C’est une réglementation assez connue du fait de son unicité en Europe : il n’y a pas de vitesse maximale par défaut sur les routes allemandes. Selon l’Union de l’industrie automobile allemande (VDA), 70 % des 13 000 km d'”autobahn” ne sont pas réglementés sur leur vitesse.
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Si, pendant longtemps, cette réglementation flexible était synonyme de liberté pour beaucoup d’automobilistes (allemands ou frontaliers), la vitesse illimitée est un problème majeur outre-Rhin. Au-delà de l’aspect sécuritaire évident, l’Allemagne doit également faire face à ses propres paradoxes en ce qui concerne ses objectifs de transports décarbonés et de lutte contre le réchauffement climatique.
Un problème pour l’environnement flagrant
C’est un article publié dans la revue professionnelle Ecological Economics qui a étudié les possibles bénéfices à l’arrêt de la vitesse illimitée en Allemagne. L’exemple flagrant est qu’en imposant une vitesse maximale à 130 km/h comme en France, on estimerait les bénéfices de santé à 300 millions d’euros considérant les dommages actuels causés par les émissions de CO².
L’étude fait aussi une analyse coût-bénéfice global en prenant en compte tous les facteurs : consommation d’essence, besoin d’infrastructure, accidents de la route, pollution de l’air, etc. La note du bénéfice potentiel pour une simple limitation à 130 km/h monterait alors à un milliard d’euros.
En janvier dernier, une autre étude de l’Agence publique allemande pour l’Environnement (UBA) estimait qu’une limitation de la vitesse maximale à 120 km/h permettrait d’économiser 6,7 millions de tonnes de CO² par an. À noter qu’en 2022, les objectifs de réduction des émissions dans le secteur du transport allemand n’ont pas été atteints, avec 138,8 Mt de limite fixée contre 148 Mt dans les faits.
Un blocage politique
Selon le professeur Stefan Gössling, auteur du papier et professeur à l’Université de Linnaeus (Suède), il n’existe aucun “argument rationnel” qui justifie le maintien de la vitesse illimitée en Allemagne. Il cite ainsi divers sondages montrant qu’entre 55 et 63 % de la population allemande serait favorable à une limitation de vitesse.
Il résume ensuite la situation politique au magazine Carbon Brief :
“Nous nous trouvons malheureusement dans une situation où la décision est bloquée par un petit parti [le FDP, le parti libéral-démocrate, ndlr] pour des raisons d’intérêts personnels ou sous la pression d’organisations de lobbying.”
Du côté de l’opposition CDU (Union chrétienne-démocrate), ce n’est pas mieux puisqu’elle y est également opposée. Aux élections de 2021, les deux partis principaux avaient ainsi fixé dans leurs programmes électoraux le rejet de tout projet de limitations de vitesse sur les autoroutes allemandes.