“On reste parce qu’on a envie d’y croire” : le témoignage de Carole, victime de violences conjugales

“On reste parce qu’on a envie d’y croire” : le témoignage de Carole, victime de violences conjugales

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Par Mélissa Perraudeau

Publié le

Pour sa nouvelle vidéo, la série I Am s’est intéressée à Carole, victime de violences conjugales pendant six ans. Elle raconte la souffrance, puis la résilience.

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Il y a quelques semaines, on vous parlait d’une vidéo d’Axel Santoni, un journaliste parisien de 25 ans qui travaille seul sur une série intitulée I Am. Son objectif est de “parler de sujets souvent complexes à aborder : le banditisme, la vie dans la rue, l’obésité, le sida” d’une façon claire et abordable pour tout le monde. Dans le but de faire entendre “celles et ceux que l’on entend peu ou que l’on écoute mal”, il souhaite réaliser 12 portraits. Après avoir filmé Emeric Berco, un animateur radio de Skyrock, Elina Dumont, une ancienne sans-abri devenue comédienne, puis Jérémy, qui a découvert sa séropositivité à 23 ans, il a publié ce 27 septembre le témoignage de Carole.

“On reste parce qu’on a envie d’y croire”

Carole est une ancienne victime de violences conjugales. Sa relation violente a duré six ans. Cette écrivaine de 40 ans explique qu’il y a d’abord eu un an et demi de violences psychologiques, avant, qu’un soir, la violence physique ne commence. Carole raconte la spirale infernale, caractéristique des violences conjugales : un enchaînement de crises de violence, puis des remords du conjoint violent, qui fait tout pour se pardonner… avant de recommencer. Et comment cette spirale emprisonne :

“On reste parce qu’on a envie d’y croire, parce qu’on s’imagine que l’autre va changer, puisque l’autre promet qu’il va changer.”

Carole raconte en avoir parlé une fois à un ami, qui ne l’a pas crue parce qu’il n’avait pas vu de “signes”. Comme le compagnon de Carole n’avait pas l’air violent, cela était impossible pour lui. Celle-ci insiste précisément sur le fait que les violences conjugales se produisent pourtant bien dans tous les milieux, que ces hommes violents sont partout et que leur comportement n’est donc pas marqué sur leur front. “Il n’y a pas de profil type, […] ça touche toutes les femmes”, remarque-t-elle.

Carole finira par décider de quitter son conjoint abusif, après qu’il a menacé de tuer son enfant. Elle a voulu que son histoire serve à quelqu’un, en la racontant dans un livre. Aujourd’hui, elle se déclare “guérie”, sortie de l’emprise, et a pu se reconstruire, notamment grâce à son nouveau compagnon.

Libérer la parole sur les violences conjugales

Ce nouvel épisode d’I Am est de nouveau empreint de sensibilité et de force, et transmet une parole essentielle que l’on ne saurait suffisamment diffuser. Début septembre, le bilan du ministère de l’Intérieur concernant les meurtres conjugaux commis en 2016 rapportait que 123 femmes avaient été assassinées (par leur mari, leur copain, leur amant…). Ce qui fait une moyenne d’une femme tuée tous les trois jours.

Pourtant, les titres de presse rapportent généralement ces crimes avec des euphémismes, voire des justifications, montrant à quel point le caractère sociétal et systémique des violences conjugales reste à intégrer pour beaucoup. Axel Santoni nous a expliqué avoir lui-même eu un temps “une vision faussée” de ces violences, et avoir compris en s’intéressant “de plus près” aux victimes que “que cela touchait toutes les couches de la société et qu’il était d’autant plus important d’en parler, pour sortir des clichés”.

Il a décidé de filmer Carole après avoir lu son livre autobiographique, Si seule… ment : Violence conjugale, ma secte (éditions Kawa). “Une belle preuve de résilience” selon lui, puisqu’elle y fait preuve de beaucoup de recul. Avec cette vidéo, Axel espère pouvoir aider d’autres victimes de violences conjugales :

“C’est sûrement utopiste, mais si une personne voit le témoignage de Carole, et arrive à se rendre compte que sa situation de couple n’est pas normale, ou tout simplement à en parler autour d’elle, je me dis que tout cela n’aura pas servi à rien.”

Pour le réalisateur, pallier l’invisibilisation des victimes de violences conjugales est ainsi la première étape du combat.

“Il y a une vraie forme de honte vis-à-vis de la famille, des proches. Même le système judiciaire français peine à prouver les faits. Il y a encore une forme d’omerta sur ces violences faites aux femmes, et les victimes n’osent pas parler. Je crois que sensibiliser les gens en libérant la parole comme le fait Carole est une première étape.”

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