La Brasserie de Barbès ouvre ses portes, un pas de plus vers Boboland ?

La Brasserie de Barbès ouvre ses portes, un pas de plus vers Boboland ?

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Par Marine Lecaque

Publié le

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Un havre de raffinement 

600 mètres carrés sur quatre niveaux, ils façonnent leur bébé comme une grosse brasserie parisienne à l’ancienne version 2015, avec un bar à cocktails pour un dernier verre et une cigarette sur le toit où les tarifs seront pour toutes les bourses.
Une brasserie magnifique, tout en marbre vert, béton ciré, laiton et boiseries, en osmose avec son voisin, le cinéma Louxor. Déjà en 2013, la salle de cinéma venait réveiller le quartier. Depuis son ouverture, elle a connu un succès deux fois plus important que celui espéré grâce à sa programmation éclectique. Elle n’a pourtant pas eu d’impact spécial au niveau de la fréquentation de Barbès.
Pour autant, les aspects traditionnels du quartier n’ont pas disparu. On retrouvera toujours des vendeurs de cigarettes à la sauvette, des petits trafics, des boutiques de téléphones et la fameuse enseigne Tati de l’autre côté du carrefour. L’établissement va encore améliorer l’image du quartier, trop souvent ternie dans les médias, comme récemment avec le scandale de Fox News et des “no-go zones”.

En route vers un melting-pot ou une gentrification omniprésente ?

Nous apportons un service qu’il n’y avait pas. Alors forcément, nous modifions le quartier. Mais une brasserie n’a rien d’élitiste et la nôtre est ouverte aux gens qui vivent ici, travaillent ici et viennent ici.

Grossistes en prêt-à-porter dans le Sentier, sex-shops et coiffeurs africains à Saint-Denis, taxiphones et agences d’intérim de gare du Nord, une partie de l’est parisien est tapissée de ces commerces originaux. Une petite balade le long du boulevard de Strasbourg, de la gare de l’Est au boulevard de Bonne Nouvelle, vous aidera à vous en rendre compte.
Si cette concentration pouvait s’avérer bénéfique pour les affaires, regroupant ainsi toute l’activité d’un secteur, elle ne l’était pas pour les habitants qui se retrouvent sans commerces de proximité, surtout de qualité. Il leur était parfois difficile de trouver une simple boulangerie. Or, ces services font l’âme d’un quartier. Grâce à la gentrification, la tendance commence à s’inverser. Personne ne se plaint de plus de mixité sociale, sauf les intolérants de nature.

La mairie de Paris met le paquet

La mairie de Paris met le paquet sur les quartiers bobos. La municipalité propose des locaux commerciaux pour remplacer grossistes de prêt-à-porter, sex-shops et coiffeurs “afro” par des boutiques de créateurs ou de produits du terroir. Épiceries fines, bar à soupes ou street-food de qualité, ces zones deviennent des paradis pour hipsters.
Depuis plusieurs années, la municipalité veut ramener de la diversité dans les petits commerces. En 2004, elle a lancé un plan de lutte contre la mono-activité et la désertification commerciale. Baptisé Vital’quartier, il concerne aujourd’hui 11 quartiers parisiens (voir carte ci-dessous). Le principe : quand un bail commercial est à vendre, la Semaest (société d’économie mixte d’aménagement de l’est parisien) peut préempter le local. Après l’avoir rénové et mis aux normes, elle fait un appel à candidatures.
Ne pourront s’installer dans les lieux que des commerçants qui viennent combler un manque dans l’offre commerciale. Dans le Xème arrondissement de Paris, ce sont ainsi une quinzaine d’enseignes qui ont pu ouvrir depuis 2008. Les habitants sont ravis de voir que d’autres commerçants s’installent et que cela entraine une diversification de l’offre proposée.

Le plan Vital’quartier. Crédits image : Mairie de Paris

Made in France et loyers en hausse

Hausse des prix de l’immobilier, de la vie de tous les jours, voilà les maux desquels on les accuse. Selon eux, cela ne changera pas la morphologie du quartier. Le Cinéma Louxor n’a pas eu d’impact particulier. Ils ne sont pas là pour faire disparaître les classes moyennes et populaires.
Et pourtant, ces nouveaux commerces surfent presque tous sur le créneau du made in France et des produits du terroir. Des secteurs plutôt coûteux pour le portefeuille. L’aide au départ n’est pas négligeable mais comme les loyers sont plus élevés que ceux du marché, les anciens commerçants ne s’y retrouvent plus et préfèrent emprunter pour acheter le local.
Rémi Féraud, maire du 10ème arrondissement, s’indigne :

Il y a une spéculation sur les prix. En ce moment, je me bats avec le propriétaire d’un bail commercial dans la rue d’à côté. Il est prêt à céder son local à un coiffeur africain. C’est catastrophique car il y en a déjà partout !

Il ne faut tout de même pas oublier qu’ il y a trente ans, à Barbès, il y avait déjà une brasserie à cet emplacement, et en face, un autre bar, qui marchaient très bien. Tout n’est qu’un éternel recommencement.
Pour plus d’infos sur la Brasserie de Barbès, rendez-vous tous les jours de 8 heures à 2 heures du mat au 126 Boulevard de La Chapelle. M° Barbès. Pour plus de lieux du même genre, allez-vous balader dans le Nord-Est de la capitale.