Marina and The Diamonds, celle qui ne faisait pas que de la pop

Marina and The Diamonds, celle qui ne faisait pas que de la pop

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Par Fanny Hubert

Publié le

Un album “doux et étrange”

Six ans plus tard, elle compte trois albums à son actif. Le dernier en date s’appelle Froot. Contrairement à son précédent, Electra Heart, cette fois-ci, Marina a écrit son album seule et n’a collaboré qu’avec un producteur. La raison ?

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J’en ai eu marre après le deuxième album parce que j’avais collaboré avec des producteurs américains qui ne pensent qu’à faire des tubes. Je voulais voir comment c’était, c’est pour ça que j’ai travaillé avec eux. Mais j’en ai eu vraiment assez. Donc ça me semblait juste de travailler seule pour cet album.

Le résultat est un opus qui lui ressemble plus en termes de “son et de production” et qui met beaucoup plus sa voix en valeur. Pour le qualifier, elle utilise les mots de son père qui le voit comme un album “doux et étrange“. Les rythmes punchy, très mélancoliques et toujours efficaces sont mis au service de paroles singulières. La jeune femme a gardé son écriture à la fois cynique, touchante et qui frappe juste à tous les coups.
La track 11 de Froot, “Savages”, en est le parfait exemple. Pour cette chanson, la jeune femme s’est inspirée d’un événement tragique, comme elle me l’explique :

J’étais en train de lire un article sur les attentats du marathon de Boston. Le journaliste expliquait à quel point c’était dur d’admettre qu’un homme puisse organiser un marathon pour collecter des fonds pour sauver des enfants pendant qu’un autre était en train de construire une bombe pour faire sauter des gens.
Pour moi, cela décrit totalement les deux états de la race humaine et ce à quoi on a du mal à faire face : chaque être humain a un côté animal presque sauvage qu’il essaye de marier avec un côté plus civilisé de lui-même.

Elle va plus loin en précisant qu’elle a toujours été “intéressée par ‘pourquoi’ les gens font ce qu’ils font. Sans forcément les condamner ou les juger. Par exemple, le viol, que j’aborde dans la chanson. Pourquoi cela arrive ? Parce que cela arrive depuis des milliers et des milliers d’années…” 

Une jeunesse entourée de femmes fortes et “intransigeantes”

Parmi les autres thèmes abordés dans Froot, on retrouve souvent l’amour, la solitude mais aussi la mort déjà abordée à plusieurs reprises dans The Family Jewels et Electra Heart – écoutez donc la formidable “Valley of the dolls”. Le titre “Immortal” évoque à nouveau cette finitude de l’être humain et le souhait de la chanteuse d’être immortelle. Mais cette envie ne signifie pas qu’elle veut laisser une trace grâce à sa musique.

Peut-être qu’avant je pensais à ça, mais maintenant je n’ai plus du tout cette idée en tête. L’Histoire est tellement vaste et dans 1000 ans personne ne va se soucier [de ma musique] et encore moins dans 100 000 ans (rires). Si on est encore là… J’écris pour exprimer mes propres idées sur les choses et c’est à peu près tout.

Pour celle qui se dit maintenant “Happy”, chanter a toujours fait partie de ses plans : “Quand j’ai décidé de faire ça, je ne savais pas vraiment pourquoi jusqu’à ce que je me mette à écrire. C’était la seule chose qui me permettait de me sentir mieux par rapport aux problèmes que j’avais.” Parmi ses influences, elle cite :  No doubt, Kate Bush, Dolly Parton, Annie Lennox, P.J Harvey, Patti Smith… Que des femmes fortes et “intransigeantes” qu’elle écoutait dans sa jeunesse.
Aujourd’hui, des artistes comme Tove Lo, Emilie Nicolas et Shamir font partie de sa playlist tout comme… Christine and the Queens. Cet été, notre frenchie préférée faisait la première partie de Marina and The Diamonds lors de ses shows américains.

J’ai écoute sa musique et je l’ai trouvée cool. Et puis j’ai vu son concert et là je me suis dit : “Oh mon dieu ! Mes fans vont l’adorer.” Elle est tellement intéressante. C’est une vraie “show-woman”.

Une esthétique soignée

Pour illustrer ses chansons, Marina a toujours misé sur une esthétique pop, colorée et soignée. On pense aux clips de “Hollywood”, “Oh No!”, ou “I’m not a robot”. Pour Froot, la chanteuse ne déroge pas à la règle et offre quatre clips aux accents très cinématographiques. La chanson qui donne son nom à l’album s’offre une ambiance des années 50 avec jeux de miroirs, lumières bleues et une Marina diva courtisée par un homme dont on ne voit jamais le visage.

Pour cette vidéo, l’idée vient du réalisateur Chino Moya, qui a notamment travaillé avec St Vincent et Hurts. Mais la plupart du temps c’est la chanteuse elle-même qui choisit comment mettre en images son texte : “Le plus souvent c’est moi et parfois ça dépend. Si quelqu’un vient me voir avec une idée formidable, je ne dirais pas non.”
Le clip est un moyen pour Marina de “construire un monde, d’avoir une sorte de package pour l’album“. Elle poursuit : “C’est pour ça que j’aime aussi les vêtements à la mode et le fait de créer des vidéos. C’est une façon de contrôler l’esthétique visuelle et de la présenter aux gens.” Et plus sa carrière avance, plus Marina pense qu’il est facile de rester authentique et ne plus se soucier de l’avis des autres : “Ça doit être le cas pour beaucoup d’artistes. Plus tu restes dans cette industrie, plus tu t’en fous (rires).”
Pour la première fois de sa vie, la chanteuse ne sait pas ce que sera l’après-Froot. Et même si ça lui fait peur, on ne doute pas qu’elle trouvera le moyen de nous étonner encore et de nous offrir des chansons dont elle seule a le secret. En attendant, on ne peut que trop vous conseiller de vous plonger dans l’univers de Marina and The Diamonds. Promis, vous ne le regretterez pas.
Pour voir Marina and The Diamonds en live, rendez-vous le 15 décembre au Grand Mix à Lille-Tourcoing. Et la chanteuse devrait repasser par la France en 2016 lors de la seconde partie de son Neon Nature Tour