5 petites histoires sur le grand Jerry Lewis

5 petites histoires sur le grand Jerry Lewis

Image :

(Les multiples facette des Jerry Lewis © Facebook )

photo de profil

Par Lucille Bion

Publié le

Parce que ce sont les petites histoires qui font la grande histoire. Voici Jerry Lewis en cinq anecdotes.

À voir aussi sur Konbini

Jerry Lewis, la légende hollywoodienne, est décédé ce dimanche 20 août à Las Vegas. Toute la journée, l’humoriste et comédien a reçu des hommages. De sa vie longue de 91 années, nous avons choisi cinq petites histoires, pour se remémorer le grand homme qu’il était. Du tournage houleux de La Valse des pantins de Martin Scorsese, où il se trouvait face à un Robert de Niro cinglant, à ses premiers numéros de charme en passant par sa réputation en France, voici cinq anecdotes plus ou moins célèbres sur l’un des plus illustres comiques.

#1. Le rire, une manière de séduire

Dans sa lettre à Jerry Lewis, Grégory Monro – le documentariste qui a reconstitué il y a deux ans la vie de l’artiste dans Jerry Lewis, Clown rebelle – explique que, si la légende raconte qu’il est monté sur la scène du President Hotel dans l’État de New York à seulement cinq ans, le comédien précoce a véritablement donné son premier show un peu plus tard, en voulant séduire une fille.

Un soir, sa proie écoutait un disque d’Edythe Wright et Jerry Lewis, sans vraiment expliquer pourquoi, s’est mis à faire le clown, chantant en play-back avec ses divines mimiques. Pendant trois ans, au fil de ses tournées, il se fera connaître avec ce numéro iconique, “Jerry Lewis, imitations satiriques en pantomime”.

#2. Un baiser à Louis de Funès qui a marqué la France

Vite délaissé par les Américains, Jerry Lewis était, en revanche, adoré des Français. Il n’y a qu’à regarder sa filmographie : dans l’Hexagone, les titres de ses films sont traduits de sorte à ce que son nom rayonne. Mis en valeur, son patronyme devient un argument de vente à lui seul. Ainsi, It’$ Only Money devient L’Increvable Jerry et Nutty Professor se transforme en Docteur Jerry et Mister Love. Avec cette petite dizaine d’exemples, on comprend assez rapidement que Jerry Lewis est une légende.

En France, notre comique national s’appelle Louis de Funès. Lorsqu’il devait recevoir son César d’honneur en 1980, il n’y avait donc pas meilleure vedette pour lui remettre sa récompense que Jerry Lewis. La preuve en une scène mémorable : au moment de lui remettre son prix, Jerry Lewis s’avance vers son collègue français et l’embrasse avec fougue. Outre ces manières un peu cavalières, cette scène est restée, allons savoir pourquoi, mémorable…

#3 L’insulte de Robert de Niro dans La Valse des pantins

Après Mean Streets, Martin Scorsese présente en 1983 la Valse des pantins à Cannes, en compétition officielle. Cette critique acerbe du show-biz est, ironiquement, un échec commercial. Cette comédie noire se concentre sur Robert de Niro, une vedette ratée pleine d’illusions et attirée par la fame. Une version comique du Travis de Taxi Driver, mentalement dérangé et déterminé à sortir de l’anonymat.

Dans le film, encore amateur dans le milieu du spectacle, le personnage en tête d’affiche vient demander à Jerry Lewis, son mentor de toujours, des conseils pour percer. On se souvient de leur première rencontre dans le film, pour laquelle ils ont dû braver une foule de fanatiques. Le monologue de Robert de Niro prend aujourd’hui tout son sens :

“C’est ce truc-là qui m’a donné envie de devenir comédien. Je suis sorti de cette émission comme dans un rêve. Je n’ai pas raté un seul de vos passages dans l’émission d’Ed Sullivan, j’ai étudié tout ce que vous avez fait, j’ai étudié votre manière d’amener une bonne réplique, l’air de rien… Comment vous avez amené vos plaisanteries, sans jamais appuyer les effets. Comment vous ne dites pas : ‘Hé, mesdames, messieurs, voilà la chute, vous voyez ?’ C’est toujours tellement fin, c’est ce que j’essaie de dire. Vous êtes un prince.”

