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Billets, guns, drogue : polémique quand des collégiens font du rap hardcore

Billets, guns, drogue : polémique quand des collégiens font du rap hardcore

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Par Anaïs Chatellier

Publié le

Un clip de rap mettant en scène de jeunes collégiens de Sarcelles, billets et armes en main, fait polémique.
Liasses de billets, guns et drogues… Le clip “1er Pocheton” – en référence au sachet plastique dans lequel est habituellement vendu le cannabis – reprend les codes de beaucoup trop de clips de rap, naïades peu farouches en moins et tout jeune âge des rappeurs en plus. Car sous le nom de Sarcelleslite, c’est un groupe d’une dizaine de jeunes collégiens (voire écoliers) qui se cachent.
Surnommés désormais les “bébés rappeurs”, originaires de la ville de Sarcelles, située dans le département du Val-d’Oise, ils n’hésitent pas à lancer en brandissant une arme a priori factice :“si t’as pas les couilles de tirer, ici c’est sans pitié, on t’allume au mortier“. Ou encore : “dans le peura (rap), je laisse des cetras (traces), comme sur le cul à ta reuseu (soeur)”, suivi de “on ne vise pas les iep (pieds), on vise la tetê (tête)”.
Visionnée près de 300 000 fois sur YouTube depuis sa mise en ligne début janvier, la présence de jeunes dans le clip et les propos tenus a poussé la justice à se saisir de l’affaire. 

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Apologie du crime ou juste un petit délire ?

“C’est scandaleux. Ce type de vidéo est inadmissible”, a déclaré François Pupponi, député-maire de Sarcelles dans Le Parisien. Et de poursuivre : “Nous allons saisir le procureur pour qu’il y ait des sanctions pénales exemplaires. On ne peut pas laisser faire ça. Il y a des gens qui font de l’argent avec ça”. De son côté, le procureur a précisé :

J’essaye de déterminer si des infractions pénales sont constituées, notamment sur le fondement de l’article 227-24 du code pénal, qui concerne la diffusion de message à caractère violent, pornographique, portant gravement atteinte à la dignité humaine.

Les mots sont lâchés. À cela s’ajoute le fait de savoir si une autorisation parentale avait été signée avant que le clip ne soit tourné. En ce qui concerne la polémique autour de l’utilisation d’armes à feu, le producteur du clip, qui se fait appeler “le Manouche” et qui apparaît à la toute fin du clip, assure en avoir utilisé des fausses : “Je n’aurais jamais laissé des mineurs prendre une vraie arme. Il n’y a rien de méchant, c’est juste pour copier les vrais rappeurs. Certes il y a des sujets, des phrases un peu vulgaires, mais il y a aussi du mensonge”.
Un peu dépassé par la tournure médiatique qu’a pris cette affaire, il assure au micro de BFMTV : 

On parle de drogue, comme dans les films. Mais ce ne sont pas des dealers, ils vont tous à l’école. Il n’y a rien de méchant, c’est que de la comédie, que des comédiens.

Si de prime abord, il semble difficile de déceler le second degré derrière les paroles que les jeunes ont eux-mêmes rédigées, le sourire jusqu’aux oreilles des jeunes dans plusieurs plans, heureux de se prendre pour de “vrais gangsters”, laisse penser qu’il s’agit davantage d’un “petit délire” entre potes. C’est du moins ce qu’ont confié certains jeunes interviewés apparaissant dans le clip.

Des modèles lourds de sens

Pour l’instant, “Le Manouche” risque jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Un “petit délire” qui risque donc de lui coûter cher. S’il semble important d’expliquer à ces jeunes pourquoi leurs propos violents et misogynes ont choqué et pourquoi brandir armes et billets n’est pas normal, il faut également se rappeler que malheureusement ils ne font que reproduire l’exemple de certains de leurs modèles.
Cette vidéo a par ailleurs permis à nombre d’internautes de jeter une fois de plus leur haine sur les cités et sur le rap, n’hésitant pas à comparer les jeunes à des “macaques” et à débiter tout un tas de propos injurieux de type : “faut renvoyer toute ces merdes, leur parents suceur de CAF, tout leurs “frères” comme ils aiment à s’appeler entre eux, dans leur pays d’origine c’est-à-dire en Afrique (sic)”.
Et un autre commentaire de préciser :

Pourquoi les médias parlent soudain d’un clip qui fait 100 000 vues ? Parce qu’on y voit de jeunes cassos ? Une occasion pour cracher sur le rap et les cités en une seule séquence ? J’aimerais comprendre.