Konbini Book Club : dites-nous ce que vous faites ces vacances, on vous dira quoi lire

Konbini Book Club : dites-nous ce que vous faites ces vacances, on vous dira quoi lire

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Par Leonard Desbrieres

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Ça y est ! La Coupe du monde est finie et la France a plié le game. Après avoir vu ça, on peut partir en vacances tranquille, et le plus tôt possible bien sûr ! Alors on oublie le ballon rond et on retourne dans le monde merveilleux de la lecture. Fidèle au poste, le Konbini Book Club vous livre ses “must read” de l’été.

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Si comme chaque année, tu vas passer ton été en roue libre, tu liras :

L’homme-dé de Luke Rhinehart (l’Olivier)

Paru pour la première fois en 1971, L’Homme-dé est l’un des chefs-d’œuvre les plus injustement sous-estimés de la littérature. Les Éditions de l’Olivier ont eu la bonne idée de le rééditer en 2014. Sous le pseudonyme de Luke Rhinehart, le romancier américain George Powers Cockroft raconte la folle histoire d’un psychiatre new-yorkais reconnu, marié et père de deux enfants formidables qui va volontairement faire basculer sa vie. Celui-ci décide du jour au lendemain de la laisser entre les mains du hasard et de jouer au dé toutes les décisions et toutes les pulsions qui l’agitent. Il ressent une attirance pour sa voisine du dessous ? Avec l’as, il y renoncera, avec le deux, il se fera analyser par le mari de celle-ci, éminent collègue, avec le trois, il ira se coucher. Et ainsi de suite jusqu’au six, la mesure extrême et atroce : le viol. Les dés n’ont aucune limite, aucune censure. Une seule contrainte : ne jamais désobéir à leurs ordres. Un roman complètement déjanté, grinçant, dérangeant aussi. Un manifeste génial pour un laisser-aller de l’homme face à ses fantasmes les plus inavouables.

Si tu en es déjà à ton huitième festival et qu’il t’en reste cinq avant septembre, tu liras :

Plastic Dreams d’Olivier Degorce (Headbangers publishing)

Dans les années 1990, l’utopie techno battait son plein. DJ et clubbers partageaient dans une transe incantatoire un insatiable besoin de liberté. Un âge d’or que la jeunesse d’aujourd’hui regrette et essaye par-dessus tout de revivre chaque week-end. Si tu es de ceux-là, le livre Plastic Dreams d’Olivier Degorce, publié par la maison d’édition d’Ed Banger Records, sera ta bible estivale. Cinq cents pages et des centaines de photos incroyables d’une génération pour qui faire la fête représentait l’affranchissement suprême. Olivier Degorce parvient à capter davantage que la naissance d’un mouvement musical : un incroyable élan vital.

Si pour toi l’été sera chaud, tu liras :

Porn Valley de Laureen Ortiz (Premier Parallèle)

25 juin 2009, Michael Jackson vient de mourir, la ville de Los Angeles est sens dessus dessous et les médias du monde entier se battent pour en savoir plus sur ce qui vient de se passer. Mais Laureen Ortiz, correspondante en Californie pour le Journal Libération, est sur un tout autre sujet. Dans la San Fernando Valley, elle commence l’enquête retracée dans ce livre. Une plongée dans un monde paradoxal, à la fois objet de toutes les convoitises et business soumis à une omerta suspicieuse, l’industrie pornographique américaine. Un road trip hallucinant dans l’envers du décor de la Cité des Anges, où dollars et religion s’entrechoquent et où des travailleurs se battent pour ne pas être écrasés par une machine sans pitié pour les consciences et l’amour-propre. Avec un ton et un style jouissifs (je me devais de le placer) à mi-chemin entre la série The Deuce, sur laquelle elle a travaillé pour David Simon, et les livres cultes de Hunter S. Thompson comme Hell’s Angels ou Las Vegas Parano, Laureen Ortiz nous offre un pur moment de plaisir gonzo. Idéal pour l’été.

