Jouer à Tetris permettrait de réduire les addictions

Jouer à Tetris permettrait de réduire les addictions

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Par Arthur Cios

Publié le

Selon une étude, jouer à Tetris tous les jours, ne serait-ce que trois minutes, ferait baisser drastiquement certaines envies, d’avoir des rapports sexuels à fumer une cigarette.

Début 2014, une drôle d’étude tombait : jouer à Tetris couperait les envies de manger, de boire ou de fumer. L’information, reprise un peu partout, avait surpris au premier abord. La recherche n’était pas assez complète pour certains, estimant que l’aspect “étude de laboratoire” rendait la chose pas assez réaliste.
C’est ainsi que, comme le révèle le site Motherboard, l’Université de Plymouth, à l’origine de la première recherche sur le sujet, s’est associée à l’Université de Queensland, en Australie, pour renouveler l’opération, mais cette fois, dans leur environnement ambiant et loin des labos (une première pour ce genre d’étude par ailleurs). Jackie Andrade, chercheuse britannique de l’Université de Plymouth, nous explique les origines de l’expérience :

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Nous voulions comprendre les processus mentaux qui se déroulent durant un épisode d’envie de nourriture ou de produits addictifs. Nous savions que ces envies sont largement des évènements mentaux car les gens les subissent rarement quand ils sont au milieux d’une tâche qui demande un effort mental – faire une présentation ou finir un roman excitant, par exemple.
En comprenant ces processus, nous pensons pouvoir améliorer les traitements pour les addictions et les problèmes de nutrition, mais aussi chercher des moyens de renforcer le désir d’avoir des activités bonnes pour la santé. L’imagerie mentale visuelle est une composante clé de ce sentiment de désir, avec des gens s’imaginant eux-mêmes se livrer à ce désir.
La recherche en laboratoire avait montré que bloquer cette imagerie pouvait réduire la force de l’envie pour la nourriture et les cigarettes. Et Tetris est une bonne tâche pour le bloquer parce que ce jeu implique plusieurs processus visuels, de rechercher en permanence les bonnes couleurs et de les faire tourner mentalement afin qu’ils rentrent dans les espaces disponibles. Pour notre dernière recherche, nous voulions savoir si Tetris pouvait également bloquer ces envies dans “la vraie vie” plutôt qu’en laboratoire, et si cela fonctionnait également sur des envies plus communes.

L’expérience en question

“Il est difficile d’imaginer quelque chose vivement et de jouer à Tetris en même temps”

De là, il y a énormément de données à regarder, à comparer, à analyser. Par exemple, les chercheurs expliquent que les effets du jeu Tetris ne se sont pas atténués pour ceux qui y ont le plus joué. De même, le jeu était encore efficace pour faire baisser le niveau d’envie, même sous influence d’alcool. Enfin, jouer à Tetris n’engendrait pas une baisse du niveau d’envie sur le long terme (à l’échelle de l’expérience, c’est-à-dire une semaine).
Jackie Andrade, toujours, interprète la chose ainsi :

L’étude montre que des jeux tels que Tetris peuvent être des outils utiles pour réduire la force de certaines envies, au point où elles peuvent être tolérées. Un désir comme ceux-ci peut parfois être tellement intense qu’il en devient insupportable, mais même quand les personnes essayent de quitter l’addiction, les épisodes d’envies ont tendance à ne durer que quelques minutes. S’il peut être toléré pendant ce temps, c’est un pas en avant pour une abstinence totale. Plus une personne bat ce besoin, plus elle sera confiante sachant qu’elle pourra désormais plus ou moins gérer ses pics d’envies et se tenir à son objectif.

Tetris a été utilisé pour d’autres recherches, notamment une mettant en avant le fait que le jeu aiderait à réduire le nombre de flashbacks pour les personnes victimes de traumatismes. Si l’on comprend effectivement que le jeu se base un peu plus sur la réflexion rapide que sur les réflexes comme avec des jeux tels que Sonic, et que l’aspect court d’une partie facilite l’expérience, il serait étonnant que Tetris soit le seul jeu présentant cette aspect-là sur les joueurs. Et encore, nous ne parlons que de jeu vidéo ici.
Au lieu de trouver d’autres sources de solutions, les chercheurs, quant à eux, souhaiteraient aller plus loin encore.

Des recherches futures devraient tester l’impact sur une population en clinique – des personnes avec des dépendances pour certaines substances par exemple – en incorporant des outils de gestion des pics d’envies avec des parties rapides de jeux comme Tetris au sein des traitements pour addiction.

En attendant qu’on nous prouve cliniquement que quelques briques peuvent battre l’héroïne (ce qui serait génial), vous pouvez toujours essayer de vous faire des petites parties de temps à autre, histoire de voir si vous voulez toujours fumer cette cigarette ou vider cette canette de Coca-Cola.