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Au Malawi, des fillettes sont envoyées dans des camps d'”initiation sexuelle”

Au Malawi, des fillettes sont envoyées dans des camps d'”initiation sexuelle”

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Par Mélissa Perraudeau

Publié le

Dans une série de reportages, Le Monde s’intéresse à une tradition d’“initiation” et de “purification sexuelle” des filles et des femmes dans l’extrême sud du Malawi. Des fillettes à peine pubères sont notamment violées sans protection par des hommes payés par leur famille.

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Dans une série de cinq reportages intitulée “Les hyènes du Malawi ou le terrible ‘apprentissage’ du sexe”, Le Monde met en lumière une tradition d’“initiation sexuelle” et de “purification sexuelle” des filles et des femmes dans certains pays d’Afrique de l’Est − qui l’abrogent néanmoins peu à peu, au contraire du Malawi, où elle se perpétue dans l’extrême sud.

Un camp pour que l’on fasse d’elles des “femmes”

Cela concerne les filles qui ont leurs premières menstruations ainsi que les femmes qui perdent leur conjoint ou construisent une nouvelle maison : les familles font alors appel à “à une ‘hyène’, un fisi en langue chichewa, pour ‘purifier’ le corps de leur fille ou de la femme par une relation sexuelle non consentie ni protégée”. Ces hommes sont payés par les familles, et sont souvent eux-mêmes des pères. Le Monde s’est d’abord intéressé à cette tradition, appelée “kusasa fumbi”, dans le premier volet de sa série, publié ce 23 juillet. Dans la majorité des zones rurales du Malawi, elles doivent se rendre dans un camp bien particulier dès leurs premières menstruations.

Ce sont leurs parents qui les y inscrivent, pour que l’on fasse d’elles des “femmes”. La loi des ancêtres promet à celles qui ne seraient pas passées par ce rite “maladies de peau et malheurs familiaux”, une tradition forte qui “prend le dessus sur le consentement individuel, les règles d’hygiène élémentaires et la planification familiale” selon Le Monde. Le journal a interviewé des fillettes ayant fait les frais de cette tradition, une mère, une organisatrice d’un camp, et Joyce Mkandawire, de l’ONG Let’s Girls Lead. Toutes s’accordent sur le principe des rituels, que la jeune Awa Kandaya a compris rapidement après son arrivée au camp à l’âge de 9 ans :

“On part à l’écart du village, dans un bâtiment loin des hommes où nous sommes seules avec les organisatrices du camp. […] Une fois que les premiers rituels commencent, on comprend qu’on est là pour apprendre à plaire à un homme, comment lui faire plaisir sexuellement.”

Un “véritable outil d’asservissement aux hommes”

On leur fait simuler des actes sexuels, on leur apprend à exciter les hommes, à faire une fellation à l’aide d’un bout de bois… Un “véritable outil d’asservissement aux hommes”, souligne le journal, à qui la mère d’Awa a déclaré avoir envoyé sa fille là-bas “pour la tradition et pour lui apprendre les bonnes manières”. Pour la jeune femme aujourd’hui âgée de 20 ans, le camp a été accompagné du “kusasa fumbi”, pourtant interdit au Malawi depuis 2013. Un homme l’a ainsi violée sans protection. L’organisatrice du camp nie, la famille n’en parle pas, mais l’ONG Let’s Girls Lead tire la sonnette d’alarme :

“Ces camps sont un lavage de cerveau de ces filles qui deviennent femmes trop vite. […] Et après le camp, beaucoup de filles se marient et quittent l’école.”

Une fille sur deux est ainsi mariée avant ses 18 ans au Malawi, et la tradition du kusasa fumbi ne s’arrête pas après le mariage. Le deuxième épisode de la série du Monde publié ce 25 juillet, “Dans le district de Nsanje, le viol des femmes est consacré par la tradition”, explore la “purification sexuelle” imposée à des femmes violées après le décès d’un conjoint ou d’un enfant, ou un avortement. Et on vous le recommande tout autant.