Si comme chaque été, tu vas tomber dans un délire arty avant de réaliser tes limites, tu liras :

Eroica de Pierre Ducrozet (Babel)

Avant d’être récemment couronné du prix de Flore pour son dernier roman, le puissant L’Invention des corps, Pierre Ducrozet avait déjà démontré son talent précoce avec le livre Eroica. Une biographie romancée, consacrée à un artiste pour qui précocité était un faible mot : le peintre Jean-Michel Basquiat. Fils d’un Haïtien et d’une Portoricaine, étoile filante de l’art moderne américain, au talent aussi fou qu’éphémère, il a tout simplement réussi à figurer parmi les plus grands peintres du XXe siècle alors même que sa vie s’est brusquement arrêtée à 27 ans, après une overdose d’héroïne. Aux côtés de Keith Haring et d’Andy Warhol, il fut le symbole de l’effervescence de la scène artistique new-yorkaise des années 1980. C’est cette vie consumée par les deux bouts que Pierre Ducrozet réussit à magnifiquement nous raconter. Un destin tragique mais poétique comme seuls nous en réservent les génies, le combat d’un artiste torturé contre le monde mais aussi contre lui-même et ses passions destructrices.

Si cet été, c’est le moment ou jamais de te poser la question de ton avenir, tu liras :

Tarte aux pêches tibétaines de Tom Robbins (Gallmeister)

Tom Robbins est le genre de déglingos que seule la littérature américaine parvient à créer. Un mec qui a vécu ces cinquante dernières années à fond avec pour unique philosophie : “la joie avant tout”. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ça lui a plutôt bien réussi. Il est devenu un romancier au succès mondial et une horde de fidèles portant des goodies à son effigie prêchent sa bonne parole à travers le monde. Il a même eu l’honneur de voir l’un de ses livres adapté par Gus Van Sant en personne (avec le film Even Cowgirls Get the Blues, une petite pépite méconnue au casting duquel on retrouve Uma Thurman et Keanu Reeves). Dans son dernier livre, Tarte aux pêches tibétaines, il délaisse son style classique − des romans complexes et psychologiques − pour nous offrir sur un plateau le récit de sa vie infernale. Un cocktail explosif à travers la guerre de Corée, la Beat Generation, ses études de journalisme et les innombrables femmes de sa vie. De quoi relativiser tes récentes décisions.

Si l’été, tu te transformes en machine de lecture asociale, tu liras :

Lontano et Congo Requiem de Jean-Christophe Grangé (Albin Michel)

Depuis 1998 et son roman les Rivières pourpres, Jean-Christophe Grangé déroule au fil des livres une imagination impressionnante et un talent rare pour faire frissonner son lecteur. Si tu es de ceux qui réclament absolument leur polar de l’été, on l’a trouvé pour toi. En deux tomes et plus de 1 500 pages impossibles à lâcher, la série Lontano est un thriller sordide et étouffant comme on n’en avait pas vu depuis longtemps. La famille Morvan est dans les arcanes du pouvoir, le père est le premier flic de France, l’aîné bosse à la Crim et le cadet règne sur les marchés financiers. Quant à la sœur, son métier d’escort l’amène à fricoter avec les puissants dans les palaces de la capitale. Mais quand un tueur en série particulièrement atroce refait surface, il vient bousculer l’équilibre fragile de cette famille qui a caché beaucoup de secrets sous le tapis. Un roman noir à la française ambiance Olivier Marchal, le page turner indispensable à toute valise idéale.

Si l’été, tu veux t’évader et rêver de strass et paillettes avec les grands de ce monde, tu liras :

Mets le feu et tire-toi de James McBride (Gallmeister)

Disparu il y a presque douze ans, James Brown fait incontestablement partie des meilleurs artistes de tous les temps. “The Godfather of Soul” a hypnotisé les foules avec des prestations scéniques hallucinantes pendant près de soixante ans. Il faut dire que l’homme était un spectacle à lui tout seul, une bombe à retardement impossible à suivre dont la passion principale était d’emmerder le monde. C’est ce personnage bien plus complexe qu’il n’y paraît que James McBride, un des grands romanciers américains du moment (lisez L’Oiseau du Bon Dieu, National Book Award en 2013) et accessoirement jazzman réputé, décide de disséquer dans ce livre. Le portrait d’une icône doublé d’une fresque engagée de la société américaine contemporaine. Strass, paillettes… Et dynamite.

