Le fondateur de Wikipédia lance Wikitribune, un média en ligne pour lutter contre les fake news

Le fondateur de Wikipédia lance Wikitribune, un média en ligne pour lutter contre les fake news

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Par Thibault Prévost

Publié le

Géré par des journalistes et des internautes, le média en ligne lancé par Jimmy Wales est financé par la communauté et entend combattre la désinformation.

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Lorsque, comme Jimmy Wales, on a cofondé l’encyclopédie participative en ligne Wikipédia, on peut aisément être reconnu comme un vétéran du front contre la désinformation et la propagande en ligne. Fort de son expérience dans la lutte contre les fausses informations, Jimmy Wales vient de lancer une campagne de financement participatif pour la création de Wikitribune, une publication en ligne mêlant journalistes et internautes. L’objectif : produire une information quotidienne de qualité, entièrement dévouée aux faits.

“Nous voulons transposer à l’information cette mentalité hérité de Wikipédia, basée sur la vérification des faits”, explique Jimmy Wales à Wired. L’interface permettra aux lecteurs d’identifier clairement les sources d’information utilisées dans les articles et les journalistes partageront leur matière première – des transcriptions d’interviews, fichiers audio ou documents – avec la communauté, dans un souci de transparence. Comme sur Wikipédia, chaque contributeur pourra soumettre une proposition de modification de l’article mais contrairement à l’encyclopédie en ligne, la décision finale restera entre les mains des journalistes ou de certains “membres approuvés” par le staff.

Sans pub, sans paywall

Outre la reprise d’informations venues d’autres sources médiatiques,Wikitribune ambitionne de produire ses propres reportages et enquêtes… si la campagne de financement s’avère être un succès. Comme tous les médias en ligne créés ex nihilo, Wikitribune va devoir trouver de l’argent pour payer les dix journalistes qu’il compte embaucher – contrairement à ce qu’il y paraît, l’information n’est pas produite gratuitement –, tandis que les contributeurs qui viendront filer un coup de main pour la vérification des sources ne seront, semble-t-il, pas rémunérés.

Inspiré par les nouveaux modèles de la presse en ligne basés sur la souscription, dont celui du New York Times, le site sera libre de toute publicité et ne mettra pas en place de paywall pour restreindre la consultation d’articles, ce qui limitera les revenus à une souscription mensuelle proposée aux lecteurs. En échange, les souscripteurs pourront influer sur les décisions éditoriales du site, comme le choix des nouvelles à traiter. Anticipant les critiques, Jimmy Wales assure que ce fonctionnement n’affectera pas la neutralité du site, tous les articles étant soumis au même processus de fact-checking participatif.

Un projet difficile, mais pas impossible

Si la croisade entamée par Wales est d’une noblesse certaine, Wikitribune a encore beaucoup de boulot devant lui. Si la campagne de financement en ligne est fructueuse, que le site se lance et qu’il parvient à faire tourner son modèle hybride, il deviendra sans doute une plateforme d’informations respectée… par ceux qui la liront, c’est à dire probablement peu de gens.

Interrogé par la BBC, Joshua Benton, responsable de l’institut d’analyse des médias de Harvard (le Nieman Journalism Lab), s’est félicité de l’initiative… en émettant toutefois des réserves quant à sa capacité à exister dans le paysage médiatique en ligne : “Un modèle d’information sans profit peut certainement fonctionner à une échelle relativement réduite et produire quelque chose de suffisamment original. Mais j’ai du mal à l’imaginer changer d’échelle pour devenir une entreprise de presse énorme.” Difficile, donc, mais pas impossible… Après tout, Jimmy Wales a quand même fondé la plus grande encyclopédie de la planète à partir de rien, si ce n’est la capacité de fédérer une communauté. Cette fois-ci, son ambition affichée en grosses lettres sur son site – “l’information est cassée et nous allons la réparer” – est à peine moins démesurée. Bonne chance.