Trois raisons d’aller voir Manchester by the Sea, la perle du cinéma indépendant

Trois raisons d’aller voir Manchester by the Sea, la perle du cinéma indépendant

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( © Manchester by the Sea – Amazon Studios )

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Par Lucille Bion

Publié le

Manchester by the Sea sort dans les salles ce mercredi 14 décembre. Konbini vous donne trois raisons d’aller voir ce chef-d’œuvre poignant, porté par Casey Affleck. 

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Lee Chandler mène une vie misérable, enfermé dans un taudis. Pour vivre, il répare entre autres, avec un abattement non dissimulé, la tuyauterie des habitants d’un immeuble de Boston. Un jour, son téléphone sonne pour lui apprendre une funeste nouvelle : son frère aîné Joe a fait un arrêt cardiaque. Lee se retrouve ainsi désigné comme le tuteur légal de son neveu, Patrick, en pleine adolescence. Mais un évènement passé (que l’on a décidé de ne pas expliquer) l’empêche d’assumer pleinement ce rôle.

Plutôt discret à Hollywood alors qu’il est l’un des scénaristes de Gangs of New York, Kenneth Lonergan signe une troisième réalisation avec Manchester by the Sea. Après Tu peux compter sur moi et Margaret, ce drame poignant avec Casey Affleck dans le rôle-titre, et quelques apparitions de Michelle Williams, va assurément faire décoller sa carrière.

Déjà pressenti pour rafler les Oscars, Manchester by the Sea, sous ses airs de chronique familiale, prétexte à dresser une succession de portraits psychologiques, est avant tout un film sur la culpabilité. Produit par Matt Damon, le film interroge notre rapport à la mort.

Et parce qu’il n’y a pas que Star Wars qui sort dans les salles ce 14 décembre, Konbini vous donne trois bonnes raisons de voir ce chef-d’œuvre qui fait aussi bien rire que pleurer.

1. Lucas Hedges, un jeune acteur à suivre

Lucas Hedges, dans le rôle de Patrick, est bouleversant. Cet acteur n’en est pourtant pas à son premier rôle : on a pu apercevoir sa petite bouille discrète dans Secret d’État ou Last Days of Summer. Il a aussi été dirigé par Wes Anderson dans Moonrise Kingdom et The Grand Budapest Hotel. 

Pour Kenneth Lonergan, il joue un ado révolté, obstiné et bien décidé à réussir sa première fois. En jonglant avec ses deux copines et son groupe de musique, il semble parfois insensible à la mort de son père.

Abandonné aussi par sa mère qu’il retrouvera plus tard reconvertie en grenouille de bénitier, il est le personnage qui permet au film de ne pas tomber dans le pathos larmoyant. Parfois plus responsable que son oncle, il engendre, avec ses faux airs de sportif cool et détaché, des scènes comiques, en visant le réalisme et en atteignant toujours la justesse. Sans lui, le film serait irrespirable, moins convaincant. Et surtout, c’est lui qui permet à Casey Affleck de se dévoiler totalement.

On va maintenant guetter chacune de ses apparitions.

2. Le meilleur rôle de Casey Affleck

Lorsque l’on a fait la connaissance de Casey Affleck, c’était dans Lemon Sky, en 1988. Depuis, il a tracé sa route, oscillant entre les blockbusters et les films indépendants. Comme s’il existait deux Casey Affleck. Celui, toujours considéré comme le frère de Ben Affleck, qui lui a offert le rôle principal dans son Gone Baby Gone et l’autre, que l’on semble découvrir pour la première fois dans Manchester by the Sea : Lee, cet écorché vif, solitaire capable de nous faire vider un paquet de mouchoir en un peu plus de 2 heures.

Casey Affleck a su trouver un équilibre dans son jeu, en effleurant de nombreux codes du cinéma. Il a ainsi puisé aussi justement dans la violence, la tendresse et le désespoir. Torturé par son passé tragique, il endosse un rôle de loser passif et taiseux mais nous hypnotise aussi lorsqu’il fait face à son ex-femme (Michelle Williams), en véritable anti-héros.

3. Un jeu caméra magistral

Manchester by the Sea est un récit qui prend son temps. Puisque l’intrigue se construit du point de vue de Lee, on assiste à une mise en scène morcelée, en puzzle, permettant ainsi de donner le temps au scénario de se déployer, répondant petit à petit à toutes les interrogations et les mystères qui façonnent le personnage principal, qu’on parvient finalement à cerner. 

Le réalisateur a choisi de jouer avec la caméra, qu’il utilise comme une autre forme de langage, plus explicite. Il y a notamment cette scène, sans doute la plus poignante du film, où Lee révèle enfin, à travers un travelling avant extrêmement lent, la blessure qu’il a enfouie au plus profond de lui. 

Kenneth Lonergan utilise aussi des plans larges, très larges. Pour signifier d’une part, le temps qui s’est écoulé. Histoire de nous faire comprendre que ce héros qui est en train de parler et de plaisanter, à peine identifiable, puisque filmé de très loin, est devenu un autre homme, transformé par la vie et les drames. D’autre part, c’est une manière habile de présenter un décor sublime : Manchester, cette charmante petite ville du Massachusetts, sous la neige. 

Finalement, le réalisateur ne fait rien comme les autres. Dans une société qui nous demande d’aller toujours plus vite, lui, privilégie une mise en scène lente, pudique et souvent contemplative, pas moins divertissante.