Rencontre : Le Club fait souffler un vent de fraîcheur sur le rap français

Rencontre : Le Club fait souffler un vent de fraîcheur sur le rap français

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Par Sophie Laroche

Publié le

Une histoire de frérots

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Comme beaucoup de duos du rap, l’histoire du Club commence pendant l’enfance. Tayz et La Kanaï se rencontrent alors qu’ils n’ont que trois ans. Ils vivent tous les deux à Montreuil, haut lieu d’un rap hexagonal bouillonnant. Ensemble, ils vont à la maternelle, l’école primaire et au collège, ne se quittant jamais vraiment – même quand Tayz déménage. “On s’est jamais lâchés – même pas embrouillés.” Autant dire que le qualificatif “frérot” qu’ils utilisent pour s’interpeller dans leurs morceaux (“2047”) est loin d’être superflu. 
Le Club, c’est aussi une histoire qui s’écrit à trois. De leurs années au collège, ils retiennent ainsi leur rencontre avec leur manager actuel, Cain, qui commence à rapper bien avant le duo. Inspiré par ce dernier, Tayz s’y met aussi, suivit par La Kanaï. C’est à ce moment que la mécanique se met en place. Chacun commence alors à écrire ses textes de son côté jusqu’à ce que les deux frérots se lancent dans les open mics. C’est au café La Pêche – qui accueille régulièrement des performances de rap et où ils ont assisté à leur premier concert, celui de Guizmo – qu’ils s’initient à la scène. Forts de cette expérience, Tayz et La Kanaï commencent à composer ensemble, n’envisageant plus le rap en solo. 

“On s’est pas forcés à faire un truc ensemble. On rappe ensemble, on est partis en studio ensemble, puis on s’est dit qu’on allait continuer ensemble. L’union fait la force, mieux vaut être fort à deux que tout seul.”

La Nouvelle Vague 

À 20 ans (ou encore 19 ans pour La Kanaï), les deux rappeurs de Montreuil font partie de la dernière génération du rap – celle qui se lance maintenant dans le game après avoir noirci ses blocs-notes et foulé les open mics au lycée. Plus tournée vers le futur que vers un passé qui ne lui ressemble pas, elle rompt avec ses aînés malgré le peu d’années qui les sépare parfois. Ainsi, il lui importe moins d’être légitime ou de gagner l’approbation des anciens, que de faire une musique qui lui ressemble, quitte à ne plus sonner très rap par moments.

“On trouvait que c’était important de faire notre rap à nous. Il y a la volonté de pas faire ce qui s’est déjà fait. Par exemple, on ne voulait pas faire du old school. Même au niveau des prod, on voulait kicker sur des productions sur lesquelles normalement tu ne peux pas rapper.”

L’époque des rap contenders est donc bien révolue et Le Club nous le prouve. Quand il s’agissait pour beaucoup – quelques années plus tôt – de prouver leur technique par leur écriture ou leur flow à l’aide d’un rap très dense, les membres du Club balaient ces idéaux au profit de ce qu’ils aiment vraiment. Ainsi, ils délivrent un rap en grande partie chanté, puisqu’on leur a appris à l’école, tout en assumant paradoxalement un vocodeur omniprésent, sans lequel ils n’y arriveraient pas. Ces derniers savent aussi kicker quand cela est nécessaire, et ils nous le prouvent à coups de couplets plus hargneux dans des morceaux comme “Fée d’hiver”.
Car, le rap est bien ancré dans leurs influences. Le regard définitivement tourné vers l’Hexagone, ils préfèrent aux productions “ricaines”, le rap français actuel. “On écoute du rap américain mais moi ça me perturbe, j’écoute pour le flow mais j’aime pas écouter le son sans comprendre.” Leurs premières inspirations viennent ainsi de S.Pri Noir, La Fouine, Volts Face ou Guizmo. “Ils écrivaient des trucs dans lesquels on se reconnaissait trop. On se disait qu’il fallait qu’on écrive aussi. Il y a un freestyle qui m’a marqué, c’était deux mille douilles avec Sadek“.

Pour le reste, l’influence parentale reste très présente et explique ce contraste permanent entre rap et chant qui imprègne leur musique. Ainsi, Tayz explique que si son père écoutait beaucoup Booba, il y avait aussi du reggae et du rock qui perçaient les enceintes de la chaîne hi-fi. “Je te dis que mon père écoutait du rap mais y a aussi beaucoup de reggae, les Nèg’ Marrons, Bob Marley et même du rock comme les Red Hot Chili Peppers. Je trouve qu’il y a pas mal un truc reggae dans certains sons du projet, c’est un genre que je kiffe.”

Une envie de partir loin