Vidéo : pourquoi demande-t-on toujours aux femmes de sourire ?

Vidéo : pourquoi demande-t-on toujours aux femmes de sourire ?

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Par Mélissa Perraudeau

Publié le

Dans une vidéo efficace, Franceinfo met le doigt sur une manifestation du sexisme pas si anodine : l’injonction à sourire.

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“Un sourire, mademoiselle/madame !” Voilà une demande qu’entendent beaucoup de femmes, jeunes comme plus âgées. Franceinfo s’est intéressé à cette injonction au sourire dans une vidéo publiée le 21 juin sur Facebook. Le média a ainsi interviewé Brigitte Laloupe, qui depuis 2008 écrit le blog Olympe et le plafond de verre, récompensé plusieurs fois pour sa dénonciation du sexisme et sa lutte pour l’égalité entre les genres. Elle a également publié le livre Les Mécanismes psychosociaux du plafond de verre et s’attache à analyser la façon dont le sexisme est ancré dans notre société.
Elle explique dans cette vidéo que l’“on attend d’une femme qu’elle soit jolie, qu’elle mette de la bonne humeur et de la douceur dans la vie, et qu’elle soit séduisante”. Qu’elle se comporte en objet décoratif en somme, et qu’elle montre une certaine soumission. L’auteure explique en effet que le sourire montre chez les grands primates qu’ils ne sont pas dangereux, et donc que “les femmes doivent prouver en permanence qu’elles ne sont pas dangereuses”.

Quand les femmes doivent “faire joli”

Cette pression s’exprime dans la rue comme au travail, et dans tous les domaines, y compris en politique. En 2012, on reprochait par exemple à Martine Aubry de ne pas sourire en parlant budget. C’est aussi le cas dans le sport de haut niveau : lors d’une conférence de presse en 2015, un journaliste avait ainsi demandé à Serena Williams, après avoir gagné un match contre sa sœur, pourquoi elle ne souriait pas. La championne lui avait répondu qu’elle n’avait pas envie d’être là, qu’il était 23 h 30, qu’elle devait se lever tôt pour s’entraîner, et qu’elle ne voulait pas répondre aux questions des journalistes, qui étaient toutes les mêmes. Lisa Beaujour, la journaliste de Franceinfo, souligne qu’un joueur masculin comme Rafael Nadal ou Novak Djokovic n’aurait très probablement pas eu cette question.
Cette injonction au sourire est une manifestation du sexisme ancré dans la société, qui a souvent été soulignée dans des écrits féministes. Dans un article intitulé La Police du sourire, publié sur GQ fin mai, Maïa Mazaurette soulignait d’ailleurs son double standard. Elle y expliquait que les femmes doivent “faire joli”, mais avec mesure et discrétion :

“Elles doivent être contentes de servir un café et de faire joli – sauf pendant les défilés de mode ou les shootings photo, où elles sont priées de faire la gueule parce qu’être belle et heureuse serait une agression –, au contraire, plus une femme est laide, ou grosse, plus elle est priée de compenser par la bonne humeur. C’est-à-dire que le physique doit être inversement proportionnel à l’émotionnel, afin qu’aucune tête ne dépasse. Quant au sourire ironique, supérieur, satisfait, confiant, triomphal… il peut rejoindre les rangs de l’arrogance mal placée (toujours mal placée).”

La journaliste Nadia Daam y a également consacré un article sur Slate, qu’elle concluait en insistant sur le fait que demander à une femme de sourire “n’a strictement rien d’anodin”. Parce qu’elle est libre de faire ce qu’elle veut, et qu’elle n’est pas là “pour égayer le quotidien de qui que ce soit”.