Téléchargement, streaming : 1 Français sur 6 est un pirate

Téléchargement, streaming : 1 Français sur 6 est un pirate

photo de profil

Par Théo Chapuis

Publié le

Selon une étude de Médiamétrie, le nombre d’internautes concernés par le téléchargement et le streaming illégaux a considérablement augmenté depuis 2009.
La France compterait 13,2 millions de pirates. Selon une étude publiée mercredi 2 juillet par l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA) et réalisée par Médiamétrie en partenariat avec le Centre national du cinéma et l’institut TMG, 28,7% des internautes de l’Hexagone ont consulté au moins une fois un site de piratage de films ou de séries en 2013. Stupeur : cette proportion n’a jamais été aussi élevée depuis 2009. En 2011-2012, la même instance dénombrait 12,4 millions d’accoutumés au téléchargement illégal.
Une remarque : si le nombre de flibustiers des contenus audiovisuels n’est pas prêt de baisser, leurs pratiques sont en constante évolution. Nouvelle star du piratage : le streaming. En 2009, ce mode de visionnage ne concernait que 16% du piratage global. Désormais, avec la démocratisation des flux internet haut débit, ce taux a bondi à 38% en 2013, avec 10 à 35 millions de vidéos vues illégalement par mois.
Toujours selon l’étude, le streaming serait préféré au téléchargement dans le cas des séries. Face au streaming, le P2P représente 29% du pillage et le DDL, qui permet de télécharger directement depuis un serveur, 33%. Ces deux techniques de piratage, elles, seraient privilégiées pour les films.

À voir aussi sur Konbini

Qui sont les pirates

Soucieuse de cibler l’ennemi, l’Alpa a établi un profil-type du pirate de contenus sur Internet. Selon l’association, ceux qui ont recours au téléchargement sont à 58% des hommes, un peu plus jeunes que la moyenne des internautes. À contrario, 55% des adeptes du streaming sont en majorité des femmes.
Eux sont largement plus jeunes (près d’un tiers des utilisateurs ont entre 15 et 24 ans), et 17% sont étudiants, soit deux fois plus que leur part dans l’ensemble des internautes.
Le profilage révèle également que les plus de 50 ans, qui représentent 34% des internautes français, ne sont pas de grands criminels : ils ne constituent que 15 à 21 % des visiteurs de sites pirates.
Cette étude porte sur 281 sites dédiés au piratage audiovisuel, hors téléphones mobiles et tablettes.

Hadopi, où es-tu ?

L’étude glisse qu’en 2011, le nombre de mises à disposition des 10 films les plus populaires sur les réseaux P2P avait été divisé par trois. Et fait le lien direct avec la politique de l’Hadopi, à l’époque, qui lançait alors ses actions de “riposte graduée” avec plus de zèleDepuis, le nombre de fichiers mis à disposition illégalement en P2P se stabilise entre 1,2 et 2 millions.
Conséquence de la publication de cette étude, selon Le Monde, la ministre de la culture, Aurélie Filippetti, est intervenue pour insister mercredi soir sur la nécessité de lutter contre le “piratage commercial”. Soit les sites qui gagnent de l’argent grâce à la diffusion pirate de productions culturelles. Elle a aussi évoqué “la pertinence des outils existants de pédagogie contre les pratiques illicites”.  Hadopi, dont le sort est en flottement depuis des mois, n’a pas été citée la moindre fois par la ministre.

Le piratage est-il si néfaste que ça ?

Rien n’est moins sûr. Car cette nouvelle étude n’est pas sans nous en rappeler une autre, qui date de mars 2013. Même si elle ne s’attardait pas spécifiquement sur le piratage de contenu vidéo, celle-ci en arrivait à l’édifiante conclusion que le piratage est une bonne chose pour l’industrie musicale. Luis Aguiar et Bertin Martens, auteurs de ce rapport soutenu et financé par la Commission européenne et réalisé pour l’Institut pour les Études Prospectives Technologiques, commentaient :

La majorité de ce qui est consommé illégalement ne serait pas acheté si l’offre pirate n’existait pas. (…) Nos conclusions suggèrent que le piratage de musique numérique ne doit pas être considéré comme un problème préoccupant par les détenteurs des droits d’auteur.

Le Syndicat National de l’Édition Phonographique (SNEP), qui vient tout juste de rendre son rapport 2014 sur l’économie de la production musicale, dénonçait alors une étude “biaisée et déconnectée du principe de réalité”. Comme 13,2 millions de Français en 2013, donc. Quoi qu’il en soit, le lobby des labels évoque dès l’édito de son rapport annuel le streaming comme “segment le plus dynamique du marché (…) plébiscité par le public.” Et d’ajouter :

Pour la première fois, les revenus du streaming représentent dans notre pays plus de la moitié des revenus en ligne, tandis que deux millions de Français ont d’ores et déjà été séduits par les formules d’abonnement proposées par les plateformes en ligne.

Légal ou illégal, pour les internautes français, le streaming fait désormais partie de la famille.