Derrière cette séduction intéressée, il y a l’implication légendaire de Robert de Niro. Comme d’habitude, pour composer son personnage, l’acteur a étudié en long en large et en travers la carrière de Jerry Lewis, épluchant notamment ses films. Dans un élan cordial et pour lui faciliter la tâche, l’humoriste avait invité personnellement Robert de Niro, afin de préparer leur duo avant le tournage. Robert de Niro a refusé. Il a même fait pire : lors d’une scène du film, celle du débarquement dans l’appartement, où Jerry Lewis était insuffisamment en colère, Robert de Niro n’a pas hésité, entre deux prises, à lui balancer une petite insulte antisémite pour faire monter le juif au quart de tour et ainsi rendre la scène plus réaliste.

#4. The Day the Clown Cried, le film mystérieux

Film maudit, The Day of the Clown Cried (Le jour où le clown pleura, en français), écrit et réalisé par Jerry Lewis dans les années 1970, reste l’un des chapitres les plus intéressants de la vie du défunt comique. “Un jour ou l’autre, je le finirai”, répétait-il inlassablement. Cette adaptation de l’œuvre éponyme de Joan O’Brien et Charles Denton publiée en 1962 nous replonge en pleine Seconde Guerre mondiale, dans les traces d’un clown ringard, qui finira derrière les barreaux pour avoir blâmé Hitler. L’histoire de ce film, on la connaît. Le scénario est même échoué sur la Toile. En revanche, l’œuvre est sous clé, à la bibliothèque du Congrès à Washington, et ce jusqu’en 2025.

Après de nombreux rebondissements, entre grosses pertes d’argent, de matériel et un procès avec Wachsberger, le producteur qui manqua à ses devoirs, Jerry Lewis avait fini par achever The Day the Clown Cried, dont la copie originale, aujourd’hui introuvable, se trouvait sur une cassette vidéo bien cachée. Lors des interviews, personne ne devait évoquer le projet. C’était la consigne.

Rares sont ceux qui ont pu voir le film lors de projections ultraprivées. The Day the Clown Cried est devenu légendaire. Certains le démontaient, le qualifiaient d’horrible et d’atroce. D’autres le trouvent toujours nécessaire. Quoi qu’il en soit, lorsque l’auteur a confié en 2015 le film à l’institution américaine, il leur a fait promettre de conserver l’œuvre pendant dix ans. Mais dix ans, c’était trop long pour un homme presque nonagénaire : c’est donc un public résolument plus moderne qui le découvrira. Et peut-être que la jeune génération fera fi de toutes ces anciennes controverses, et le trouvera visionnaire.

#5. L’inventeur du Téléthon

Derrière ses multiples casquettes de réalisateur, comédien, scénariste et producteur, Jerry Lewis s’est imposé dans les médias comme un homme au grand cœur. Son nom est d’ailleurs indissociable du Téléthon. Né en 1966 aux États-Unis, l’événement caritatif vise à s’occuper des enfants handicapés et s’étend de l’autre côté de l’océan Atlantique en 1987, à l’initiative de deux pères de famille français dont les enfants sont atteints de myopathie. Leur parrain ne sera autre que Jerry Lewis.

Au début du mois de décembre de l’année 1987, le premier Téléthon est diffusé sur Antenne 2. L’émission fait connaître la maladie et s’achève sur une collecte de 181 millions de francs (27,6 millions d’euros), soit trois fois plus que le montant espéré. Depuis, le Téléthon est réputé pour être la plus grosse collecte populaire au monde. L’effet Jerry Lewis, on vous dit.