Jeff Goldblum fait battre le cœur de Deauville

Jeff Goldblum fait battre le cœur de Deauville

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DEAUVILLE, FRANCE – SEPTEMBER 03: US actor Jeff Goldblum arrives at the “Kidnap” premiere during the 43rd Deauville American Film Festival on September 3, 2017 in Deauville, France. (Photo by Francois G. Durand/Getty Images)

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Par Mehdi Omaïs

Publié le

Dimanche soir, l’acteur Jeff Goldblum, 64 ans, a reçu un hommage remarqué au 43e Festival du cinéma américain de Deauville. Il en a profité pour assurer le spectacle avec le charme et le panache qu’on lui connaît.

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Cheveux poivre et sel, lunettes à bord épais, chemise à pois et cravate aux motifs reptiliens… Aucun doute : l’apparition de Jeff Goldblum a quelque chose de magique. Avec son allure de dandy et son regard lunaire, ce natif de Pittsburgh, en Pennsylvanie, paraît avoir macéré très longtemps dans l’imaginaire d’un écrivain fantasque. Il se tient debout, de tout son mètre quatre-vingt-quatorze, élégant et heureux. L’accueil est enthousiaste, et l’échange camarade. Quand il parle, les intonations changent, fluctuent abruptement. Il chantonne parfois, ses grands yeux noirs sont ouverts et perçants. Son plaisir de fouler le sol deauvillais irradie l’espace : “Nous, les Américains et les Français, sommes frères. […] Vous savez, j’ai l’impression de vivre un rêve”, susurre-t-il, comme s’il s’adressait à lui-même.

Pour sa 43e édition, le Festival du cinéma américain de Deauville a en effet choisi d’éclairer de mille feux sa riche carrière, en lui rendant un hommage mérité. “Je suis venu avec mes deux enfants et ma femme, Emilie Livingston, lance-t-il. C’est une ancienne championne olympique de gymnastique rythmique. Elle a doublé Emma Stone dans certaines scènes de La La Land et Rihanna dans la séquence de pole dance de Valerian et la Cité des mille planètes.” Il est comme ça, Jeff. Il semble vouloir mettre en avant ceux qu’il aime bien, avant sa propre personne. Et c’est donc avec un appétit indiscutable qu’il évoque, pêle-mêle, certains noms, dont celui du réalisateur canadien David Cronenberg.

“Je l’ai rencontré quelque part en 1985 pour La Mouche, se souvient Goldblum. Nous avons eu un crush personnel et artistique quasi instantané. C’est un homme courageux, intelligent, attentionné et cultivé. Son investissement et sa passion pour l’histoire étaient incroyables. Quand j’ai lu le scénario, quelque chose a brillé au fond de moi.” Sous les traits de Seth Brundle, un biologiste transformé en homme-insecte à la suite d’une tentative de téléportation, Jeff Goldblum fait des étincelles et confirme alors sa montée en puissance après Annie Hall, L’Invasion des profanateurs et Les Copains d’abord.

Si son talent s’avère protéiforme, le cinéma de SF s’en empare surtout pour en faire une figure récurrente du savant/scientifique un poil barré et fondamentalement attachant. En témoignent ses contributions dans Jurassic Park, dans lequel il est spécialiste de la théorie du chaos, ou Independence Day, où il incarne un analyste informaticien. “Je n’ai jamais compris pourquoi ce personnage m’a collé à la peau, lâche-t-il en riant. Quand j’étais petit, je voulais désespérément être acteur. C’était mon but. J’ai toujours été intéressé par les arts créatifs, la peinture notamment, que j’ai un temps pratiquée. Je n’ai pas fait d’études de sciences, contrairement à mon père, qui était médecin. Tout ce que je peux dire aujourd’hui, c’est que j’exerce ce métier avec passion et que je continue d’apprendre tous les jours.

Avec près de 100 films à son actif, l’intéressé aime par ailleurs se rappeler du tournant Jurassic Park, au début des années 1990. Le souvenir est spécial : “J’étais excité comme un enfant à l’idée de tourner un film avec des dinosaures. J’étais fan du bouquin de Michael Crichton, et évidemment de Spielberg. J’avais vu Rencontres du troisième type au cinéma, à la première séance. Steven voulait vraiment faire quelque chose de gros et populaire.” Pari relevé !

Au fil des années, Jeff Goldblum, qui estime n’avoir “aucune stratégie de carrière” dans le viseur, a jonglé entre grosses productions, à l’instar d’Independence Day du “non-violent et doux” Roland Emmerich, et films plus indépendants, comme ceux du “génial et féerique” Wes Anderson, qui l’a fait entrer dans sa mythologie de personnages bigarrés et attachants. À 64 ans, le comédien garde plus que jamais son statut d’électron libre. On le verra bientôt dans les mastodontes Thor: Ragnarok et Jurassic World: Fallen Kingdom, ainsi qu’aux côtés de Jodie Foster dans le thriller Hotel Artemis, de Drew Pearce. “J’aime varier les plaisirs”, assure-t-il. Plus tard dans la journée, il a foulé le tapis rouge normand sous la pluie pour contenter ses nombreux fans. L’actrice Emmanuelle Devos a souligné “son zeste de folie”, “son incarnation d’une vitalité que l’on aimerait tous partager”, avant qu’il ne monte sur scène pour assurer le show devant un public conquis et charmé.

Virevoltant, extatique, il occupe l’espace comme le plus chevronné des performeurs. Comme un enfant entrerait dans un parc d’attractions. Le matin même, il régalait déjà les clients de l’hôtel Le Normandy au piano. “J’adore le jazz, a-t-il lancé à la foule. Si vous passez par Los Angeles, venez me voir jouer avec mon groupe au Rockwell. C’est tous les vendredis soir.” Galvanisé par l’emprise qu’il a sur le public, il s’essaye à quelques gestes de mime, chantonne dans un français attendrissant le refrain de Fernande, de Georges Brassens, ou fredonne encore La Marseillaise sous les hourras. En conclusion, il lance : “C’est le plus beau jour de ma vie !” On te croit sur parole, Jeff !