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Magnanville : pourquoi l’appli “alerte attentats” du gouvernement n’a pas fonctionné

Magnanville : pourquoi l’appli “alerte attentats” du gouvernement n’a pas fonctionné

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Par Théo Chapuis

Publié le

Après une attaque terroriste qui a conduit à la mort de deux officiers de police, on s’est demandé pourquoi l’appli “alerte attentats” du gouvernement n’avait pas été déclenchée. Voilà pourquoi.

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“Un acte terroriste abject” pour le ministère de l’Intérieur, “un acte incontestablement terroriste” pour François Hollande : voilà comment l’exécutif a qualifié le meurtre de deux policiers lundi 13 juin, à Magnanville, dans les Yvelines. L’homme s’est d’ailleurs revendiqué de Daech, ce que l’organisation terroriste confirmera, et les autorités ont répondu en envoyant le RAID pour intervention, conduisant à la mort du tueur.

Tous les éléments semblaient donc réunis pour que SAIP, l’appli “alerte attentats” du gouvernement, soit déclenchée à proximité de l’assaut. Or cela n’a pas été le cas.

Une application lancée avant l’Euro 2016

Mais le SAIP, c’est quoi ? C’est l’anagramme de “Système d’alerte et d’information des populations”, un service pour smartphone mis en place deux jours avant le coup d’envoi de l’Euro par le gouvernement. Son rôle : prévenir les habitants situés à proximité d’une catastrophe en cours : un “attentat”, bien sûr, mais aussi un risque “nucléaire”, une “rupture d’ouvrage hydraulique” ou le déversement à grande échelle d’un “produit dangereux”.

L’application donne par ailleurs“des instructions pratiques” sur quoi faire afin de ne pas céder à la panique – et ce pour un maximum de huit zones géographiques à enregistrer dans votre téléphone. Ci-dessous, voilà à quoi l’écran de votre smartphone devrait ressembler en cas de danger, si vous avez activé la géolocalisation :

Lancée la semaine dernière, l’application n’a pourtant pas été déclenchée lundi soir, alors que l’attaque à Magnanville était en cours et que le RAID était dépêché pour mettre le suspect hors d’état de nuire. Alex Sulzer, journaliste à L’Express, s’est ainsi fendu d’un tweet de capture d’écran pour en témoigner :

Chargement du twitt...

Cependant, le journaliste nous a confié qu’au moment de l’attaque, il ne se trouvait pas à Magnanville, ni même dans les Yvelines… mais à Paris, à plus de 50 kilomètres de la commune du canton de Mantes-la-Jolie. Au vu des éléments d’hier soir, on peut comprendre que les autorités n’aient pas considéré l’attaque au domicile de ces officiers de police comme une menace pour la sécurité des Parisiens.

“Nous n’étions pas dans une configuration de danger pour la population”

Sauf que SAIP n’a été déclenché ni pour les Yvelinois, ni pour les Magnanvillois. Aurait-il dû l’être ? Contacté par nos soins, le ministère de l’Intérieur estime que non. D’emblée, les autorités ont considéré que tout était rapidement sous contrôle, loin de la stupeur et la panique de janvier ou novembre 2015 :

“Nous n’étions pas dans une configuration de danger pour la population. Le périmètre a été sécurisé, il n’y avait pas de danger de fusillade”.

Bref, circulez, y’a rien à voir… En outre, d’après le ministère, ce qui s’est passé à Magnanville n’a pas immédiatement été identifié comme une attaque terroriste :

“La saisine antiterroriste a été déclenchée après. Là, nous étions dans le cas d’un forcené, ça arrive plusieurs fois par semaine. Déclencher le SAIP aurait créé plus de raout que nécessaire.”

Le gouvernement veut éviter de crier au loup et empêcher la panique inutile.

Des critères flous

Les règles du dispositif prévoient que c’est au préfet de choisir l’étendue de la zone géographique de l’alerte. Selon la gravité des événements, on pourra donc être averti ou non d’une attaque en cours à plusieurs dizaines de kilomètres de chez soi.

Pour le reste, de nombreuses zones d’ombres subsistent concernant le déclenchement des alertes. Faut-il que l’attaque soit menée par un ou plusieurs suspects ? Qu’ils soient possession d’armes à feu ? D’otages ? Pas de réponse claire de la place Beauvau : il ne semble pas y avoir de règle gravée dans le marbre et on nous renvoie simplement au dossier de presse. Voilà ce qu’on peut notamment y trouver :

Cette application permet d’être alerté, via notification sur son smartphone, en cas de suspicion d’attentat ou d’événement exceptionnel (accident de sécurité civile) susceptible de résulter d’un attentat.

Une formulation qui ne nous éclaire pas davantage… Il faudra sûrement – et malheureusement – de nouveaux faits semblables à l’attentat de Magnanville pour qu’on puisse déterminer avec un peu plus de précision le périmètre d’action du SAIP.