L’Australie, le laboratoire mondial de la lutte contre le tabac

Publié le par Thibault Prévost,

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Alors que le paquet neutre s’apprête à débarquer en France, l’Australie l’a déjà mis en place depuis quatre ans. Une mesure parmi d’autres dans un pays à la pointe de la lutte anti-tabac.

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À l’autre bout du monde, les fumeurs australiens doivent probablement se sentir de plus en plus mal à l’aise. Tandis que la France entame sa révolution du paquet de cigarettes neutre, la clope disparaît de plus en plus de la vie publique australienne, et les campagnes de sensibilisation aux dangers du tabac s’enchaînent les unes après les autres, accompagnées de mesures autrement plus radicales que celles mises en place dans l’Hexagone. Car l’Australie se rêve en pays sans tabac, ni plus ni moins.

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Avec sa volonté affichée d’éradiquer le tabagisme de son territoire, le pays fait donc office de laboratoire mondial en matière de politique anti-tabac. Le paquet neutre, par exemple, a été imposé aux Australiens en 2012. Et alors que l’Inpes, l’office de la santé publique française, table sur des résultats rapides, il est pourtant difficile d’évaluer l’efficacité de la neutralisation à l’aune de la seule expérience australienne. À l’inverse, les éléments disponibles pointent le manque d’efficacité intrinsèque de la mesure, qui ne permet pas de réduire significativement le nombre de fumeurs. Pourtant, seuls 3,4 % des jeunes Australiens clopent, soit beaucoup moins qu’en France. L’explication a été publié le 28 janvier dernier, sous la forme d’un bilan de la politique de santé australienne. La solution ? Imposer des paquets neutres… et les vendre à des prix outrageusement prohibitifs.

Attaquer le porte-monnaie

En Australie, détaille Le Monde, le paquet-baromètre de la grande marque de cigarettes dont il nous est absolument interdit de faire de la publicité s’achète autour de 17 euros. Et vous trouviez le paquet français hors de prix ? Et l’inflation est loin de s’arrêter : À partir de septembre 2017, le prix des paquets augmentera chaque année de 12,5 % pendant quatre ans. En 2020, un paquet de tiges coûtera environ 27 euros, soit le budget nourriture hebdomadaire d’un étudiant de premier cycle. On comprend mieux le désintérêt pour le produit.

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Autres mesures prises par le gouvernement australien : la restriction du nombre de cartouches disponibles dans les aéroports et du nombre de cartouches importables – il faudrait même désormais parler en cigarettes, puisque seules 25 d’entre elles peuvent franchir les douanes –, et l’intensification de la lutte contre le trafic de tiges de contrebande. Enfin, les cigarettes australiennes on depuis longtemps quitté leurs glorieux présentoirs muraux pour être dissimulées dans l’ombre de tiroirs barrés d’un sticker rappelant en lettres capitales le danger mortel que représente cette vilaine habitude.

La politique de l’à-coup est inefficace

Et si ces mesures peuvent nous sembler radicales, certaines voix au sein du gouvernement australien réclament encore plus de restriction. Au sein des États fédéraux, le Queensland (au nord-est) va encore plus loin. En février dernier, l’État s’est ainsi doté d’une loi interdisant de fumer aux arrêts de bus et de taxi, dans les rues piétonnes, près des restaurants et des écoles, etc., appliquée depuis avril. Le 16 mai dernier, le président du principal fonds local contre le cancer, Jeff Dunn, a proposé d’interdire purement et simplement la cigarette à toutes les personnes nées après 2001.

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En France, malgré l’instauration du paquet neutre, la stratégie est bien différente : comme le résumait Slate en février dernier, la troisième et dernière phase du Plan cancer, lancée cette année, prévoit 10 % de fumeurs en moins d’ici 2019, et entend qu’en 2024 “la France passe sous la barre des 20 % de fumeurs”. Problème : malgré les augmentations successives, la France compte toujours 30 % de fumeurs et le nombre est… en augmentation. Si le pays veut réellement endiguer l’épidémie, il devra nécessairement enterrer la politique de l’à-coup, passer outre le lobby des buralistes et frapper les fumeurs au porte-monnaie. Le design du paquet, si terne soit-il, n’y suffira pas.