Si cet été, tu veux saluer une année Girl Power :

Hedy Lamarr, Ecstasy and me (Séguier)

Épouse prisonnière d’un fabricant d’armes autrichien, première femme à avoir simulé un orgasme au cinéma, plus belle actrice d’Hollywood, inventrice des prémices du Bluetooth et du wifi avec un scientifique français, femme libre qui ne se laissera jamais marcher dessus ni par l’industrie du cinéma ni par le patriarcat (elle collectionne six divorces) : non, ce n’est pas le personnage de roman le plus fou de l’histoire mais bien la vie à peine croyable d’Hedy Lamarr. Icône du nouvel Hollywood jusqu’à sa déchéance sordide à base de chirurgie ratée et de dilapidation de fortune, elle a fasciné l’Amérique avant de tomber dans l’oubli. La parution de son autobiographie pour la première fois en français aux (excellentes) éditions Séguier est un pur moment de littérature qui la remet pour notre plus grand bonheur sous les projecteurs. À quand le biopic ?

Si à défaut d’y aller pour tes vacances, tu veux toucher de près le rêve américain, tu liras :

La Revue America

On reproche souvent à la presse de manquer d’idées et de ne pas prendre suffisamment de risques éditoriaux. François Busnel, animateur de La Grande Librairie sur France 5 et Éric Fottorino, directeur de l’hebdomadaire Le 1, ont pourtant eu une idée en or pour lancer un nouveau projet passionnant. Fondée dans les jours qui suivirent l’élection de Donald Trump, la revue trimestrielle America se propose de raconter l’Amérique d’aujourd’hui à travers ses écrivains. Témoins privilégiés de sa beauté mais aussi de ses cicatrices, ils se livrent sans réserve sur cette époque hors norme et pleine de contradictions que vit la première puissance mondiale. Pas seulement indispensable pour les amoureux du pays de l’Oncle Sam, America est un mook dans l’air du temps, mélange de poésie, d’analyse sociale et de références pop culture. Le “must have” de l’été côté presse écrite.

Si cette année tu n’as pas de vacances et que Paris sera ton terrain de jeu, tu liras :

Paname Underground de Zarca (les Éditions de la Goutte d’Or)

C’est le livre coup de poing de l’année. Une déflagration littéraire qui reste encore en travers de la gorge des semaines après avoir terminé la dernière page. Après Le Boss de Boulogne, celui qu’on surnomme “Le Mec de l’underground” a encore frappé. Comme Zarca le dit lui-même avec son style inimitable, il a “fisté le game”. Avec Paname Underground, il nous offre sur un plateau une immersion totale et trash dans l’envers du décor parisien façon Guide du Routard sous speed. Du “Little Kaboul” du square Villemin au bidonville de crackers de la porte de la Chapelle en passant par le Gouffre, un backroom sordide de Montparnasse, on pénètre au cœur des endroits cachés de la capitale. Mais Johann Zarca est un excellent manipulateur, et son jeu préféré consiste à perdre son lecteur entre réalité et fiction. On embarque dans ce voyage à 200 à l’heure sans jamais savoir si ce qui nous est décrit existe réellement. Et au final, c’est peut-être ça qui nous excite le plus.

Bonus coups de cœur :

En bonus, deux livres dont on a déjà parlé ces derniers mois (ici et ici) et qui méritent amplement leur place dans votre valise de l’été.

My Absolute Darling de Gabriel Tallent (Gallmeister)

Les Argonautes de Maggie Nelson (Éditions du Sous-Sol)