2010) et le Tahiti Pro de Teahupo’o (2015).

Après un passage à vide en 2014, retracé par ce mini-docu signé Desillusion Magazine, l’athlète, aujourd’hui âgé de 29 ans, semble être arrivé à un moment charnière de sa carrière. Certes, il n’est plus le surfeur intrépide d’il y a dix ans, qui a tout à prouver au monde ; mais il lui reste tout de même quelques défis à relever, dont celui, et pas des moindres, de remporter cette épreuve française du championnat du monde de surf, dans laquelle il n’a jusqu’ici jamais brillé. Rencontre.

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“L’un de mes derniers défis, c’est de pouvoir bien faire en France”

Dans quel état d’esprit es-tu, à la veille de cette neuvième et importante étape du championnat du monde de surf ?

Écoute, je suis dans un moment plutôt sympa ! Je viens de réaliser ma plus grosse performance de l’année, puisque j’ai terminé cinquième en Californie, dans une épreuve qui est très difficile, donc c’est bon pour la confiance. Actuellement, je suis 17e mondial. Disons que j’aimerais être plus haut dans le classement, mais que ça pourrait être pire. Après toutes ces années sur le circuit, les objectifs sont différents. Je pense que niveau résultats, je n’ai plus grand-chose à prouver, y compris à moi-même, car je me suis prouvé que j’étais capable de faire des choses que je n’aurais jamais cru pouvoir faire.

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Aujourd’hui, mon but, c’est vraiment d’essayer de montrer du beau surf, dans de belles vagues, que les gens prennent du plaisir à me regarder surfer, y compris en compétition. Si en plus de ça, je parviens à faire un beau résultat, alors tant mieux ! Mais le simple fait de pouvoir être à deux ou trois à l’eau, avec les meilleurs surfeurs au monde, dans de belles vagues (ce qui est de plus en plus compliqué étant donné que les spots sont de plus en plus surpeuplés), ce n’est que du plaisir.

À 29 ans, tu as décroché les titres dont tout surfeur rêverait (et comme tu le disais toi-même, que tu n’aurais jamais cru pouvoir décrocher il y a encore quelques années). Est-ce qu’il te reste encore des défis à relever en matière de surf ?

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L’un de mes derniers défis, c’est de pouvoir bien faire en France. Cela fait déjà onze ans que je participe au championnat du monde de surf, et c’est la seule épreuve dans laquelle je n’ai jamais atteint les quarts de finale. C’est très rageant et frustrant pour moi, car c’est l’épreuve que j’ai le plus envie de réussir parce que, pour une fois, tous les gens qui me soutiennent tout au long de l’année, via les réseaux sociaux ou autres, sont sur place et peuvent m’encourager en direct.

Et moi, du coup, je veux tellement bien faire, je veux tellement leur rendre tout ce qu’ils me donnent, que je me mets une pression de malade, et je finis par faire n’importe quoi… Donc je travaille là-dessus depuis quelques années, mentalement. J’essaie de gérer ça. C’est compliqué, mais j’ai encore une opportunité aujourd’hui, donc je vais tout donner et tenter de faire de mon mieux, comme à chaque fois.

“Pour le grand public, malheureusement, le surf est encore perçu comme un sport de loisir”

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Il y a quelques semaines est sorti Danser avec les vagues, un documentaire qui retrace ta carrière mouvementée. Comment est né ce projet ?

Le réalisateur Antoine Laguerre et le journaliste David Michel, avec lequel j’ai une certaine intimité, sont venus me voir pour savoir si j’étais intéressé à l’idée qu’ils réalisent un documentaire sur mon parcours. L’idée m’a plu, et je me suis mis à leur disposition pour raconter l’histoire de ma vie, de ma carrière… Danser avec les vagues revient sur mes débuts, sur mon rapport à la Réunion, là où j’ai grandi, et sur quelques-unes de mes victoires les plus importantes.

