On a rencontré l’homme qui fabrique les zizis d’Hollywood

On a rencontré l’homme qui fabrique les zizis d’Hollywood

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Par Pauline Mallet

Publié le

Les sexes que vous voyez au cinéma ne sont pas toujours ceux des acteurs.

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Qui ne s’est jamais demandé comment les scènes les plus torrides étaient tournées au cinéma ? Lorsque la fiction doit créer l’illusion de la réalité, les spécialistes du septième art redoublent d’efforts pour satisfaire les spectateurs les plus attentifs. S’armant de patience et de techniques pour être les plus crédibles possible, les acteurs et les membres de la production trouvent des astuces pour tourner ces scènes que l’on aime, secrètement (ou pas), regarder.

Les scènes de sexe “non simulées”

Il n’est pas rare que les réalisateurs fassent appel à des acteurs du monde de la pornographie pour doubler les protagonistes d’un long-métrage nécessitant une scène de sexe. Cette technique, en plus de donner des scènes réalistes (puisqu’elles sont réellement tournées), apporte une crédibilité absolue au film. Non seulement il n’y a plus besoin de chercher à créer l’illusion mais, en plus, le spectateur va être complètement impliqué dans ces scènes un peu olé-olé parfois gênantes mais que l’on prend plaisir à regarder (il faut l’avouer).

C’est le cas, par exemple, du sulfureux Love de Gaspar Noé. Présenté au Festival de Cannes de 2015, le film avait suscité de vives réactions. Les scènes non simulées que l’acteur principal Karl Glusman a dû tourner avaient profondément choqué certains festivaliers. Le film avait d’ailleurs été affecté d’une interdiction aux moins de 16 ans à cause de ses scènes jugées pornographiques par les plus conservateurs. En 2013, c’est un autre film qui avait fait parler de lui pour les mêmes raisons : L’Inconnu du lac d’Alain Guiraudie, qui mettait en scène des ébats sexuels en grande partie non simulés.

Les prothèses sexuelles

Il est difficile de parler des scènes de sexe au cinéma sans mentionner l’existence des prothèses sexuelles. Ces petits morceaux de latex, au réalisme bluffant, font les beaux jours des réalisateurs et des acteurs du cinéma. La réalisatrice Maïwenn avait d’ailleurs mentionné cette pratique, utilisée pour son film Mon Roi, lors d’un passage télévisé. Rares sont les cinéastes qui en parlent librement. Comme nous sommes très curieux et que tout le mystère autour de ces fameuses prothèses n’avait jamais réellement été soulevé, on est allés à la rencontre de Matthew W. Mungle, un makeup artist américain reconnu pour son travail impressionnant.

L’artiste, dont la carrière a été ponctuée par son travail sur Edward aux mains d’argent de Tim Burton, a même été nominé à l’Oscar du “Best Makeup” (Oscar des meilleurs maquillages et coiffures) pour ses collaborations sur La Liste de Schindler (Steven Spielberg), Ghosts of Mississippi (Rob Reiner) et Albert Nobbs (Rodrigo García). Si aujourd’hui Matthew est surtout spécialisé dans les maquillages morbides, tels que les corps sur les scènes de crimes, il est également amené de plus en plus souvent à créer des prothèses sexuelles pour le cinéma.

L’artiste américain, qui alterne entre ses différentes collaborations sur le grand et petit écran – il a notamment travaillé pour les séries mondialement connues Shameless (version US), NCIS et Esprits criminels –, axe son travail sur les corps. Des corps entiers, fracturés, blessés… Des corps morts ou des corps vivants. En rapport avec son talent pour les maquillages originaux, Matthew W. Mungle est également prothésiste.

W.M. Creations, Inc., la compagnie avec laquelle je travaille, et moi-même créons des prothèses. Ces prothèses, principalement des faux pénis, sont utilisées pour tourner des scènes sexuelles dans les films et les séries. Récemment, on a travaillé pour Shameless US, The Deuce (avec James Franco) ou encore The Overnight (avec Taylor Schilling et Adam Scott). L’idée est que les prothèses soient les plus réalistes possible afin que les spectateurs n’y voient que du feu. Par ailleurs, elles doivent également être très confortables pour que les acteurs puissent continuer à interpréter leur rôle sans être gênés.”

Le but est que les scènes puissent être tournées dans le plus grand réalisme possible et que l’acteur soit protégé d’un réel rapport avec son ou sa partenaire de jeu. Bien que les prothèses soient de plus en plus répandues, le budget pour de tels outils est assez conséquent (environ 5 000 euros la prothèse). Quand ce sont de grandes productions (comme Cinquante nuances de Grey par exemple), les prothèses sont d’une grande efficacité. Pratiques et ultraréalistes (en témoignent les photos ci-dessous), il est difficile d’obtenir un meilleur résultat – sauf si l’on use de scènes non simulées, évidemment. Néanmoins, des alternatives moins coûteuses sont également envisageables.

Les dessus de peau

Outre tourner des scènes érotiques et avoir recours à des prothèses qui ont un certain coût, les acteurs peuvent porter des dessus de peau. Ces espèces de collants, qui ressemblent à des sous-vêtements couleur peau, permettent de ne pas créer de contacts directs entre les parties intimes des deux acteurs. Très souvent, ces collants se portent sur les parties génitales. Les acteurs peuvent alors jouer sans souci des scènes de sexe, qui bien souvent sont totalement mécaniques – il faut garder en tête que les acteurs ne sont jamais seuls, mais entourés de toute l’équipe du film.

Bien que de légères différences de couleurs puissent être aperçues au moment du tournage, le film, une fois étalonné (lorsque l’image est uniformisée en post-production) et terminé, ne laisse plus de place au doute. Tout semble réel. Un peu comme avec les prothèses. Ce qui compte le plus, c’est que le spectateur soit dans l’illusion la plus totale et qu’aucun doute sur la fidélité des scènes à l’écran ne soit émis. Bien que le sujet soit peu abordé et que les scènes intimes restent mystérieuses (le sujet est encore délicat pour la plupart des gens), le sexe reste quelque chose d’important au cinéma.

Les relations sexuelles restent une partie de la vie que l’on aime voir à l’écran, sous toutes les formes et dans toutes les situations. Cela crée une passerelle entre la réalité et la fiction, même si beaucoup de ces scènes sont loin d’être fidèles aux situations de la vie réelle. Fantasmées et regardées parfois en secret, les scènes les plus intimes peuvent faire écho à nos envies. Mais bien qu’elles participent à une certaine représentation des relations intimes que chacun peut avoir, il reste, en tout cas pour le grand écran, beaucoup de travail à fournir sur la diversité possible des histoires charnelles.