Perceptual Ad Blocker : et si le bloqueur de publicité “imbattable” était né ?

Perceptual Ad Blocker : et si le bloqueur de publicité “imbattable” était né ?

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Par Thibault Prévost

Publié le

Un nouveau bloqueur de publicité, qui identifie les pubs à la manière d’un humain, vient de débarquer sur Chrome. Et ça fonctionne… pour le moment.

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Lorsqu’il s’agit de publicité, Internet est un champ de bataille perpétuel, une sorte d’arène romaine où développeurs de sites Web et concepteurs d’applications de blocage mènent une lutte à mort à coups de protocoles et de techniques d’évitement, en se rendant coup pour coup. En août dernier, le plus célèbre des logiciels antipub open source, AdBlock Plus (ABP), remportait une  victoire symbolique en parvenant à s’inviter dans le bastion Facebook, pourtant réputé imprenable, moins de trois jours après la mise à jour du système d’affichage des publicités sur le site. En septembre, cependant, Facebook reprenait l’avantage, obligeant même le fondateur d’ABP à reconnaître la défaite de sa communauté face aux légions de développeurs surentraînés du géant américain. Mais avec Perceptual Ad Blocker, repéré par Engadget, l’espoir d’un Internet dépourvu d’hideuses publicités renaît.

Selon le site, l’innovation derrière ce nouveau bloqueur de pubs, disponible en add-on pour Chrome, le rendrait même “potentiellement imbattable”. Développé par des chercheurs des universités Princeton et Stanford, l’outil, baptisé Perceptual Ad Blocker, se distingue par une approche inédite de l’identification des publicités : contrairement à ses concurrents, le logiciel “reconnaît” une pub à la manière d’un être humain, en analysant son contenu : la taille du post, les icônes et logos éventuels et des mots-clés comme “contenu sponsorisé”.

Plutôt que de les supprimer (et d’être ainsi emporté dans la baston judiciaire que connaissent AdBlock et les autres bloqueurs, régulièrement traduits en justice), le programme place un simple voile sur la publicité supposée, placardant la zone d’une mention “THIS IS AN AD”, que l’utilisateur peut à tout moment faire sauter si jamais l’application a fait un peu trop de zèle. À la date de notre test, le 17 avril, les publicités étaient parfaitement bloquées sur Facebook, malgré tout le mal que se donne le réseau social pour brouiller les lignes entre contenu publicitaire et informations.

Une publicité sera toujours identifiable

À défaut de fonctionner éternellement, la technologie derrière Perceptual Ad Blocker risque néanmoins de faire florès chez les croisés de l’antipub. Car jusqu’à aujourd’hui, la majorité des bloqueurs fonctionnent en scannant le code HTML des pages Web pour identifier les marqueurs, ou tags, qui révèlent les espaces publicitaires. Une technique efficace… jusqu’à ce que les fournisseurs d’espaces, Facebook en tête, décident de travestir les publicités en posts traditionnels – ce qui fait que, depuis novembre 2016, vous trouvez régulièrement des annonces pour des biens et services en scrollant innocemment votre flux d’actualités. Une manœuvre destinée à rendre inefficaces les bloqueurs de pub, dont la sournoiserie n’a d’égal que l’efficacité.

Si Arvind Narayanan, l’un des créateurs du bloqueur, se défend d’avoir inventé “un logiciel invincible”, il met le doigt sur “une combinaison évolutive de facteurs techniques et légaux qui déterminera le résultat final de la course aux armements” entre publicitaires et antipub. Plus précisément, la loi (en France, celle du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, rappelle Next Inpact) oblige les plateformes à rendre les contenus sponsorisés et publicités parfaitement identifiables, ainsi que leur annonceur. “En tout état de cause, précise le texte, un message publicitaire ne saurait induire le public en erreur sur l’identité de son émetteur et sa qualité.” Si, comme le rappelle Next Inpact, personne ne fait réellement respecter la loi, cela signifie néanmoins qu’une publicité intégrée à une page possédera toujours un élément identifiable – un logo, une mention ou des mots-clés spécifiques – sur lequel des programmes comme Perceptual Ad Blocker pourront s’appuyer. S’il est implémenté dans un bloqueur de publicité de l’envergure d’AdBlock, le système a donc de bonnes chances de faire suer les concepteurs d’espaces publicitaires comme Facebook… jusqu’à ce qu’ils trouvent une nouvelle façon de faire de la publicité sans en avoir l’air. L’armistice n’est pas près d’être signé.