On y découvre des interviews qui ont été réalisées un peu partout dans le monde, à Hawaii, Tahiti, la Réunion et ici, en France métropolitaine, bien sûr. Il y a également des commentaires de sportifs légendaires comme Kelly Slater ou Bixente Lizarazu. Disons que ce film permet d’apprendre à me connaître davantage, mais surtout, et c’est ce qui me plaît le plus, il montre le caractère professionnel du surf.

Car pour le grand public, malheureusement, je crois que le surf est encore perçu comme un sport de loisir, un sport d’été, et les surfeurs comme de simples mecs aux cheveux longs, détendus… Alors que le surf, à un niveau professionnel, demande énormément d’entraînement et de sacrifices. C’est ce côté-là qu’il était important de raconter.

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En 2020, le surf deviendra une discipline officielle des Jeux olympiques. Cela va probablement aider pour la reconnaissance du surf auprès du grand public…

Oui, tout à fait. Cette annonce a été accueillie par des réactions très différentes dans le monde du surf. Mais à titre personnel, je trouve que c’est une grande reconnaissance pour notre sport, qui va permettre de faire découvrir cette discipline magique au monde entier. Je suis sportif de haut niveau, j’aime le sport – quel qu’il soit –, je regarde les Jeux olympiques depuis que je suis tout petit… Donc, le fait de pouvoir représenter son sport et son pays aux Jeux olympiques, je trouve que c’est une fierté immense.

Est-ce que cela veut dire qu’on aura l’occasion de te voir représenter les couleurs de la France en 2020 ?

C’est possible, il faut juste réussir à garder le rythme. Mais même si je n’y participe pas, j’ai envie de faire partie de l’encadrement, de pouvoir participer à cette aventure (qui va être historique) et d’apporter mon expérience et mon expertise à l’équipe de France.

“C’est important pour le surf français que les générations se succèdent et se maintiennent à un haut niveau”

L’arrivée du surf aux Jeux olympiques va constituer un défi nouveau pour la génération de surfeurs qui te succédera Qu’est-ce que ça te fait de voir arriver cette nouvelle vague de surfeurs ?

Je suis à 100 % derrière eux, et je me tiens toujours à leur disposition. Ça fait des années que je suis dans le milieu, et je pense qu’à l’époque où on est arrivés, moi et les surfeurs de la génération d’avant, on s’est battus pour ouvrir de nouvelles portes au surf français. On a réussi à remporter des victoires que personne n’avait jusque-là remportées.

Je pense qu’on a en quelque sorte ouvert la voie, et c’est important que la génération suivante suive nos pas. Ce serait dommage qu’il y ait un trou de génération après nous. C’est important pour le surf français que les générations se succèdent et se maintiennent à un haut niveau. Dès que je vois des jeunes Français cartonner, c’est une grande fierté pour moi.

Qui sont les jeunes Français que tu suis et encourages ?

Il y a une génération de tout petits, comme Noa Dupouy, Kauli Vaast ou Marco Mignot, qui ont un talent exceptionnel. La route est encore longue car ils sont tous très jeunes, mais ils sont très bien entourés et, surtout, ils ont le niveau technique pour aller loin.

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Sens-tu une différence entre toi, à tes débuts, et ces jeunes qui se lancent aujourd’hui ?

Je pense que la seule différence réside peut-être dans la motivation. En ce qui me concerne, avec ma famille, on vient de rien. Du coup, j’ai eu la hargne toute ma carrière pour arriver là où j’en suis, et pouvoir faire ce que personne n’avait fait avant moi en tant que Français. Je pense que beaucoup de surfeurs ont le talent, mais ils manqueront peut-être de cette hargne pour décrocher la première place du podium. Mais si tu es fort mentalement, alors tout est possible.

Neuvième étape du championnat du monde masculin de surf, le Quiksilver Pro France se tient jusqu’au 18 octobre à Hossegor. Plus d’informations sur le site de la World Surf League.