Sweetie, dix ans, la petite fille virtuelle qui vient de condamner un pédophile

Sweetie, dix ans, la petite fille virtuelle qui vient de condamner un pédophile

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Par Louis Lepron

Publié le

Sweetie est une petite fille virtuelle imaginée par une ONG. Elle vient de condamner un pédophile australien.
Novembre 2013 : le monde découvre “Sweetie”. Sweetie ? Une jeune fille de dix ans, originaire des Philippines, mais virtuelle. Elle a été façonnée par une ONG, Terre des hommes, qui lutte contre la pédopornographie. Sa branche néérlandaise avait annoncé à l’époque avoir repéré près de 20.000 prédateurs sexuels venant de 71 pays grâce à l’appat numérique. 
Et un an plus tard, on apprend qu’un Australien de 38 ans a été condamné à deux ans de prison. Il est accusé d’avoir utilisé un fournisseur de services afin de communiquer avec un mineur et de posséder du matériel pédophile. Il fait partie des 1000 pédophiles identifiés par l’ONG dont l’identité avait été confiée auprès d’autorités.

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Une identification progressive

1.000 d’entre eux avaient pu être identifiés à l’époque et retrouvés par Interpol, l’organisation de coopération internationale de la police. Le directeur de la branche néerlandaise de l’organisation, Albert Jaap Van Santbrink expliquait :

Il y avait de tout, des hommes de 30 ans, 35 ans, 45 ans, 50 ans, des pères de famille, un musicien, un architecte, etc.

Finalement, au lieu d’être une bonne nouvelle, le fait que ces hommes aient été faciles à retrouver n’en est que plus inquiétant. Facile de collecter leurs coordonnées une fois tombés dans les griffes virtuelles de Sweetie. Adresse, numéro de téléphone, photo, coordonnées bancaires… la pédophilie en ligne se pratique bel et bien, et à visage découvert.
En fait, la technique de Terre des Hommes a tellement bien fonctionné qu’elle a transmis sa méthode de pêche au pédophile aux autorités de différents pays. L’ONG précise avoir utilisé les mêmes procédures que celles employées par les forces de police afin de récolter des preuves.
L’organisation déclarait alors : “Nous ne sommes ni des procureurs, ni des juges, ce sera à eux de décider quoi faire avec les éléments que nous avons transmis”. Pourtant, si à elle seule elle a réussi à débusquer 1.000 de ces prédateurs sexuels par webcam, elle expliquait qu’avec plus de ressources, elle aurait “facilement pu en identifier 10.000″.

Un sujet encore “tabou” en France

Pour éviter d’être accusée de pousse-au-vice et couper court à tout début de polémique, l’organisation Terre des Hommes assure être restée dans une attitude passive : elle certifie s’être laissée contacter et avoir attendu les propositions spontanées des prédateurs potentiels.
La manoeuvre se terminait lorsqu’un internaute un peu avenant en arrivait à proposer à la fillette de l’argent contre des services sexuels. Hans Guyt, le responsable de l’enquête, déclare :

Se mettre dans la peau d’une fillette philippine de dix ans et voir ce que certains hommes veulent de vous a été une expérience choquante pour elles [les personnes constituant l’équipe,ndr] (…) Il y avait des demandes et des gestes vraiment obscènes.

À l’aide d’une enquête qui aura duré dix semaines et qui a porté ses fruits via une première condamnation, l’ONG Terre des hommes vient de réussir son pari : sensibiliser l’opinion publique quant au phénomène de la prostitution infantile, un sujet récemment abordé par l’association française ACPE via une campagne choc.
Car en France, le sujet est tabou, selon Armelle Le Bigot Macaux, présidente de l’association :

Le sujet est tellement tabou, que l’on manque de chiffres précis. Mais de source officieuse, grâce aux retours des associations de terrain, on sait qu’entre 5 000 et 8 000 mineurs se prostituent aujourd’hui en France. Et le phénomène a tendance à s’amplifier.