Amélie Lallemand : rencontre entre le porno et la couture

Publié le par Théo Chapuis,

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C’est là-bas que je me suis ouverte à l’art contemporain et que j’ai mieux compris ses enjeux.

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La vie d’artiste, quoi

“Toute cette bidoche, ces sexes morts…”

Amélie a ensuite de plus en plus tourné ses créations vers le rapport au corps et à la sexualité. Récidiviste, elle avait créé une sculpture intitulée “Ma mère, ma soeur et moi”, représentant un pénis réalisé en chewing-gum mâché par… sa mère, sa soeur et elle-même. “Elles m’ont détesté pendant des jours et des jours”, avoue-t-elle.
Elle poursuit :

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La sexualité, c’est peut-être l’un des derniers trucs un peu marrants. ça a une place importante dans la société, comment on positionne notre corps par rapport à ça. Le fait qu’on soit des animaux, finalement.

J’aime bien tout ça : je tricote, je brode. Ma grand-mère était couturière, on faisait pas mal de travaux quand j’étais petite.

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Du coup, elle ne délègue rien : “J’ai pas du tout envie, c’est pas facile de lâcher du lest. Donc non ! C’est moi qui les fais tous à la main, même si ça prend beaucoup de temps”. Elle compte cinquante minutes à une heure pour la broderie, une demi-journée par t-shirt. Mais le plus dur n’est sans doute pas ce que vous croyez : dénicher les captures d’écran qui l’intéressent est un travail qui exige patience et maîtrise de soi : “Une fois que tu en as regardé dix d’affilée… pfiou. C’est toute cette bidoche, tous ces sexes morts… ça reste froid et malgré tout assez…”. Plutôt que d’achever sa phrase, elle frappe sa main dans sa paume. Le message est passé.

“Le porno influence la sexualité aujourd’hui”

L’idée part d’un travail pour son diplôme. Puis la rencontre entre le sexe et la broderie s’est développée parallèlement à sa propre façon de voir le porno. Elle fait d’abord imprimer ses oeuvres, avant de les broder à la main pour donner l’effet de ces “vieux napperons des grands-mères, tu vois”.
Amélie coud des cache-sexes d’un autre âge sur des images issues du monde post-Internet, jouant avec l’hypocrisie générale en matière de pornographie. Car selon elle, “Faut pas se leurrer : la plupart des gens matent du porno sur Internet  (…) et le porno influence beaucoup la sexualité aujourd’hui”. 

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On a un côté très puritain à expliquer le porno alors qu’on ferait mieux d’expliquer la sexualité et la pornographie.

À quel moment est-ce que tu fais subir de telles choses à ton corps contre de l’argent ?

Autant de filles que de garçons

Les 40-50 ans sont encore plus ouverts que les jeunes face à mes visuels. Ils ont l’air plus libres, surtout les femmes […]. Après, j’ai pas envie que les ados portent mes t-shirts juste pour faire dans la fausse rébellion.

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Ses clients les plus réguliers, ce sont plutôt des trentenaires et des quadras.

Le porno ? “On ne le regarde même plus”

À ce propos, Amélie Lallemand ressemble à beaucoup de monde : à une absence de réaction, elle préfère de loin un mauvais commentaire. Même si ce n’est pas ce qu’elle cherchait à provoquer au départ, elle se plaît à créer ce sentiment de gêne, surtout dans un milieu artistique parisien où “on regarde beaucoup les autres de haut”, comme le confie à demi-mot la rouquine qui n’a “pas envie de dire le mot “hipster”… mais bon”. C’est dit.
Peu importe, Amélie Lallemand trace sa route et s’amuse à jouer avec cette profusion d’images porno “qu’on ne regarde même plus”.

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Je ne me moque pas du porn, mais plutôt de l’hypocrisie qu’il y a autour.

Si je regarde du porno ? Pas trop. C’est une esthétique particulière, tout est plat. Ou alors je regarde des dessins animés japonais. Du hentai. Je me dis qu’il n’y a pas des “vrais gens”.