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Le mec le plus cool de Berlin a 67 ans et une longue barbe blanche

Le mec le plus cool de Berlin a 67 ans et une longue barbe blanche

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Par Vincent Glad

Publié le

Un passage dans la queue, pour discuter avec les potes

Komet, et son mojo coupe-file, ne fait bien sûr jamais la queue. Y compris au Berghain. Mais il a su rester simple et s’offre à l’occasion un petit bain de foule, avec les centaines de jeunes qui attendent dans le froid : Je n’ai pas besoin de faire la queue mais j’aime y aller parfois pour dire bonjour aux copains, discuter un peu avec les gens”, nous explique t-il.
La légende veut que sa venue soit la garantie d’être à la meilleure soirée ce jour-là à Berlin. Un coup d’oeil sur l’agenda prévisionnel de Komet permet de nuancer l’adage : le vieux clubber enchaîne une dizaine de fêtes par week-end, essayant d’honorer au maximum à la masse d’invitations qu’il reçoit.

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Regarde ça, c’est des tickets de boisson du Ritter Butzke, mais je n’arrive même pas à boire tout ce qu’on me donne !

Restos du coeur et soirées en club

Komet dit vivre sans argent. Il pointe au Tafel, les Restos du cœur allemand, la semaine et se nourrit de plaisirs nocturnes le week-end. Son métier, comme en témoigne son incroyable appartement, une labyrinthique menuiserie qui s’étend jusque dans la cuisine, est de réaliser des cadres de tableaux. Il y en a partout aux murs, vides, sans tableaux. Le vieil homme les réalise pour la beauté du geste, sans vraiment chercher à les vendre. Il semble, de toute façon, avoir lâché l’affaire, absorbé par sa nouvelle vie d’égérie berlinoise.
Une vie absurde succédant à une autre. Komet est partout. Acid Pauli (de The Notwist) a composé un remix en son honneur, pour lequel il joue dans le clip. Il est mannequin pour la marque Muschi Kreuzberg. Il apparaît dans une vidéo de campagne de Die Linke, la gauche radicale allemande. Il est même la vedette d’un clip de promotion pour les JO de Berlin. Le sourire du vieillard magnifique n’aura pas suffi pour convaincre les Berlinois que la ville avait vraiment envie des Jeux (“Wir wollen die Spiele”).
Face au manque d’enthousiasme des habitants de la capitale, l’Allemagne a préféré Hambourg pour candidater aux JO 2024.

Il fallait oser filmer un druide noctambule en train de boire une potion magique pour faire la promotion des JO. Les Jeux auraient-ils vraiment pu être “propres” dans la capitale allemande ? Comme dans le sport, en club à Berlin, il y a toujours un doute. Les pas de danse de Komet, ceux d’un gamin de 12 ans à qui on donnerait une pilule d’ecstasy, l’envoient direct au test anti-dopage.

Le “camion de la drogue”

Les yeux dans les yeux, on lui a posé la question. «Jamais de drogues?». Le démenti est brumeux. «Non, jamais. Je sais qu’il y en a de bonnes, mais je sais que les drogues sont un mensonge». Meilleure preuve qu’il est clean ? «C’est moi qui conduit “le camion de la drogue” du Fusion Festival [une sorte de Burning Man allemand, ndlr] parce que tout le monde sait que je n’en prends pas, nous explique t-il. Je n’ai jamais de problèmes avec la police. Je leur fais juste coucou et c’est bon». Réglo. Le Willy Voet de Berlin.
Komet avoue tout juste une addiction au prosecco. Et aux câlins: «les gens en club me transfèrent leur énergie, quand ils me prennent dans leurs bras, quand ils me touchent ou quand ils me caressent le crâne. Mais il n’y a pas que des câlins. Il y a aussi des bisous et aussi parfois plus qu’un simple bisou.»

“C’est parce que vous êtes jeunes et beaux que vous galérez !”

Être une star de la vie nocturne, même à 67 ans, est visiblement l’assurance de pécho. Une leçon de vie: “Moi ce que je dis aux jeunes, c’est que s’ils veulent que ça marche avec les filles, ils doivent faire comme moi : devenir vieux, ne plus avoir beaucoup de dents, ne pas vouloir se marier et c’est tout. Ensuite ça cartonne avec les filles ! Haha ! C’est parce que vous êtes jeunes et beaux que vous galérez ! Haha !”.

En pleine remise en cause personnelle, on commence à fixer des photos de filles nues sur le mur de son salon. “C’est toujours la même fille”, assure Komet ! “On s’est rencontré il y a 10 ans, elle avait 23 ans. Nous ne sommes pas vraiment ensemble mais c’est la seule femme qui a un double des clés de mon appart”.
Dans une autre vie, Komet a eu deux enfants. L’un des deux est mort d’un cancer à 22 ans. Sa vie actuelle est comme un hommage à ce fils disparu:

Je considère que j’ai trois fois 22 ans. Ou deux fois 33 ans et je n’ai pas l’impression d’avoir 66 ans, mais j’ai cet âge.

Le “grand looping”

À près de 70 ans, Bernhard envisage sereinement sa dernière danse. “Si je ne tiens plus debout, je serai peut-être porté en brancard et je danserai allongé. Je verrai les lumières du club mieux comme ça. Et si je ne me sens vraiment pas bien, je ferai le grand looping”.
Le grand looping ? “Tu sais pour faire un looping, comme sur un grand huit, il faut prendre beaucoup de vitesse. C’est pour ça que je vis ma vie à toute vitesse aujourd’hui, car si la mort, comme la nomment les hommes, devait arriver, je serai prêt”. Une entrée directe sur la fiche “yolo” de citations.com.
Pour en savoir plus sur Komet, on ne saurait trop recommander ce documentaire de Freshmilk TV sous-titré en anglais.

Photos et interview réalisées avec Jacques Pezet