“Gravity est le film qui s’approche le plus de la réalité spatiale”

“Gravity est le film qui s’approche le plus de la réalité spatiale”

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Par Louis Lepron

Publié le

Gravity option “images sublimes”

Au téléphone, Thomas Pesquet est enthousiaste. Tellement que ce spationaute française d’à peine 35 ans est allé voir deux fois Gravity : C’est un très bon film, je le recommande à tout le monde”. Selon lui, plusieurs éléments doivent être retenus et le premier d’entre eux est l’image. 

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C’est du grand spectacle. Gravity est le film qui s’approche le plus de la réalité spatiale. Pour les scènes extérieures, on sent vraiment la complexité, la grandeur de l’espace. Les images sont à couper le souffle et on peut même apprécier la Station spatiale internationale, grande comme un terrain de football [110 mètres de long, ndlr]. Tous les boulons sont comme à leur place, avec la bonne étiquette.

La 3D ? “On perd quelque chose si on ne le voit pas en 3D. Car l’un des grands plaisirs, l’une des grandes beautés d’un vol spatial, c’est cette sensation de liberté absolue. Et l’utlisation de la 3D permet de mettre les gens dans cette situation là”.
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La deuxième idée qui donne envie de retourner voir le dernier Alfonso Cuarón, c’est le noir. Selon Thomas Pesquet, Gravity aborde avec force cette dimension :

La scène où Sandra Bullock est toute seule dans l’espace retranscrit ce qu’on peut éprouver dans l’espace. L’astronaute a juste deux petites lampes sur lui. Et lorsque la Terre n’est plus éclairée par le soleil, on est dans le noir le plus total.

A cela s’ajoute une peur qui est propre au métier même de spationaute : celle de tomber dans le vide, de ne plus être lié à un objet, quel qu’il soit. Thomas Pesquet souligne qu’il est possible, à l’aide du scooter (un outil disposé sur la combinaison spatiale qui permet de “naviguer” dans l’espace) d’éviter de tournoyer indéfiniment dans le rien.
Mais la crainte viscérale de “tomber” est là, palpable :

Dans le passé, si jamais un astronaute rencontrait un problème, la navette arrimée à la station pouvait se détacher et allait le chercher. Maintenant, il n’y a plus de navettes. Si l’on se détache et qu’on n’a plus de contact, on n’a plus que huit heures d’oxygène. Avant de mourir.

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Graviyy option incohérences

Au-delà de cette approche dithyrambique, Thomas Pesquet, pilote et astronaute de formation, n’est pas dupe de certaines scènes.

Quand on est un professionnel du spatial, il faut mettre en sommeil son esprit critique et scientifique devant Gravity.

En témoigne quelques “libertés prises par les scénaristes avec la physique” lorsqu’un des personnages tente de passer d’une station à une autre : l’orbite et l’inclinaison ne sont pas au même niveau. “Comme si deux balles de fusil se croisaient”. Thomas Pesquet y voit des incohérences, pas des ignorances.
Comme il l’affirme, “à Hollywood, les scénaristes sont souvent très bien conseillés, ils savent ce qu’ils font”. Des incohérences pour mieux dérouler le tapis du scénario.

Gravity option message et souvenirs

Dans la tête de Thomas Pesquet, on trouve un amour, dès le plus jeune âge, pour les étoiles. Un amour qui sera motivé lors du visionnage de 2001 : l’Odyssée de l’espace de Kubrick, “un film à la fois poétique dans sa vision du sujet et cohérente au niveau de la technique et de la science”, ou encore Apollo 13 de Ron Howard et L’Étoffe des héros, cette fameuse adaptation des écrits de Tom Wolfe.

Même si j’avais envie de devenir astronaute bien avant, ces films m’ont motivé. Ils ont renforcé cette passion. Depuis que je suis dans la réalité du métier, les meilleurs films sont finalement les plus réalistes. Les plus fantaisistes, comme Armageddon, plaisent moins aux gens. C’est rassurant.

J’y vois une espèce de résilience, d’instinct de survie. Sandra Bullock a tout contre elle, elle s’accroche à la vie.

Le spationaute perçoit aussi, au détour de l’histoire, une illustration de la coopération internationale, vingt ans après la fin de la Guerre froide. En attendant, le Français n’a qu’un objectif en tête : préparer sa mission dans l’espace. Ce sera en 2016 ou 2017. Mais il s’en fout : il a “hâte”.