Entretien : avec sa pop enjouée, Camila Cabello entend “représenter les jeunes filles hispaniques”

Entretien : avec sa pop enjouée, Camila Cabello entend “représenter les jeunes filles hispaniques”

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Par Naomi Clément

Publié le

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“Les One Direction étaient pour moi le premier exemple de gens qui venaient de milieux tout à fait normaux, et qui avaient réussi”

Tu as fait ton entrée dans l’industrie musicale en intégrant le groupe Fifth Harmony, à seulement 15 ans. La musique, c’est quelque chose que tu as toujours convoité ?

Je crois que j’ai toujours voulu devenir chanteuse, oui. Mais j’ai longtemps pensé que ce métier n’était pas pour moi. J’ai grandi à Miami, et là-bas, tout est beaucoup plus compliqué niveau musique ; ce n’est pas comme si j’avais grandi à Los Angeles, et que mon oncle avait un pied dans cette industrie. Donc je me suis longtemps dit que je ferai autre chose – ce qui n’est pas un bon état d’esprit.

Durant mon adolescence, j’étais obsédée par les One Direction, qui ont été découverts grâce à l’émission britannique X Factor. J’adorais leur musique, mais surtout, ils étaient pour moi le premier exemple de gens qui venaient de petites villes, de milieux tout à fait normaux, et qui avaient malgré tout réussi. Alors, quand, l’année de mes 15 ans, j’ai appris que X Factor débarquait aux États-Unis, j’ai supplié mes parents de m’y emmener. Et c’est comme ça que tout a commencé.

Après ton passage dans l’émission, tu as intégré le groupe Fifth Harmony, que tu as fini par quitter en décembre 2016. Comment décrirais-tu la musique que tu façonnes aujourd’hui, en solo ?

Je crois que ma musique est simplement le fruit de toutes mes influences – et il y en a beaucoup ! D’un côté, il y a le côté latino, qui fait partie de moi ; mais il y a aussi tous ces autres genres musicaux, comme le hip-hop, la pop, le rock, l’indie, la folk… je crois que j’ai été obsédée par à peu près tous les genres [rires] ! Donc oui, je crois que je puise dans toutes ces musiques qui m’ont influencée et continuent de m’influencer, et que j’en fais ma petite mixture. Plus tu as de références, plus tu peux construire ta propre identité.

“Kendrick Lamar et J. Cole font partie de mes artistes favoris”

Tu as récemment collaboré avec de nombreux rappeurs, dont Young Thug, Travis Scott et Quavo des Migos. À quel point es-tu inspirée par la scène hip-hop contemporaine ?

Énormément ! Ce que j’aime le plus chez ces artistes, c’est qu’ils ne font pas semblant. Ils sont honnêtes, ils n’essaient pas de plaire à qui que ce soit, de rentrer dans un moule. L’authenticité a toujours été l’une des plus grandes caractéristiques du hip-hop. Et le fait que ce genre musical, dont le but originel était de donner une voix à ceux qui n’en avaient pas, a été le plus écouté de l’année aux États-Unis, ça me rend juste super heureuse !

Tu sais, l’industrie musicale essaie toujours de te ranger dans des cases. Alors forcément, quand je vois des artistes qui se rebellent contre ça, qui luttent contre ça, ça ne peut que m’inspirer. Et puis, je crois que j’aime savoir qu’il y a des gens qui ont dû travailler dur pour réussir, lutter. C’est sans doute pour ça que Kendrick Lamar et J. Cole, pour ne citer qu’eux, font partie de mes artistes favoris. Ils exposent un autre point de vue. Ça fait du bien.

Mis à part Young Thug, Travis Scott et Quavo, y a-t-il d’autres artistes avec lesquels tu aimerais collaborer ?

J’adore Ed Sheeran ! Il a écrit une chanson pour mon prochain album, mais j’adorerais que nos voix se croisent sur un morceau. J’adore ce qu’il fait… ! Et puis Drake et Rihanna aussi, ce serait génial.

“Représenter les jeunes filles hispaniques”

Tu es née à Cuba et a grandi au Mexique. À quel point est-ce important d’intégrer tes racines hispaniques dans ta musique ?

Je le fais de manière totalement inconsciente. À aucun moment je me suis dit : “Oh, il faudrait qu’on fasse référence aux telenovelas dans le clip de ‘Havana'” par exemple. Non. C’est juste venu comme ça, parce que c’est une partie intégrante de mon identité. Mis à part Disney Channel, j’ai écouté énormément d’Alejandro Sanz, de David Bisbal, de Maná en grandissant. Je trouve qu’il y a tellement de belles choses à tirer de cette culture ! Donc pour répondre à ta question : je crois que je ne peux juste pas ignorer cette partie de moi. Et je crois aussi que ça me permet, quelque part, de représenter les jeunes filles hispaniques. Ça leur permet d’avoir une sorte de “modèle” que, personnellement, je n’ai pas eu en grandissant.

J’ai l’impression qu’il y a de plus en plus de chanteuses américaines qui, comme toi, ressentent le besoin d’exprimer leurs origines latino-américaines et de représenter tout ce pan de la jeunesse américaine qui, comme tu l’as dit toi-même, a grandi sans modèle. Je pense notamment à Princess Nokia, Kali Uchis, Jessie Reyez…

Oui, je suis totalement d’accord (j’adore Kali Uchis, au passage !). Et je trouve ça vraiment génial. En fait, je crois que l’industrie musicale en a marre d’être conformiste, et que la différence est ce qui fait aujourd’hui la force d’un artiste. Les gens prennent davantage de risques aujourd’hui, ils n’ont plus peur d’être différents. Et le seul moyen d’être différent, c’est d’être vraiment toi-même, d’utiliser ta voix, tes expériences, ton histoire. Et ça ne vaut pas seulement pour le monde de la musique, finalement. Ça vaut pour tout le monde, dans tous les domaines.

“Faire un album, c’est un peu comme sculpter un gros bloc de marbre brut”

Cet été, tu as assuré la première partie d’une vingtaine de dates pour la tournée “24k Magic” de Bruno Mars. Comment as-tu vécu cette première scène en solo ?

C’était vraiment super flippant au début, parce que forcément, les gens qui étaient présents étaient des fans de Bruno Mars, ils n’étaient pas venus pour moi. C’était la première fois que je me confrontais à ce genre d’expérience. Donc j’étais très stressée et intimidée pour les premières dates. Et puis finalement, je me suis détendue, et j’ai approché ça comme un défi, en me disant qu’il fallait que je gagne les applaudissements de ces personnes, que je redouble d’efforts pour établir le contact, pour faire en sorte qu’ils se lèvent de leurs sièges. Avec le recul, je crois que ça m’a aidée à devenir une meilleure performeuse, et à être beaucoup plus à l’aise sur scène.

Est-ce que tu pourrais m’en dire plus sur ton premier album solo The Hurting. The Healing. The Loving ?

Je peux déjà te dire qu’il devrait sortir en début d’année 2018, et que je me suis éclatée à le faire ! Vraiment ! À mes yeux, tous les morceaux qui le composent sont super différents, mais ils permettent chacun à leur façon d’exposer une facette différente de ma personne. Faire un album, c’est un peu comme sculpter un gros bloc de marbre brut, finalement. Plus tu le sculptes, plus tu vois apparaître le produit final.