En réponse à Trump, les créateurs immigrés ont été mis à l’honneur lors des Oscars de la mode

En réponse à Trump, les créateurs immigrés ont été mis à l’honneur lors des Oscars de la mode

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Par Manon Baeza

Publié le

En récompensant des créateurs immigrés lors de leur dernière cérémonie, les Oscars de la mode américaine ont répondu à la politique de Donald Trump.

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Chaque année depuis 1981, les CFDA (Council of Fashion Designers of America) Fashion Awards, également appelés “Oscars de la mode”, récompensent les meilleurs créateurs américains dans le secteur du prêt-à-porter et des accessoires. L’édition 2017 s’est tenue le 5 juin, au sein du Manhattan Center’s Hammerstein Ballroom, à New York.
Cette année, Raf Simons fut sans conteste la personnalité phare. En effet, le nouveau directeur artistique de Calvin Klein a raflé deux des prix les plus prestigieux : meilleur créateur de mode masculine et meilleur créateur de mode féminine. Le dernier en date (et le premier) à avoir accompli cet exploit n’est autre que Calvin Klein lui-même, en 1993. Une réelle consécration pour le créateur belge qui a repris les rênes de la maison américaine en août dernier, après un passage très remarqué chez Dior. Le prix du meilleur créateur d’accessoires a été attribué à Stuart Vevers, le directeur artistique de la maison Coach, qui connaît un véritable essor depuis son arrivée.
Demna Gvasalia, le directeur artistique de Balenciaga et fondateur du label révolutionnaire Vetements, a été salué pour son travail en remportant l’International Award. Pour sa part, Rick Owens a reçu le Geoffrey Beene Lifetime Achievement Award, couronnant sa carrière et sa créativité débordante. Le prix Swarovski, qui vise à récompenser les talents émergents, a été décerné à Laura Kim et Fernando Garcia pour l’audacieux label Monse. Enfin, la très grande Franca Sozzani, l’ancienne rédactrice en chef de Vogue Italia disparue en 2016, a reçu à titre posthume le prix d’icône de la mode.

Quand la mode devient politique

Un point commun relie tous les récompensés : le fait d’être immigré. Royaume-Uni, Belgique, Géorgie, Italie… Tous proviennent de différents horizons. Une situation relativement ironique lorsque l’on sait que le président américain souhaite fermer les frontières de son pays. En effet, depuis quelques mois Donald Trump cherche à restreindre l’immigration en durcissant les procédures d’acquisition des visas de travail, ou de la nationalité américaine. Si son projet venait à se concrétiser, cela serait une véritable régression pour la première puissance mondiale – car comme le démontre l’industrie de la mode, l’immigration est une bonne chose, notamment pour la créativité.

Bien que le milieu de la mode soit resté silencieux durant les premières semaines de la présidence Trump, il semble de plus en plus vouloir s’exprimer, comme nous avons pu le constater au cours de la Fashion Week de New York, en février dernier. Prabal Gurung a ainsi fait défiler ses mannequins avec des T-shirts brodés de slogans tels que “Oui, nous devrions tous être féministes”, “L’avenir est féminin” ou “Je suis une immigrée”.

Les designers de la marque Public School ont quant à eux détourné le slogan de campagne de Donald Trump, pour faire des casquettes et des sweat-shirts avec le message “Make America New York”.

En parallèle, des créateurs et mannequins se sont mis à porter des bandanas blancs, en signe de solidarité avec toute l’humanité. Pendant ce temps-là, Anna Wintour et beaucoup d’autres arboraient des badges roses avec le message “Fashion stands with Planned parenthood” (“La mode soutient le Planning familial”), le financement de l’organisation étant menacé par les conservateurs au pouvoir.

À l’issue de la Fashion Week, et en réaction au “Muslim Ban” – qui empêche les ressortissants de six pays musulmans d’entrer aux États-Unis –, 81 grands noms de la mode se sont réunis pour une vidéo, afin de prouver leur solidarité avec les immigrés.

Enfin, le 21 janvier dernier était organisé à Washington la Marche des femmes, qui a rassemblé plus de 500 000 personnes. En ouverture du défilé, les organisatrices ont lu un manifeste pour l’égalité des droits et encourageant les femmes à se battre. S’en sont suivis de nombreux discours de créateurs, vantant tous les bienfaits de l’immigration. Cette initiative fut elle aussi récompensée lors des CFDA 2017. En effet, l’icône féministe Gloria Steinem, Cecile Richards (la présidente du Planning familial) et la chanteuse Janelle Monáe ont reçu le Board of Director Special Tribute. Le prix leur a été remis par la créatrice Diane Von Fürstenberg, pour leur rôle décisif dans ce grand événement.

Donald Trump ne semble manifestement pas comprendre la richesse que l’immigration apporte. En tout cas, si quelqu’un voulait argumenter en faveur de l’immigration en montrant la force d’un monde sans barrières, il ne trouverait pas meilleurs exemples que les lauréats de cette cérémonie 2017 des Oscars de la mode.

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